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Cette note d'Analyse n°1 est réalisée dans le cadre d'une série d'études avec le soutien de la Fondation Konrad Adenauer (Dakar) sur les réponses des sociétés civiles à la pandémie de covid-19 au Sahel
L’expression « village planétaire » n’a jamais été aussi d’actualité que dans ce contexte de pandémie de COVID-19 qui fait actuellement infléchir la planète entière indépendamment du niveau d’industrialisation ou de développement. Considérée comme la première véritable épidémie de la mondialisation, la COVID-19 a instauré une forme d’égalité de condition entre Nations et continents.
D’une conception lointaine que l’on se faisait ironiquement du « virus chinois », on est très vite arrivé à une crise sanitaire mondiale aux conséquences incalculables dont l’Afrique n’a pu échapper. Aucun des 54 pays du continent n’est aujourd’hui épargné par la pandémie avec, à ce jour, un lourd bilan en moins de trois mois : +100 000 cas et +3 000 décès selon le Centre pour la prévention et le contrôle des maladies de l’Union Africaine.
Depuis l’enregistrement du premier cas de COVID-19 au Nigéria fin février, il a fallu seulement quelques semaines au virus pour qu’il touche tous les pays comme pour s’accommoder à l’environnement sahélien.
Face à cette situation les États de la région ont mis en place des plans de riposte pour gérer la nouvelle donne. À défaut d’opter pour un confinement avec tous les moyens que cela nécessite, des mesures ont été prises telles que la fermeture des frontières, l’instauration de l’état d’urgence assortie d’un couvre-feu dont les horaires sont variables d’un État sahélien à un autre, l’interdiction des rassemblements publics sans mention expresse sur la fermeture des lieux de culte, etc.
Ayant touché à l’ensemble des domaines d’activités et des secteurs socioéconomiques, la pandémie a aussi impacté le domaine religieux qui est d’une importance capitale dans cette région qui semble moins affectée que beaucoup d’autres par les effets de la sécularisation et du recul théorisé du religieux. Ce dernier conserve toute sa vigueur dans les sociétés sahéliennes.
Au regard de l’importance que revêt le champ religieux dans les dynamiques sociétales au Sahel, il a semblé intéressant d’interroger la manière dont la pandémie et sa gestion l’ont affecté à travers plusieurs variables.
Même si dans l’ensemble, les discours religieux se sont illustrés, dès le début de la pandémie, à travers leur adhésion à la plupart des mesures pour l’essentiel inédites, les acteurs religieux n’ont pas toujours eu des positions unanimes sur les décisions politiques et administratives régulant le culte et le domaine du sacré dans cette période spécifique.
Certes le domaine du sacré a toujours été en interaction avec celui du politique dans ces pays, mais ces derniers mois ont été marqués par un ensemble de mesures et de dispositions dont le but était de réguler le culte dans le cadre de précautions hygiéniques et sanitaires.
Pendant que certains États ont mis en place des mesures plus strictes en fermant les lieux de culte quitte à faire passer certaines autorités comme des « ennemis de la religion », d’autres ont opté pour un dialogue ouvert avec les acteurs religieux privilégiant la négociation. Dans ce sillage, des observateurs analysent ce dernier choix comme une déresponsabilisation de l’État souverain, pendant que d’autres y voient une mise en pratique du principe de laïcité impliquant la séparation des pouvoirs temporel et spirituel.
Dans l’espace sahélien, aussi limitatives que les mesures puissent paraître les attitudes des acteurs religieux pourraient être classifiées en trois catégories selon qu’elles soient volontaristes, collaboratives ou contestataires.
Du fait de la difficulté matérielle de mener des enquêtes de terrain au regard de la situation sanitaire, une équipe de veille a été mobilisée qui s’est appuyée sur une netnographie analytique. En fait, la situation des différents pays analysée a été suivie au jour le jour avec un focus sur les interactions entre autorités politiques et acteurs religieux autour de la gestion d’une question sanitaire.
Cette note d’analyse traite des différentes actions et discours religieux face aux mesures restrictives liées à la gestion de la pandémie de COVID-19 dans les pays du G5 Sahel et au Sénégal sous l’angle du triptyque relatif aux actions volontaristes, aux initiatives contributives et aux actions contestataires défiant l’autorité politique.