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Source : Météo Sahel Novembre 2024
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Entre Cotonou et Niamey, le dégel diplomatique est officiellement acté. En effet, le général Abdourahamane Tiani, président du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) au Niger, a nommé Chaïbou Kadadé, Ambassadeur du pays auprès du Bénin. Une nomination qui scelle plus d’une année de tensions politiques et économiques entre les deux pays suite au putsch à la suite du coup d'État de juillet 2023 qui a renversé Mohamed Bazoum. D’ailleurs, selon des informations d’Africa Intelligence, les ministres béninois et nigérien du pétrole Samou Sedou Adambi et Sahabi Oumarou, devraient se rendre d’ici la fin d’année à Cotonou pour officialiser leur accord à propos du transport du brut par l’oléoduc entre Agadem (Niger) et le port de Sèmè-Kpodji (Bénin). Pour rappel, la brouille entre les deux pays avait poussé le Président béninois Talon, à bloquer le passage du pétrole pendant plusieurs semaines entre avril et mai. La Chine, constructrice du pipeline par sa firme China National Petroleum Corp (CNPC) avait dès lors joué le rôle de médiateur dans cette crise.
En interne, l’actualité a été particulièrement marquée par l’arrestation, le 13 novembre, du général Philippe Houndégnon, ancien directeur général de la police. Patron de la police nationale sous l’ancien chef d’État Boni Yayi, prédécesseur de Patrice Talon. La Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet) l’accuse « d’incitation à la rébellion et harcèlement par le biais de moyen électronique ». Actuellement sous mandat de dépôt, sa comparution est prévue pour le 16 décembre. Pour ce que l’on sait, Philippe Houndégnon critiquait régulièrement depuis plusieurs mois, la gouvernance démocratique de Talon dans les médias et sur les réseaux sociaux. Dans la foulée, Damien Kotchikpa Houndégnon, frère de l'intéressé, a également fait l’objet d’une arrestation, suite à un poste publié le lendemain de la mise aux arrêts de son grand frère. « Philippe Houndégnon ayant été mis arbitrairement à la retraite depuis février 2024, il a le droit, comme tout autre citoyen, d’opiner sur des questions politiques et d’apporter son expertise et son expérience à la bonne édification de notre pays le Bénin », s’exprimait-il.
Parallèlement, nouvel épisode dans l’affaire « Frère Hounvi », pseudonyme de l’activiste politique Steve Amoussou, connu pour ses critiques contre la gouvernance de Talon. Présent le 18 novembre à la barre de la Criet, il a fustigé la « violence brute et bête » de son arrestation. « On ne peut pas hériter de ma personne, sans hériter des conditions de mon arrestation. Je ne souhaite à personne ce que j’ai vécu (…) À qui profite le crime de mon enlèvement ? », a-t-il lancé. Selon Barnabé Gbago, avocat de la défense, « prendre criminellement quelqu’un dans un autre pays et venir le juger, c’est un recel. » Le procès a finalement été renvoyé au 9 décembre 2024. À titre d'information contextuelle, « Frère Hounvi » avait été enlevé en août dernier par des ravisseurs au Togo, ramené au Bénin, livré à la police puis inculpé pour « harcèlement par voie électronique, publications de fausses nouvelles ». En outre, dix jours plus tard, c’étaient Olivier Boko et Oswald Homéky qui comparaissaient de nouveau devant le juge d’instruction de la chambre des appels de la Criet. L’ex bras droit de Talon et l’ancien ministre des sports sont poursuivis pour « atteinte à la sûreté de l'Etat, complot d'atteinte à la sûreté de l'Etat, blanchiment de capitaux et corruption d'agent public ».
Au terme d’une mission de dix jours, le rapporteur spécial des Nations unies sur la promotion et la protection des droits de l’homme dans la lutte antiterroriste, Ben Saul, a dressé un état des lieux en demi-teinte. « Il faut plus de transparence », a recommandé l’avocat australien à propos de statistiques sur les attaques terroristes. De même, il a mis l’accent sur la surpopulation carcérale à la prison de Missérété, où croupissent de nombreux terroristes présumés. « Ils sont au nombre de 652 présumés terroristes détenus, dont 10 condamnés », a-t-il rapporté au sujet de cette maison d’arrêt qui compte 3 000 détenus pour 1 000 places. Dans la même veine, un rapport du groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire, daté d'août 2024 et rendu public en décembre, a estimé que la détention du constitutionnaliste Joël Aïvo est arbitraire, recommandant sa libération immédiate. Le professeur de droit avait été condamné en 2021 à dix ans de prison pour « blanchiment de capitaux » et « atteinte à la sûreté de l’Etat » à la suite de son arrestation, quatre jours avec l’élection de Talon pour un second mandat.
Enfin, dans le cadre des élections générales de 2026, le cadre de concertation de l’opposition a rencontré le 18 novembre, le ministre de la justice sur l’audit du fichier électoral. Créée le 10 novembre, cette coalition affiche l’objectif de réparer une « démocratie abîmée » et s’assurer que ces élections se déroulent dans la transparence.