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La Déclaration de politique générale tant attendue du Premier Ministre, Ousmane Sonko a finalement eu lieu. Vendredi 27 décembre, le président du Pastef, a pendant environ trois heures d’horloge, esquissé les bases d’un vaste programme de réformes économiques pour redresser la situation socio-économique du pays. « Il est impératif d’opérer une rupture d’une profondeur et d'une portée jamais vue dans notre pays, jamais vu depuis notre accession à l’indépendance », a-t-il déclaré. Dénonçant l’enfermement du Sénégal « dans le modèle économique colonial », Ousmane Sonko a annoncé une importante réforme fiscale, en « élargissant l'assiette fiscale, tout en abaissant graduellement les taux d'imposition moyen». Ceci pour « faire payer moins à tous les Sénégalais mais faire payer à tous les Sénégalais » dans le but de « parvenir à une fiscalité efficace et équitable ». Le Premier Ministre a promis que le Sénégal allait « se retirer de toutes les conventions bilatérales impliquant un paradis fiscal et renégocier les clauses défavorables des conventions conclues avec des États à fiscalité normale, lorsque ces conventions nous sont défavorables. » De plus, il a annoncé l'application du «principe de réciprocité pour la délivrance de visas aux ressortissants de certains pays qui l'exigent à nos ressortissants ». Enfin, il évoque un projet d’abrogation de la loi d'amnistie – porté par l'ex-président Macky Sall – qui couvre les violents événements qui avaient fait des dizaines de morts entre 2021 et 2024.
Souverainisme de la théorie à la pratique ?
« J'ai instruit le ministre des Forces armées de proposer une nouvelle doctrine de coopération en matière de défense et de sécurité, impliquant, entre autres conséquences, la fin de toutes les présences militaires de pays étrangers au Sénégal, dès 2025 ». Par ces mots, le président Diomaye Faye a fixé le 31 décembre, dans son discours du Nouvel An, une date pour le retrait des bases militaires étrangères présentes dans le pays. Même si la France n’est pas citée nommément, cette déclaration s’inscrit dans la droite ligne des propos du président sénégalais au sujet de l’incompatibilité de la présence militaire de la France avec la souveraineté sénégalaise. Fidèle à sa volonté affichée d’être moins dans une démarche de rupture totale que de redéfinition des termes des partenariats, Diomaye Faye a toutefois précisé que « tous les amis du Sénégal seront traités comme des partenaires stratégiques ; dans le cadre d’une coopération ouverte, diversifiée et décomplexée. »
Le front politique toujours ouvert ?
Plus tôt dans le mois, en l’espace de quelques jours, le désormais ex-maire de Dakar, Barthélémy Dias aura subi deux revers de taille. D’abord, nonobstant son élection, il a, dans la foulée, perdu son siège au Parlement. Ceci suite à une radiation de son mandat de député de la coalition d’opposition Samm Sa Kaddu, du fait d’une condamnation à deux ans de prison – dont six mois fermes – en décembre 2023, dans l’affaire Ndiaga Diouf datant de 2011. En effet, conformément à l’article 61 de la Constitution sénégalaise, le ministre de la Justice, Ousmane Diagne a saisi le bureau de l’Assemblée nationale, qui a ainsi procédé à cette radiation. Comme certains pouvaient s’y attendre, l’intéressé s’est tout de suite saisi de son droit de recours, « Non pas pour retourner à l'Assemblée nationale mais pour que les Sénégalais puissent voir eux-mêmes si les tenants actuels du pouvoir croient en l’État de droit », a-t-il réagi le 9 décembre. Quelques jours plus tard – le 13 décembre -, Barthélémy Dias a également été déchu de son fauteuil de maire de Dakar. Selon un document signé par lui-même, le préfet a été saisi pour prononcer sa démission pour cause d’inéligibilité au sujet de l’affaire susmentionnée. Derrière cette plainte, un militant du parti Pastef serait l’instigateur.
À l’interne, des propos du ministre-conseiller Cheikh Oumar Diagne au sujet des tirailleurs sénégalais, ont suscité une grosse polémique. En effet, dans une émission télévisée parue le 21 décembre, il les avait traités « de traîtres qui s’étaient battus pour leurs frères ». Il faut dire que cette déclaration qui survient seulement trois semaines après les solennelles commémorations de l’Etat sénégalais de la mémoire des tirailleurs, est clairement inopportune. Finalement, dans un décret présidentiel publié le 30 décembre, le président Diomaye Faye a nommé Papa Thione Dieng, nouveau directeur des moyens généraux à la Présidence, en remplacement de Cheikh Oumar Diagne.
Les intérêts économiques en trait d’union avec la Mauritanie ?
Par ailleurs, le Sénégal et la Mauritanie continuent de s’acheminer de plus belle vers l’exploitation de leur gisement de gaz commun. En effet, les deux pays ont annoncé l’ouverture du premier puits » de leur gisement marin, une étape importante devant conduire à « la commercialisation » du produit, selon un communiqué conjoint publié le 1er janvier. « Le franchissement de cette étape importante marque un grand pas dans l’aboutissement du projet GTA et consolide le partenariat exemplaire existant entre la Mauritanie et le Sénégal désormais destinés à jouer un rôle-clé dans l’industrie énergétique régionale », précise la note. Le projet, dénommé Grand Tortue Ahmeyim (GTA) est développé par le britannique BP avec l’américain Kosmos Energy, la Société mauritanienne des hydrocarbures (SMH) et la sénégalaise Petrosen. Lancé en 2020, il vise une production de 100 000 barils par jour.