Tchad : Retrait accéléré des troupes françaises, faible affluence électorale Spécial

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Source : Météo Sahel Décembre 2024

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Les effets de la rupture des accords de défense entre le Tchad et la France n’ont pas tardé à se matérialiser dans les faits. Quelques jours après cette annonce en fracas, l’armée française a entamé le retrait de ses troupes. Dans un communiqué rendu public le 10 décembre 2024, l’état-major tchadien a affirmé qu’« une partie de avions de chasse » - deux des trois Mirage 2000 - français ont quitté la base aérienne d’Adji Kossei, sise dans la capitale N’Djaména. Le 19 décembre, Paris a reçu une demande de départ des forces françaises, avant le 31 janvier 2025. « La négociation est toujours en cours », assure-t-on du côté des militaires français selon des informations de RFI. Ce délai relativement restreint, posé par le Tchad, est perçu comme un simple « coup de pression de la frange dure du premier cercle du pouvoir tchadien », estime la même source.

Les médias dénoncent la « censure »

D’un autre côté, le clash entre l'Association des médias en ligne du Tchad (Amet) et la Haute autorité de l'audiovisuel (Hama) a fait quelques émules. Suite à une décision de la Hama d’interdire aux sites d'information de produire des contenus audiovisuels, l’Amet a vivement protesté, décrétant aussitôt une grève illimitée. La Convention tchadienne de défense des droits de l'homme (CTDH) est allée dans le sens de l’Amet, dénonçant « une censure injustifiée » et « exige[ant] l'abrogation de mesures restrictives » qui « portent atteinte à la liberté d'expression ». Une réunion entre les deux parties, le 12 décembre, a été pour le moins totalement infructueuse. Pestant contre « une convocation discourtoise », l’Amet a jugé la Hama responsable d’un « trou noir informationnel » en pleine campagne électorale. Du côté de la Hama, l’on dénonce un comportement de certains médias allant à l’encontre des règles journalistiques et étant potentiellement nuisibles en période électorale. Finalement, la Cour Suprême a tranché la polémique, en ordonnant la suspension de la décision de la Hama. « Tout journal en ligne peut être publié sans autorisation préalable et sans dépôt de cautionnement après la déclaration prescrite par la loi », a notifié la Cour, dans une ordonnance, le 20 décembre.

Faible participation électorale

C’est dans cette ambiance particulièrement tendue qu’environ huit millions d’électeurs se sont déplacés dimanche 29 décembre pour les élections générales (législatives, provinciales et locales). Ce scrutin boycotté par l’opposition a observé un taux de participation autour de 52% (36,22% à N'Djamena), selon les estimations de l’Agence nationale de gestion des élections (ANGE). Avant même la fin du dépouillement, des entités de l’opposition ont dénoncé des « fraudes ». C’est le cas d’Abdelaziz Koulamallah, candidat au poste de député pour le Parti fédéral pour la justice et le développement (PFJD), qui dans une vidéo, a déclaré que « les militaires sont venus voter (samedi 28) sans carte d'électeur ou carte d'identité nationale. Le même pouvait voter vingt-cinq ou cinquante fois. » De plus, des observateurs locaux ont émis des réserves sur la transparence du scrutin. Pendant ce temps, à en croire le président de l’ANGE, Ahmat Batcherit, le scrutin fut une « réussite ». « Il y a une pression des partis politiques, ça existe, vous ne pouvez pas dire qu'il n'y a pas eu de pression du tout. Ce sont des petits incidents (…) qui sont circonscrits sur place », a-t-il tempéré. Les résultats de ces élections générales sont prévus en principe, au plus tard le 25 janvier 2025.

D’un autre côté, les remous socio-politiques en cours dans le pays n’ont pas empêché le Conseil National de la Transition,d’élever le président Mahamat Idriss Déby au rang de maréchal. Lors d’une cérémonie organisée à la présidence, le chef de l’Etat tchadien a ainsi pu revêtir à la suite de son feu père, l’uniforme bleu et or de la plus haute distinction du pays. Ainsi, il est peu probable que la situation sécuritaire ait connu une significative amélioration, en dépit d’une relative accalmie. En début de mois, au moins 27 personnes perdaient la vie au sud dans la localité de Maro, lors de violents affrontements entre des pasteurs et des hommes armés venus de la République centrafricaine (RCA). Selon le commandant de la gendarmerie de la zone, un groupe armé, venu de la RCA, a attaqué des pasteurs et des gendarmes locaux. Parallèlement, un nouvel affrontement sanglant entre éleveurs et agriculteurs a fait au moins 11 morts, dans la province du Logone Oriental du département Nya Pendé.