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Source : Météo Sahel Janvier 2025
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Paul Biya sera-t-il candidat à la présidentielle d’octobre 2025 ? Au Cameroun, le brouillard autour de cette interrogation reste intact, ravivant ainsi les débats au sein de l’opinion publique et de la classe politique. Cette fièvre s’est d’abord fait sentir dans la communauté catholique du pays. En effet, Monseigneur Kleda, archevêque de Douala, avait qualifié une possible candidature de Biya de pas « réaliste ». Puis par la suite, ses homologues de Ngaoundere et de Yagoua, dans l'Extrême-Nord, lui ont emboîté le pas. Ce faisant, les autorités ont dans la foulée, tenté de faire redescendre la fièvre. C’est visiblement la raison pour laquelle le ministre de l'Administration territoriale Paul Atanga Nji a rencontré le représentant du Vatican, Monseigneur José Avelino Bettencourt. Si le ministre a déclaré que les relations entre Yaoundé et le Vatican sont « excellentes », le ministre de la Communication René-Emmanuel Sadi a, lui, affirmé qu’ « il n'existe aucun conflit entre le gouvernement et les confessions religieuses. » Au terme de son séminaire annuel tenu le 11 janvier, la Conférence épiscopale nationale du Cameroun (Cenc) a dans un message, déploré « la crise économique et la situation particulièrement préoccupante du pays », dans lequel les Camerounais sont « contraints de vivre avec la corruption et de l’accepter comme une réalité quotidienne, renforçant ainsi ce fléau. » Dans un communiqué de presse tenu le 9 janvier, l’opposant Maurice Kanto a une fois de plus vivement fustigé le processus électoral. Selon lui, les irrégularités de l’Elecam (l’organisme en charge des élections) qu’il dénonce, constituent un « manquement grave à la loi est de nature à compromettre la participation de nombreux Camerounais au scrutin présidentiel attendu. »
De son côté, le RDPC (Rassemblement démocratique du peuple camerounais) s’est rapidement mis en cheval de bataille. Le parti au pouvoir a sans surprise dénoncé ce qu’il considère comme une campagne de « discrédit du gouvernement » et de « dénigrement » à l’endroit de son « candidat naturel » : Paul Biya. Parallèlement, le Conseil des chefs traditionnels au Cameroun – regroupant trois cents autorités traditionnelles du pays – a, au terme d’un congrès le 27 janvier, formulé son « soutien ferme et définitif » à la candidature de Biya. Plus tôt dans le mois, le 10 janvier, le président Biya et Toïmano Ndam Njoya, présidente de l'UDC (parti politique d'opposition) se sont entretenus au palais présidentiel, au sujet de la présidentielle. « Nous avons pu porter à la haute attention du président (…) la grande préoccupation de l'heure des principaux acteurs du processus électorale, à savoir un système électoral accepté, partagé par tous, garant du jeu démocratique, crédible, juste, équitable, transparent et pacifique », a-t-elle indiqué, au terme de l’échange.
Temps difficiles pour les défenseurs des droits humains
Dans la nuit du 18 au 19 janvier, les locaux de l'ONG Nouveaux droits de l'homme – très active dans la défense des droits de l'homme - ont été cambriolés. Unités centrales de tous les postes d'ordinateurs, des disques durs et des clés USB ont été emportées par les cambrioleurs. « Cela crée une situation de traumatisme. Depuis des mois, nous sommes confrontés à une recrudescence de menaces et d’intimidations en raison de nos prises de position sur les libertés publiques au Cameroun », a déploré la directrice, Cyrille Rolande Bechon.
Quelques jours avant, c’était la convocation le 14 janvier de la présidente du Conseil d'administration du Réseau des défenseurs des droits humains d'Afrique centrale (Redhac), maître Alice Nkom à la gendarmerie nationale, qui faisait polémique. En effet, la figure de la société civile connue pour son combat pour les droits des personnes LGBT est visée par une dénonciation de l’ONG Observatoire du développement sociétal (ODS) pour « atteinte à sûreté de l'État » et « financement du terrorisme ». Ceci, en raison d’un forum sur la paix et la transition organisé et auquel elle a participé il y a cinq ans en Allemagne. Dans une lettre adressée au commissaire du gouvernement du tribunal militaire de Yaoundé, deux avocats ont estimé que ces accusations étaient « fantaisistes ».
Enfin, une semaine après avoir été remis au président Emmanuel Macron, le rapport de la commission sur le rôle de la France dans la répression des mouvements indépendantistes au Cameroun, a été également remis le 28 janvier, au président Paul Biya. Pendant deux ans, quatorze chercheurs (historiens français et camerounais) ont travaillé à débroussailler l’histoire de cette période sombre et enfouie de l’histoire franco-camerounaise. Les conclusions du rapportde 1000 pages sont limpides : la France a bel et bien mené de 1945 à 1971, une sanglante guerre contre les indépendantistes camerounais, autrefois opposés à l’ex empire colonial.