L’implication croissante des femmes dans la criminalité transnationale est une tendance préoccupante (Timbuktu Institute ) Spécial

Un atelier régional sur la criminalité transnationale organisée, axé sur l'impact du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme dans l'espace CEDEAO, s'est tenu du 12 au 14 décembre à Lomé, Togo. L'événement était conjointement organisé par le Groupe Intergouvernemental d'Action contre le Blanchiment d'Argent en Afrique de l'Ouest (GIABA) et le Centre de la CEDEAO pour le Développement du Genre (CCDG).

Dans ce contexte, le GIABA avait sollicité la participation d’un expert du Timbuktu Institute for Peace Studies, en qualité de personne ressource.  A cet effet,  M. Babacar Ndiaye, Senior Fellow -ancien expert/sécurité humaine et prévention de la criminalité transnationale organisée, à l’ONUDC,  a activement pris part à cet important atelier régional.

Celui-ci s’est tenu à la suite d’ une réunion d’experts, sur la même thématique, organisée -- du 23-24 Novembre 2023 à Abidjan--   par l’Office des Nations Contre la Drogue et le Crime, (ONUDC) afin de contextualiser, à l’échelle de l’Afrique de l’Ouest et du Centre, son nouveau manuel de référence sur l’intégration du genre dans la mise en œuvre de la Convention des Nations unies contre la criminalité transitionnelle organisée (CTO). La participation active de M Ndiaye à cet atelier a également été déterminante.

Objectif: La table ronde régionale des femmes visait à les sensibiliser aux dimensions genrées du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme, et de parvenir à un consensus sur l'intégration des questions de genre dans la lutte contre la criminalité économique et financière transnationale organisée dans l'espace CEDEAO.

Participant (e )s et Intervenant (e)s : L'atelier a réuni 38 participant (e) s, dont des délégués des ministères sectoriels compétents des 15 États membres de la CEDEAO, des représentant (e )s des ministères chargés des questions de Genre/Jeunesse, d’ organisations de la société civile, d’  institutions/agences de la CEDEAO et de partenaires techniques et financiers.

En sa qualité de personne ressource, M. Babacar Ndiaye a modéré une session et fait une communication unanimement saluée par sa pertinence et sa richesse en données et en termes d’analyse, sur le thème de la session suivante : 

Session 2 : La Criminalité Transnationale Organisée, son Impact en Afrique de l'Ouest et l'Implication des Femmes : Cette session a examiné les différents crimes transnationaux organisés en Afrique de l'Ouest et le rôle clé des femmes dans l'arrêt de l'évolution du crime organisé, tout en discutant des causes profondes de leur implication.

Dans sa présentation, M. Ndiaye a, de prime abord, précisé le cadre juridique international régissant la lutte contre la criminalité transnationale organisée (CTO) et mis en lumière de manière exhaustive, les facteurs incitatifs et attractifs et les vulnérabilités de l’Afrique de l’Ouest face aux menaces que représentent la criminalité transnationale organisée dans sa dimension protéiforme. En outre, il a mis en exergue l’impact

néfaste de ce phénomène, qui viole la souveraineté des Etats, sape les fondements de l’état de droit,  met en péril la sécurité des femmes et des enfants, ainsi que la stabilité et l’économie des Etats, y compris en favorisant la corruption et le blanchiment des capitaux.

Il a enfin fait l’état des lieux sur les types de criminalité transnationale organisée à plus fort impact sur les femmes, en Afrique de l’Ouest, en tant que victimes et actrices, ou sur la stabilité politique ou économique des Etats notamment :

1.     « Traite des êtres humains : Un crime contre les femmes et par des femmes »

2.     « Le trafic de migrants : une définition contestée dans le Sahel, ‘activité criminelle’ ou ‘économique de survie’ ?

3.     « Trafic d’or : un minerai fortement convoité par de nombreux acteurs étatiques et non étatiques, y compris des groupes armés et criminels. »

4.     « Trafic de cocaïne : une menace contre la stabilité politique des Etats, en ‘migration’ des Etats côtiers vers le Sahel ? »

Statistiques présentées par M. Ndiaye mettent en évidence le rôle croissant des femmes dans la criminalité à l’échelle mondiale et sous régionale (narcotrafic et traites des êtres humains) 

·      Echelle globale : Sur 714 000 femmes en prison, 35 % le sont pour des infractions liées aux drogues.(  Rapport mondial, UNODC). 

 

  • Echelle globale : Sur 8,6 millions d'hommes en prison, 18 % le sont pour des infractions liées aux drogues.
  • Echelle globale : Traite des personnes :  65 % des suspects poursuivis étaient des hommes contre 35 % de femmes (Etudes UNODC, 2016)
  • Au Nigeria, en 2015, le nombre de femmes arrêtées pour traite était supérieur à celui des hommes ! (NAPTIP)

 

Conclusions et Recommandations :

Les conclusions de l'atelier ont mis en lumière l'importance de l'intégration de la dimension genre dans les politiques de lutte contre la criminalité transnationale organisée.

1. Les participant (e)s ont convenu que les Etats Membres doivent s'attaquer aux causes profondes de la criminalité transnationale en mettant en œuvre de manière efficace les régimes de LBC/FT afin d'améliorer le bien-être social et économique de leurs citoyens.

2. Les participant (e)s ont convenu que toutes les personnes impliquées dans le trafic de migrants, l'exploitation sexuelle et la traite des êtres humains ne sont pas des victimes, et que certaines sont des auteures de ces infractions. Il est donc nécessaire que les pays prennent des mesures sociales, économiques et de développement pour réduire les vulnérabilités qui comptent parmi les facteurs incitatifs à la participation à des activités criminelles.

3. Les participant (e )s ont convenu que la participation des femmes à la criminalité transnationale organisée est en augmentation et que des études, des recherches et des typologies supplémentaires sont nécessaires pour comprendre les causes profondes du phénomène afin d'améliorer l'efficacité de la lutte contre ce phénomène néfaste.