Source : Météo Sahel Juin 2025
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En juin 2025, la Mauritanie a consolidé sa coopération militaire avec plusieurs partenaires clés, renforcé le contrôle de ses frontières face aux menaces armées, et signé deux accords migratoires avec le Sénégal. Sur le plan diplomatique, l’installation d’une ambassade ukrainienne à Nouakchott illustre de nouvelles dynamiques d’influence dans un contexte de rivalité avec Moscou. Économiquement, Nouakchott poursuit une stratégie d’attractivité extérieure, marquée par son adhésion à l’AIIB (Banque asiatique d'investissement pour les infrastructures), un nouveau soutien budgétaire de la Banque mondiale, et la mise à jour de ses accords de pêche avec l’UE et le Maroc. Cette politique vise à projeter l’image d’un État stable et ouvert aux partenariats, dans une région marquée par l’instabilité.
Intensification de la coopération militaire régionale et internationale
En matière de sécurité, la Mauritanie a intensifié en juin 2025 sa coopération militaire avec plusieurs partenaires internationaux. Le 24 juin, Nouakchott a accueilli la quatrième réunion du comité militaire mixte mauritano-français, au cours de laquelle les deux parties ont convenu d’élargir leur coopération jusqu’en 2027, incluant la formation, la logistique et les capacités navales et aériennes. Ce prolongement d’accord souligne la confiance mutuelle et la volonté de Paris de maintenir un point d’appui stable dans une zone stratégique en Afrique de l’Ouest. Dans le cadre de l’Activité de Sécurité Coopérative (ASC) Mauritanie, des instructeurs espagnols de la 19ᵉ brigade d’opérations spéciales ont encadré une formation pratique pour les commandos parachutistes à Nouakchott. Les 3 et 4 juin 2025, une délégation militaire marocaine a été reçue dans la capitale mauritanienne pour renforcer la coopération sécuritaire et le partage de renseignement dans le cadre de la commission militaire mixte mauritano-marocaine. La multiplication de ces partenariats montre que la Mauritanie se positionne comme un acteur central du dispositif sécuritaire sahélien.
Menaces sécuritaires et coopération transfrontalière
Sur le terrain, l’armée mauritanienne a renforcé le contrôle de ses frontières avec plusieurs opérations dans les zones sensibles. Le 3 juin, un drone mauritanien a permis d’intercepter un convoi du Polisario dans la zone de Lebriga, fermée depuis le 21 mai. Le 11 juin 2025, un stock d’environ cinquante missiles Grad dissimulés par le Polisario a été saisi par l’arméemauritanienne dans la région. Ces actions s’inscrivent dans une série de mesures prises pour sécuriser les zones frontalières. Elles reflètent aussi une volonté d’anticipation stratégique, alors que la pression sécuritaire augmente aux confins sahariens.
Dans ce même esprit de vigilance régionale, deux nouveaux accords ont été signés entre la Mauritanie et le Sénégal pour encadrer les flux migratoires. Le premier vise à faciliter l’obtention de cartes de séjour pour les Sénégalais résidant en Mauritanie et garantir la libre circulation des étudiants et de la main-d’œuvre qualifiée. Le second porte sur la lutte contre la migration irrégulière et la traite humaine, alors que la Mauritanie reste un point de transit vers l’Europe. Le 20 juin, vingt migrants en situation irrégulière ont été arrêtés alors qu’ils tentaient de rejoindre l’Espagne. Ces accords traduisent une approche pragmatique visant à concilier impératifs sécuritaires et mobilité régionale.
Tensions politiques et rivalités d’influence
L’un des avocats de l’ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz a saisi le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, dénonçant un traitement inhumain infligé à son client, notamment l'isolement, l'absence de soins médicaux après une opération cardiaque et l’interdiction de visites. Cette démarche intervient alors qu’en mai 2025, la Cour d’appel de Nouakchott a condamné l’ancien président à quinze ans de prison pour corruption. Cette affaire, très médiatisée, polarise la scène politique intérieure et ravive les tensions entre anciens réseaux du pouvoir et le régime actuel.
Sur le plan diplomatique, l’Ukraine renforce sa présence en Afrique de l’Ouest avec l’ouverture d’une ambassade à Nouakchott, la livraison d’aide alimentaire au camp de Mbera et une proposition de coopération militaire. Cette démarche, fondée sur le partenariat, vise à établir des liens durables avec la Mauritanie dans un contexte régional marqué par une forte implication russe, notamment au Mali voisin. Elle s’inscrit dans la nouvelle stratégie africaine de Kyiv, adoptée en 2024, qui vise à contrer l’influence croissante de Moscou sur le continent.
Finalement, dans une optique plus centrée sur la géopolitique économique, la Mauritanie a signé à Pékin son adhésion à la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures (AIIB), devenant son 103e membre. La Banque mondiale a annoncé ce mois-ci un appui de 50 millions de dollars pour renforcer l’efficacité des dépenses publiques et moderniser les services sociaux. Dans le secteur de la pêche, vital pour l’économie nationale, Nouakchott a consolidé ses accords avec l’Union européenne et le Maroc, incluant des engagements sur la gestion durable des stocks, la traçabilité et la coopération scientifique. À Vienne, lors du Forum de l’OPEP pour le développement international, le président Ghazouani a appelé les bailleurs de fonds à investir en Mauritanie, notamment dans les énergies renouvelables, les ressources marines, l’agriculture durable et la numérisation. Ces démarches économiques traduisent une volonté de diversification des partenaires, en réponse à la dépendance historique envers les bailleurs occidentaux.