Le Bénin et la menace terroriste : vers un nouvel épicentre côtier ? Spécial

Entre pressions du « dedans » et contraintes du « dehors », l’actualité béninoise oscille entre la décision de retrait de ses forces militaires de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) et la préparation des joutes électorales pour les législatives. 

Tout d’abord, dans une note adressée au secrétariat des Nations Unies, le Bénin annonce sa décision de retirer progressivement ses forces  (environ 390 hommes) de la MINUSMA au plus tard en novembre 2023, au regard de l’impérieuse nécessité de renforcer sa sécurité intérieure. Certains observateurs analysent cette décision comme une prise de conscience accentuée du risque terroriste à la frontière du Burkina FasoPendant ce temps, certains interprètent cette décision comme un moyen d’être paré contre d’éventuelles représailles de la part des groupes armés en provenance du Mali. 

In fine, dans les deux hypothèses, il s’agit de se préserver davantage de la menace terroriste qui s'accroît de plus en plus au Bénin. Le pays a connu depuis quelques mois de nombreuses attaques terroristes, la dernière étant celle de la nuit du 26 au 26 juin contre le commissariat de Dassari (commune de de Matéri) dans l’Atacora faisant quatre morts dont deux policiers. On se rappelle aussi de l’attaque d’avril 2022 dans le parc Pendjari, où cinq soldats béninois ont perdu la vie. Un hommage leur a été dédié le mercredi 25 mai et fortement relayé par les médias et la classe politique. 

Pendant ce temps, le pays est en pleine préparation des élections législatives qui auront lieu dans quelques mois. Ces joutes électorales sont, à la fois, un moment d’exercice démocratique important, mais aussi, d’incertitude qui mettront en lumière certains conflits latents depuis les dernières joutes controversées. En ce sens, le secrétaire général de la Cour constitutionnelle béninoise, Gilles Badet, pose d’ores et déjà le débat sur l’éligibilité même des potentiels élus en rappelant les conditions dans lesquelles une élection est contestable : « les conditions d’éligibilité peuvent être contestées à tout moment” avant d’insister sur le fait que ce dialogue juridique autour des élections, est un élément de paix, tout en invitant à prendre connaissance des règles électorales.  

Mais la question se pose de savoir s’il faut séparer le domaine politique du levier traditionnel de médiation. D’où le débat sur le rôle des rois béninois dans ce tournant démocratique. En effet, par une déclaration en date du 6 mai, le secrétaire général du Haut conseil des rois du Bénin, Gangoro Suambou, invite « les rois et chefs traditionnels à ne plus prendre part aux réunions politiques ». Cette réunion a été l’occasion de féliciter le gouvernement pour les mesures prises « en faveur du développement du pays » et pour la reconnaissance constitutionnelle des rois et chefs traditionnels.

La situation sociopolitique au Bénin est l’expression d’une tendance générale dans laquelle les Etats de la région sont à la fois bousculés par des agendas politiques internes au même moment où ils doivent faire face à la pression sécuritaire régionale. Le Bénin est en train de devenir l’un des pays côtiers les plus exposés aux attaques terroristes au point où il deviendrait légitime de se poser la question de savoir si, au rythme actuel, il ne serait pas en train de devenir un nouvel épicentre, du moins un point d’attention préoccupant au niveau ouest-africain.