Côte d’Ivoire : Climat politique tendu et défis sécuritaires persistants au Nord Spécial

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Source : Météo Sahel Novembre 2024

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En Côte d’ivoire, l’aura de Guillaume Soro semble fortement diminuée ces dernières années alors qu’il avait beaucoup marqué la vie politique du pays au début des années 2010. L’ancien président de l'Assemblée nationale fait profil bas depuis son exil pour inculpation d'“atteinte à la sûreté de l’Etat” en 2019. Le leader du mouvement Générations et Peuples Solidaires (GPS) est de plus en plus affaibli politiquement du fait des départs massifs des rangs de ses lieutenants vers le pouvoir actuel. Peut-il rebondir et redorer son blason et ainsi redonner à son image, sur la scène politique, son lustre d’antan ? En tout cas, il a encore du chemin à faire pour se positionner dans cet échiquier politique assez mouvementé.

Charles Blé Goudé, de son côté, a également fait parler de lui en Côte d’Ivoire en cette période controversée de pré-campagne en vue de la prochaine présidentielle. Il s’est prononcé sur sa candidature pour les élections présidentielles à venir lors d’un entretien sur France 2024. “Je n'ai jamais caché mon ambition de diriger la Côte d'Ivoire” dixit l’ancien ministre de la jeunesse sous Gbagbo. Il a aussi profité de l’occasion pour demander à l’actuel président de créer les conditions pour que ceux qui le souhaitent puissent participer afin de décrisper le climat politique tendu depuis quelques mois. Il fait ainsi allusion à son ancien patron Laurent Gbagbo dont la candidature demeure incertaine. Pour rappel, ils sont tous acquittés par cette organisation judiciaire internationale, mais l’épée de Damoclès plane toujours sur sa tête avec la condamnation à 20 ans pour laquelle il demande une amnistie.

Dans ce climat politique, des acteurs politiques continuent de réclamer un dialogue politique franc en prélude des prochaines joutes électorales. Rappelons que la cinquième phase s’était tenue après les évènements de 2020 et avait réuni le Gouvernement, les acteurs politiques et la société civile pour discuter autour du renforcement de la paix et de la cohésion sociale. L’une des principales recommandations était l’engagement des acteurs de ne plus recourir à la violence dans le processus d’accession à la magistrature suprême. Le 1er novembre dernier, en conférence de presse, l’Union Démocratique et Citoyenne a appelé renouer ce fil du dialogue à travers une sixième phase pour pouvoir “faire le point de la mise en œuvre des recommandations de la phase précédente” et “entrevoir de nouvelles recommandations” pour les prochaines élections.

Les membres de cette organisation ont profité de cette occasion pour ouvrir le débat autour de la réforme de la Commission Électorale Indépendante et la révision des listes électorales afin de prévenir les conflits politiques. Au même moment, la candidature d’Alassane Ouattara continue de semer la polémique au sein de la classe politique et de l’opinion. Réunis au sein de la formation dénommée “Les Acteurs de la Nouvelle Côte d’Ivoire”, des membres de l‘opposition, ont tenu à exiger le retrait de sa candidature en vue des prochaines joutes. Selon eux, ADO devrait éviter que le pire ne se reproduise au pays en prenant sa retraite.

Tensions politiques …

Va-t-on vers l'arrestation du leader de l’opposition Tidjane Thiam comme le murmurent certains ? En tout cas, des rumeurs fusent de partout dans la capitale faisant état de l’arrestation pour trouble à l’ordre public de l’homme d’affaires. Pour cause, le candidat à la prochaine présidentielle a entrepris depuis plusieurs semaines des visites de proximité pour sensibiliser les populations à s'inscrire sur les listes électorales et massifier son électorat. Il continue toujours de grossir ses rangs au sein du parti et force est de constater que son “rival’ Billon est de plus en plus isolé. Le 6 novembre dernier, l’homme d’affaires Maurice Guikahué a rencontré Tidjane Thiam pour discuter des questions ayant trait au parti en vue de la présidentielle à venir. Depuis un certain temps, l’ancien ministre du commerce ne rate pas l’occasion pour clouer au pilori les positions du parti. Malgré l’adhésion de la majorité à son challenger Thiam, il maintient toujours sa candidature qu’il avait déclarée le 25 octobre dernier et qu’il juge opportune. Jean-Louis Billon est convoqué en conseil de discipline du PDCI pour “atteinte à l’unité et aux intérêts du parti” et “ insoumission aux décisions du parti”. Il doit comparaître le 3 décembre au siège du parti pour s’expliquer devant ses pairs à propos des accusations portées sur lui.

Pendant ce temps, la question de l’inscription de Laurent Gbagbo sur les listes électorales continue toujours d’alimenter l’actualité politique en Côte d’Ivoire. Pour appuyer leur leader, les jeunes du Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (Ppa-CI) ont annoncé une tournée de mobilisation pour réclamer sa réinscription sur les listes. Ces jeunes ont décidé le combat républicain aux côtés de tous leurs camarades en “utilisant les moyens légaux et démocratiques”.

Gbagbo et la France reconnectés….

Un fait a particulièrement attiré l’attention au courant de ce mois : l’ex-chef d’État semble avoir renoué le fil du dialogue avec la France, fil qui était officiellement coupé depuis les évènements de 2010. Le 10 novembre, il a été reçu par l’ambassadeur Jean-Christophe Belliard pendant deux tours d’horloge autour du pays et de la présidentielle à venir, du Sahel et de la perception sur la France, d’après des sources proches de l’ambassade. L’ancienne colonie a entrepris des discussions avec les acteurs majeurs de la vie de la nation.  Laurent Gbagbo a promis aux ivoiriens de mettre sur pied une commission vérité et justice comme l’avait fait Nelson Mandela après la douloureuse période de l’aparthied. Une fois élu, il souhaite faire dialoguer les ivoiriens pour consolider la paix et la concorde nationale. Des membres de son parti se sont rendus au siège de la Commission électorale indépendante (CEI) pour un plaidoyer en faveur de sa réinsertion sur les listes.

Hantise du terrorisme au Nord

Au plan sécuritaire, une opération des forces de défense et de sécurité dans la nuit du 9 au 10 novembre a attiré l’attention de l’opinion. En effet, un important arsenal de guerre a été saisi vers Diawala dans la zone frontalière avec le Burkina Faso. Cet évènement a inquiété beaucoup d’observateurs au moment où les rapports entre les deux pays ne sont pas au beau fixe en plus d’une situation sécuritaire du Burkina qui se dégrade de jour en jour. Soulignons que dans le passé, la Côte d’Ivoire a subi des attaques terroristes notamment celle de Grand Bassam revendiquée par le groupe Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). La menace reste toujours persistante au regard des attaques terroristes chez les voisins immédiats. Pendant ce temps, six membres présumés du groupe État islamique auraient été arrêtés à Abidjan dont des Syriens et des Irakiens. D’après des sources, ces individus auraient des connexions avec des complices basés à Antananarivo pour commettre des exactions au Sahel et en Europe. Les deux pays ont réussi à démanteler ce réseau djihadiste qui entrevoyait de commettre un attentat pendant les JO de Paris. A noter que les FDS ont été assistées par les renseignements des USA et de la France.