Cameroun : Vers une présidentielle sous tension ? Spécial

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Source : Météo Sahel Mai 2025

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L’agence de gestion des élections Elecam et l’Onu ont signé le 9 mai, une convention de collaboration. Celle-ci vise, affirme-t-on, à « optimiser les élections au Cameroun, dans une démarche visant à renforcer la transparence et l’inclusivité du processus électoral ». Visiblement écarté de ce processus, le parti MRC (Mouvement pour la Renaissance du Cameroun) de l’opposant Maurice Kamto a exprimé avec véhémence son indignation, dénonçant une « signature en catimini ». Ainsi, Maurice Kamto demande-t-il « à l’ONU de rendre publique la Convention signée avec ELECAM ou alors de s’en désolidariser publiquement, à moins qu’elle n’ait décidé, contre les valeurs démocratiques et les intérêts du Peuple Camerounais, et surtout contre sa mission cardinale de prévention des conflits de soutenir jusqu’au bout et quoi qu’il arrive la dictature camerounaise en place. »

Si le président Paul Biya ne s’est toujours pas déclaré officiellement sur sa volonté de briguer un nouveau mandat, il a durant depuis le mois d’avril, opté pour une communication numérique, inhabituellement intensive sur les réseaux sociaux et Facebook. En effet, dans des posts réguliers – à chaque fois en français et en anglais -, Biya a lancé plusieurs appels à la cohésion nationale. Par exemple, le 28 mai, il déclarait : « la paix, l’unité et la démocratie sont des valeurs sûres que je n’ai de cesse de prôner et que nous devons sans cesse renforcer. Elles n’ont pas de prix mais elles restent fragiles ». Le 12 mai : « Tous ensemble, nous devons continuer à bâtir une société saine constituée d’êtres humains qui se plaisent dans la compagnie les uns des autres, au lieu de se percevoir plutôt comme des loups les uns pour les autres. Ou encore plus tôt dans le mois, le 2 mai : « Notre objectif, c’est l’épanouissement total de chaque citoyen, où qu’il vive et travaille, sans discriminations. » Ce virage communicationnel est lu par une bonne partie de l’opinion publique, comme une manière de prendre la température, en vue de la présidentielle d’octobre 2025. Pendant ce temps, Cabral Libii a été désigné comme candidat officiel du Parti camerounais pour la réconciliation nationale (PCRN) à l'élection présidentielle. C’est la deuxième fois que Cabral Libii brigue la magistrature suprême – il était arrivé en troisième position à la présidentielle de 2018.

Emoi national après un meurtre

Au Cameroun, l’assassinat de Mathis, jeune garçon de six ans – le 10 mai mai, a provoqué un émoi national. D’après les témoins, le drame a eu lieu après une rixe entre le père de Mathis et le présumé assassin, dans une buvette de Yaoundé. Par la suite, ce dernier s’est rendu dans la maison des parents de Mathis, et a poignardé à plusieurs reprises le petit garçon de six ans. Les forces de sécurité ont dû intervenir pour éviter qu’il ne soit pris à partie par la foule. Cette affaire suscite une vague d’indignation d’autant plus grande que l’assassin présumé est le père de l’artiste populaire camerounaise Lydol. Emue, la slameuse a d’emblée exprimé sur son compte Instagram pour présenter ses condoléances à la famille éplorée, annulant par déférence, ses deux concerts prochains prévus fin mai et début juin. Mardi 27 mai, Dagobert Nwafo, 47 ans, a été inculpé pour « assassinat » et déposé à la prison centrale de Kondengui. Il y passera six mois en détention provisoire, en attendant son procès prévu le 27 novembre.

Le 20 mai, le pays a célébré sa fête nationale, ponctuée par des parades militaires et des mots officiels appelant à l’unité nationale. Cependant, cette journée qui arrive dans un contexte de tensions socio-politiques a vu le boycott du MRC de Maurice Kamto ou encore l’exclusion des militants du Parti de l’Alliance libérale (PAL) de Célestin Bedzigui. Dans la ville de Buéa (région anglophone), « une source policière a signalé qu'un engin explosif improvisé placé près de la place des cérémonies avait été désamorcé quelques heures avant le début de la parade », rapporte RFI.

Défis sécuritaires

En fin de mois, deux incursions terroristes attribuées au groupe terroriste Boko Haram ont été enregistrées dans l’extrême nord du pays. La première survenue dans la nuit du 18 au 19 mai dans le quartier Guipéré du village de Moskota (département du Mayo-Tsanaga) a causé la mort d’une personne. La seconde, dans la nuit du 23 mai dans le canton de Moskota (arrondissement de Mayo-Moskota) a également fait un mort. Plusieurs blessés ont été constatés.

Par ailleurs, un rapport publié le 9 mai par l’ONG Foder (Forêts et Développement Rural) alerte sur « les conséquences de l'exploitation minière artisanale dans des localités situées à l'est du pays ». Selon ce rapport, l’exploitation minière illégale dans ces aires protégées menace sérieusement l’existence de certains mammifères emblématiques menacés d'extinction tels que le léopard, le buffle, le chat doré africain, l'hippopotame pygmée, ou l'élan de derby.