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La Harakat Al-Shabab al- Mujâhidîn est fondée en 2004 mais a été beaucoup médiatisée à partir de 2007. C’est une faction armée qui porte plusieurs autres noms tels que : Harakat Shabab al-Sumâlî, Harakat al- Mujâhidîn, Al-Shabab al-Jihâdî etc. Le premier combat des Chebabs somaliens a été d’affaiblir les confréries soufies notamment la Qâdiriyya. C’est une bataille idéologique que ces anciens étudiants en Arabie Saoudite et au Soudan ont menée pendant plus de trente ans en accusant les confréries soufies et leurs Cheikhs de « kufr » (dénégation) et de « Shirk » (associationnisme) en se présentant comme des « missionnaires » devant « purifier » les pratiques de l’islam en Somalie
En effet, c’est dans les années 70 et 80 que beaucoup de jeunes somaliens sont partis étudier en Arabie Saoudite alors que le salafisme wahhabite avait commencé à faire ses effets sur le champ religieux somalien avec un vaste mouvement de « rectification des dogmes » (Tashîh al-‘aqâid) et de lutte contre le soufisme notamment la confrérie Qâdiriyya. Cette confrérie est assez présente en Somalie sous la forme d’une ramification appelée Rabî’iyya fondée par Shaykh Muhammad Rabî’u Dîn.
Dans le cadre d la propagation du salafisme à partir des années 60, l’Arabie Saoudite a beaucoup contribué à la formation de ces jeunes somaliens qui ont fréquenté les universités de Médine, Ummul Qurâ et ont obtenu, en plus des bourses d’études des subventions financières. Ce soutien financier a favorisé la naissance à deux mouvements : Al-Ittihâd al-Islâmî (l’Union islamique) qui s’est beaucoup investie dans la da’wah (prédication) entre 1982 et 1984, dirigée à l’époque par le Cheikh Ali Warsma.
Cette union est née de la fusion entre deux mouvements salafistes que sont la Jamâ’a Islâmiyya et Wahdat al-Shabâb al-Islâmiyya. En plus des anciens étudiants en Arabie Saoudite, d’autres membres proviennent aussi des universités soudanaises et même d’Al-Azhar à l’époque. Il faudra, aussi, prendre compte de la stratégie de ces « missions islamiques » qui visaient aussi à contrecarrer l’évangélisation sous l’influence de l’Ethiopie et d’autres organisations chrétiennes.
C’est sous le règne du roi Fayçal bin Abdul Aziz qu’est arrivée à Mogadiscio en 1964, la première mission « islamique » d’étude sur la « situation des musulmans en Somalie », sous l’égide de Cheikh Mohammed Nasser Al-Amoudi, Secrétaire général adjoint de la Ligue islamique mondiale. Suite à un rapport sur la « situation des musulmans en Somalie », l’idée a été émise d’intensifier le travail de prédication et de purification du dogme islamique qu’on devrait purifier des « innovations » du soufisme.
Ainsi, d’importants fonds vont être alloués par le gouvernement saoudien pour envoyer des prédicateurs et des guides pour l’Afrique, la mise en place d’instituts islamiques en Somalie, en Ouganda, au Kenya ainsi que la construction de mosquées. Puis, en 1966, la Ligue islamique mondiale, en collaboration avec le cheikh Abdulrahman Hussein, les efforts saoudiens dans la prédication, l’enseignement, et la publication de plusieurs milliers de documents, va appuyer la propagation du salafisme appelant à un retour vers l’islam dit de la « première génération de musulmans ».
Le groupe terroriste était connu au début comme l’aile armée de l’Organisation des Tribunaux islamiques. Mais l’alliance avec l’opposition somalienne à la conférence d’Asmara en septembre 2007 est l’une des principales raisons de la dissolution du mouvement somalien de la jeunesse des tribunaux, l’accusant d’alliances avec des laïcs.
Al-Shabab adopte l’orientation salafiste-djihadiste et vise à établir un «Etat islamique». Le mouvement est décrit comme membre à part entière des organisations salafistes mondialistes et jihadistes, avec des hommes armés en Somalie et de divers pays arabes. Le groupe affirme lui-même que ses hommes armés ont mené l’attaque contre le centre commercial Westgate à Nairobi le 21 septembre, qui a tué au moins 68 personnes.
Il faut rappeler qu’Al Shabab a également été responsable du double attentat-suicide à Kampala, en Ouganda, en 2010, qui a tué 76 personnes après la finale de la Coupe du monde comme il a déjà revendiqué des attaques en Ouganda parce que les troupes ougandaises – en plus du Burundi – étaient l’épine dorsale de la force africaine opérant en Somalie avant que le Kenya ne rejoigne la force.
Al-Shabab est, ainsi, devenu un mouvement à dimension continentale et plusieurs analystes s’accordent sur sa capacité de nuisance notamment dans les pays voisins comme le Kenya où ses jeunes militants peuvent se rendre sans encombre profitant de la porosité des frontières. Il a été plusieurs fois signalé que ces jeunes ont pu se rendre à Nairobi pour se faire soigner dans les hôpitaux du pays. Pour dire l’étendue de ses relations et de ses réseaux qui lui facilitent l’appui logistique nécessaire à son déploiement.
Pour toutes ces raisons, ce mouvement constitue une réelle menace non seulement pour l’Afrique d l’Est mais tous les pays du continent si l’on sait aujourd’hui ses accointances avec d’autres groupes (Al Qaida, Boko Haram) dans le cadre d’une coopération logistique facilitant ses incursions et attaques dans tous les pays voisins de la Somalie.
Le plus inquiétant reste la présence et l’activisme de mouvements appartenant à ce courant salafiste wahhabite dans l’ensemble des pays du Sahel (Mali, Niger, Sénégal, Burkina, Mauritanie, Tchad etc), sous plusieurs dénominations mais revendiquant tous le même dogme de la « purification » des pratiques religieuses qui a abouti au takfîr et aux attaques contre toutes les autres catégories qui ne partagent pas leur vision.