Bénin : Dégel entre Cotonou et Niamey, pression sécuritaire au nord Spécial

Source : Météo Sahel Juillet & Août 2024

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Les relations diplomatiques entre le Bénin et le Niger sont sur la voie d’un manifeste dégel. Tout d’abord, la médiation des anciens présidents béninois, Nicéphore Soglo et Yayi Boni, fut de bon augure. De retour à Cotonou, ils ont été également reçus par le chef de l’Etat béninois, Patrice Talon. Il est ressorti de cette rencontre, une volonté d’établir « des diligences à mener pour un rétablissement rapide du dialogue souhaité par toutes les parties ».

Par la suite, le chef de la transition nigérienne Abdourahamane Tiani a dépêché une délégation pour rencontrer le président béninois. Les autorités nigériennes proposent d’ailleurs la mise sur pied d’une commission tripartite, pour se pencher sur le règlement de la crise. Autre signe de décrispation : nommé depuis juin 2023, le nouvel ambassadeur béninois près du Niger, a enfin pu déposer ses lettres de créance. De plus, à en croire certaines sources, le chargement du pétrole brut nigérien depuis l’oléoduc de Sèmé Kpodji, pourrait bien reprendre. Toutefois, la frontière entre les deux pays reste toujours officiellement fermée même si le Bénin et le Nigéria ont entre temps ouvert une voie de contournement, pour faciliter la circulation des marchandises.

Au nord du pays, la menace djihadiste continue de se dessiner de plus en plus clairement. Dans la nuit du 24 au 25 juillet, une attaque terroriste dans le parc national W, a causé la mort d’au moins cinq rangers et sept soldats, selon l’ONG African Parks. Cette organisation sud-africaine, spécialisée dans la gestion des parcs en Afrique, s’occupe depuis 2017 de ceux du Bénin. Pour rappel, en janvier 2024, le gouvernement béninois faisait état d’un bilan de 43 civils et 27 militaires tués, dans les attaques djihadistes.

Par ailleurs, l’actualité béninoise a été rythmée par une affaire pour le moins rocambolesque : « l’affaire Frère Hounvi ». De son vrai nom Steve Amoussou, « Frère Hounvi » - qui était depuis en exil au Togo – est particulièrement connu pour ses critiques mordantes envers la gouvernance du président Talon. En effet, au soir du lundi 12 août, le cyberactiviste a été « enlevé » à Lomé par des individus encagoulés, embarqué, puis détenu à la brigade économique et financière de Cotonou. L’opinion publique nationale alertée, l’opposition béninoise n’a pas manqué dans la foulée d’appeler à la mobilisation pour la libération de « Frère Hounvi ». De même, la société civile togolaise a également manifesté son indignation contre cette arrestation, jugée « grave violation des règles qui régissent les conditions d'interpellation. » Finalement apparu, le 20 août à la barre de la Criet (Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme), « Frère Hounvi » est poursuivi pour « provocation directe à la rébellion, initiation et publication de fausses nouvelles sur les réseaux sociaux et harcèlement par voie électronique. » Il sera jugé le 7 octobre prochain. 

Au lendemain de la fête d’indépendance, le président a gracié 27 militants de l’opposition interpellés et jugés après les violences électorales de 2019 et 2021. Cependant, il n’y a toujours pas de libération en vue pour les deux grandes figures de l’opposition : Reckya Madougou et Joël Aïvo. Dans le même temps, la publication d’un rapport d’Amnesty International a remis en lumière les pénibles conditions carcérales dans le pays. Selon le directeur exécutif de l’ONG : « Onze prisons ont un effectif qui varie entre trois fois et même parfois six fois leur capacité d’accueil. Il y a un manque d’eau, le droit à la santé n’est pas respecté. Plusieurs personnes, en détention, ont fait entre 5 ans et 20 ans de prison sans être jugées. »