Dakar 13 déc – Le directeur du Timbuktu Institute, Bakary Sambe, a prévenu vendredi contre les risques d’une approche purement militaire dans la lutte contre l’extrémisme violent, qui nécessite d’abord une ‘’stratégie nationale de prévention’’.
‘’Il ne faut jamais entrer dans un cycle d’intervention militaire sans régler au préalable la question d’une stratégie nationale de prévention de l’extrémisme violent, qui permet de faire adhérer les populations aux politiques publiques’’, a déclaré M. Sambe.
Il intervenait à un atelier de restitution de l’étude ‘’Facteurs de radicalisation et perception du terrorisme chez les jeunes des zones frontalières du Sénégal et de la Guinée’’, menée par le Timbuktu Institute, un centre africain de recherches et d’études sur la paix.
Bakary Sambe avertit que ‘’ce serait une grosse erreur de la part des pouvoirs publics de plonger le Sénégal dans une approche purement militaire et sécuritaire (…) sans le préalable d’une stratégie nationale de prévention de l’extrémisme violent‘’.
Si les populations n’adhèrent pas à cette stratégie par le biais de la sensibilisation ou de séances d’explication, affirme-t-il, ‘’les autorités risquent d’avoir les mêmes problèmes que les pays de la région où les gouvernants sont contestés dans leur politique sécuritaire’’.
M. Sambe rappelle que la Guinée dispose d’une stratégie nationale de prévention, mais le Sénégal n’en a pas encore élaboré.
‘’Il faut que le Sénégal accepte de développer une stratégie nationale de prévention de l’extrémisme violent. Il y a des stratégies de sécurité nationale, mais c’est différent de la stratégie de prévention, qui est une stratégie holistique basée sur la sensibilisation, avec l’implication du monde religieux, du système éducatif et de la société civile’’, a-t-il précisé.
Le Sénégal et la Guinée, souligne Bakary Sambe, ont la particularité d’appartenir à la typologie 3 définie par l’étude. Celle-ci concerne les pays qui ‘’peuvent encore développer des stratégies nationales de prévention de l’extrémisme violent’’, selon le directeur du Timbuktu Institute.
S’ils sont ‘’encore un peu éloignés de l’épicentre et des ventres mous où se déploie ce terrorisme’’, ils ‘’doivent prendre leur garde’’ toutefois, en raison de leur situation de pays côtiers.
‘’Les pays qui peuvent développer des approches préventives et prospectives ne le font généralement pas, de peur d’être classés comme zones menacées ou incertaines, ce qui aurait des impacts sur les investissements ou encore le tourisme’’, a analysé Bakary Sambe.
Il relève une confusion que beaucoup d’Etats font entre une stratégie de prévention de l’extrémisme et une stratégie de lutte contre le terrorisme.
‘’La lutte contre le terrorisme s’attaque à l’élimination des cibles, mais ce n’est ni efficace ni durable‘’, a-t-il expliqué.
L’étude comparative a été menée dans les régions de Labé (Guinée) et Vélingara (Sénégal) pour mieux appréhender les facteurs de vulnérabilité des jeunes (18-35 ans) dans les zones frontalières sénégalo-guinéennes et récolter des informations générales et spécifiques autour de la radicalisation et de l’extrémisme violent.
Les principaux facteurs de radicalisation relevés grâce à cette étude sont le chômage, la pauvreté et l’exclusion sociale des jeunes