Cameroun : Vers un rétrécissement progressif de l’espace civique ? Spécial

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 Source : Météo Sahel Novembre 2024

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Les images choquantes montrant le sous-préfet d’Idabato, Roland Ewane ligoté et victime de sévices ont ravivé le débat sur la torture dans le pays. Enlevé début octobre, ce n’est qu’un mois plus tard que ces images ont été rendues publiques.Le Réseau des défenseurs humains en Afrique centrale (Radhec) a dénoncé des « actes de torture, les traitements inhumains, dégradants sur un sous-préfet (…) représentant du chef de l’Etat dans cette région-là. » Pour rappel, la région anglophone qui abrite la commune Idabato est depuis 2016, en proie à des violences armées entre l’armée camerounaise et des séparatistes. Par ailleurs, selon un rapport d’un consortium d’organisations de la société civile, de l’ONG Mandela Carter et « Nouveaux droits de l’homme », le gouvernement pratique un « négationnisme » à propos de la torture dans le pays. « Les gens sont torturés au quotidien. Les tortionnaires qui sont à l’origine, y compris de la mort de leurs victimes, sont souvent promus. Cela fait donc partie des indicateurs qui montrent que l’État, dans sa structure gouvernante, valide la torture, peut-être comme un instrument de gouvernance », a déclaré Hilaire Kamga, un des rédacteurs du rapport présenté devant le comité de l’ONU.

La situation sécuritaire n’est toujours pas des plus reluisantes. Dans l’extrême nord du pays, plusieurs femmes et enfants se sont noyés dans la nuit du 23 au 24 novembre, après que leur pirogue ait chaviré alors qu'ils fuyaient une attaque de Boko Haram. En effet, selon l'officier divisionnaire de Blangoua - unité administrative de la région - des centaines d’éléments de Boko Haram ont pris d'assaut le village de Koutoula puis tiré des coups de feu au hasard, pillé des magasins et tué plusieurs personnes, dont le chef du village.

Sur le plan de la politique interne, l’opposant Jean-Michel Nintcheu a vu son domicile encerclé par « des gendarmes et des policiers de l’unité anti-terroriste », alors qu’il devait y tenir une réunion du comité directeur national de son parti, le Front pour le changement du Cameroun (FCC). « On a l'impression que le gouvernement de la République, du moins de certains acteurs dans le sérail, sont devenus fébriles au fur et à mesure que le grand soir s'approche. (…) Le “grand soir”, c'est quoi ? C'est l'après-Biya », a déclaré au micro de RFI Jean-Robert Wafo, secrétaire national à la communication du parti.

Par ailleurs, l’agression de l’avocat Richard Tamfu a provoqué une vague d’indignation dans la corporation. En effet, l’avocat s’est opposé à l’interpellation de son client, destinataire d’une convocation sans mandat d’arrêt de la gendarmerie de Bonanjo à Douala. En pleine, Richard Tamfu a donc été molesté et porté à l’arrière d’un pick-up. « Ils m'ont alors fait monter à l'arrière de leur camionnette et ont commencé à me battre (…) Ils m'ont donné des coups de pied, ont fortement appuyé leurs mains sur mon cou et m'ont sauté dessus avec leurs bottes », a-t-il déploré. L’ONG Mandela Carter a regretté « un énième usage excessif de la force. » Parallèlement, un chauffeur camerounais a perdu la vie sur la route principale reliant Bangui (Centrafrique) à Douala. Selon le ministère de la Défense centrafricain, il s’agit d’« actes de violences perpétrés contre un des véhicules des alliés ». Les camionneurs sont par la suite entrés en grève, réclament une enquête sur la mort de leur collègue, victime selon eux d’un « assassinat » perpétré par les paramilitaires russes présents en Centrafrique.