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Mauritanie : Entre conjonctures et timides changements … dans la continuité   Spécial

 

Source : Météo Sahel et Afrique de l'Ouest 

Timbuktu Institute, Juillet 2022

Les récents développements au plan politique qui ont conduit à mettre à la tête du parti au pouvoir, Ould Eyih quelques heures après la démission de l’ancien président Sidi Mohamed O. Taleb Amar, sont l'expression de besoins de changements dans le système politique mauritanien. En atteste aussi le changement de nom du parti à la tête du pays, l'Union Pour la République (UPR) devenu, depuis ce 3 juillet 2022, Insaf qui signifie "Équité" en arabe. 

 

Confrontée, ces derniers temps, à la conjoncture économique internationale et à la grogne des populations face à la flambée des prix, la Mauritanie s’est dotée d’un nouveau gouvernement en avril. 

 

Mais ce remaniement ministériel a du mal à convaincre, d’autant plus que les postes clés sont restés entre les mains des hommes forts du même régime. Cependant, deux départs importants sont à souligner: d’une part, celui du Ministre des Affaires Étrangères -ce qui laisse présager que le Président Mohamed Ould Ghazouani n’était pas satisfait du chef de sa diplomatie à la suite de plusieurs assassinats de mauritaniens au Mali voisin-. 

D’autre part, le Ministère des Finances est désormais confié à l’ex-directeur des impôts. Cette stratégie vise à renflouer les caisses de l’État -ce qui devient une impérieuse nécessité- mais aussi d’amoindrir les coûts des denrées alimentaires qui éloignerait le spectre d’ “émeutes de la faim” au moment où le monde est confronté à une crise qui concerne deux pays principaux exportateurs de céréales. 

 

La République Islamique de Mauritanie semble toujours hantée par de vieux démons. Après les évènements de 1989 exaspérés par des disparités communautaires, ce système continue de faire l’objet de dénonciation par la communauté noire mauritanienne qui se dit victime d’un “racisme d’État” caractérisé par des recrutements “mono-ethniques” dans les écoles d’excellence du pays ; ce qui rend les équilibres sociaux encore très fragiles. Le climat social reste délétère en Mauritanie pendant que la situation économique post-covid et les conséquences que la crise Russo-Ukrainienne continuent d’impacter ce pays à l’instar des autres Etats sahéliens. 

La détention de l’ancien Président cristallise encore les débats pendant que le pays tend vers une Concertation Nationale Inclusive (CNI) qui vise à traiter de “tous les maux que traverse la Mauritanie”.

 

Toutefois, sur le front de la lutte contre le terrorisme, la Mauritanie a adopté des stratégies qui, jusque-là, ont produit des résultats probants sur le terrain, malgré l’insécurité ambiante au Sahel et les attaques terroristes dans la région. Le dernier incident sécuritaire attribué à un groupe terroriste dans ce pays remonte à 2011. La question que se posent de nombreux experts est d’ailleurs de savoir si la stratégie mauritanienne de lutte contre le djihadisme pourrait faire des émules dans d’autres pays du Sahel malgré les lourdes pesanteurs sur le vivre-ensemble dans un Etat dont la gouvernance semble encore loin d’être inclusive.