Au cours du mois d'avril 2024, la Guinée a été le théâtre de développements politiques et sociaux significatifs, illustrant les défis auxquels est confronté ce pays avec une transition aux intentions et orientations pour l’heure illisibles. Tout d'abord, le processus d'élaboration d'une nouvelle Constitution, initialement prévu pour septembre de l'année précédente, a été retardé en raison de divers obstacles institutionnels et de la dissolution surprise du gouvernement en février. Malgré les retards, le président de la transition, le Général Mamadi Doumbouya, a annoncé la tenue d'un référendum cette année, signalant ainsi une prolongation de la période de transition au-delà de la date initialement prévue.

Pendant ce temps, l'insécurité croissante dans la deuxième ville du pays, Kankan, est devenue une préoccupation majeure. Les braquages à main armée se multiplient, mettant en danger la vie des citoyens et sapant la confiance dans les autorités locales pour assurer la sécurité publique. Les récentes attaques, dont certaines se sont soldées par des décès, témoignent d'un climat d'insécurité persistant dans la région et de la nécessité de mesures urgentes pour y remédier.

Parallèlement, la liberté de la presse est de plus en plus menacée en Guinée, avec la suspension de médias et de sites d'information sous prétexte de "sécurité nationale". Cette « répression » de la liberté d'expression largement dénoncée suscite des inquiétudes croissantes parmi les professionnels des médias, qui demandent une audience directe au président Mamadi Doumbouya pour exprimer leurs préoccupations et défendre leur droit à informer le public de manière indépendante.

Sur le plan politique, l'opposition s'organise autour de l'Union sacrée, regroupant plusieurs organisations de la société civile et partis politiques, pour faire pression sur la transition en cours. L'Union sacrée demande la tenue rapide d'élections et exprime des inquiétudes quant à la prolongation de la transition et à une éventuelle tentative de la junte au pouvoir de confisquer le pouvoir. Ces développements témoignent des tensions persistantes entre les différents acteurs politiques et de la nécessité de trouver un consensus pour assurer une transition démocratique et pacifique en Guinée.

Le mois d’avril 2024 aura été marqué par l'investiture et les premiers pas du plus jeune président de l’histoire du pays, Bassirou Diomaye Faye, ainsi que les développements politiques et économiques qui ont suivi. Il a prêté serment en tant que président, succédant à Macky Sall, lors d'une cérémonie solennelle dans la nouvelle ville de Diamniadio : un projet-phare de la présidence Sall. Son élection a été favorisée, entre autres circonstances, par la promesse de rupture avec le « système » précédent, et la nomination au poste de Premier ministre, d’Ousmane Sonko, a été un signe de cette volonté de changement « systémique ». Le premier discours du président nouvellement élu a mis l'accent sur la jeunesse, la réforme des institutions, la justice et une gouvernance « vertueuse », notamment dans le contexte de l'exploitation future des ressources pétrolières et gazières.

La composition du gouvernement dirigé par Ousmane Sonko met en lumière une équipe resserrée et marquée par la présence notable de membres du mouvement Pastef, dont est issu le Premier ministre. Les nominations de deux généraux à des postes régaliens (Intérieur et Défense) ont également été notées, suscitant des réactions diverses ainsi que la présence minimaliste de seulement 4 femmes. Le décès de Mahammed Boun Abdallah Dionne, ancien Premier ministre et candidat à la présidentielle, a également marqué ce mois d’avril tout en donnant l’occasion d’un affichage « républicain »  au premier ministre ayant présidé la cérémonie de levée du corps ; cotoyant d’illustres individualités du régime défait par PASTEF.

Sur le plan économique, le nouveau président a ordonné un état des lieux économique et financier du pays, avec un accent sur la relance économique et la réduction des dépenses publiques. La reprise de la liaison maritime entre Dakar et Ziguinchor a été bien accueillie pour la région de la Casamance, tandis qu'une saisie record de cocaïne a été réalisée dans l'est du pays.

La préservation du patrimoine national a également fait l'objet d'une attention particulière, avec la suspension d'une vente aux enchères de la bibliothèque de Léopold Sédar Senghor, ancien président et poète du Sénégal.

Par ailleurs, le président, alors qu’il a réservé ses premières visites à Touba et Tivaouane (deux principales capitales des influentes confréries), a annoncé la création d'une Direction des affaires religieuses et de l’insertion des diplômés de l’enseignement arabe. Cette nouvelle entité, qui relèvera de la présidence, regroupera les bureaux précédemment sous la responsabilité séparée du ministère de l'Intérieur et de l’éducation nationale.

Sur la scène internationale, Bassirou Diomaye Faye a effectué sa première visite à l'étranger en Mauritanie, soulignant l'importance des relations avec les pays voisins mais aussi l’enjeu de la future exploitation commune des ressources gazières. Sa visite en Gambie, participe à la volonté de renforcer les liens bilatéraux entre les deux nations dont dépend beaucoup la résolution définitive de la crise en Casamance. Enfin, sa rencontre diplomatique en Guinée-Bissau en cette fin de mois a permis de discuter des questions de frontière, de sécurité et des pêcheries chinoises. 

Sur le plan diplomatique, le président sénégalais a plaidé pour un partenariat "repensé" avec l'Union européenne, mettant en avant les priorités de développement économique du pays tout en poursuivant les visites officielles comme celle effectuée en Côte d’Ivoire où le Président Faye rencontrera le Président Alassane Ouattara, un des doyens de la CEDEAO.

Tensions between nomadic Arab herders and indigenous sedentary farmers continue to provoke deadly clashes in southern Chad. At the end of March, at least 23 people were killed during seven days of violence in the Moyen-Chari region. These clashes are often triggered by disagreements and conflicts over the control of certain lands.

At the same time, the arrest of Ibrahim Hissein Bourma, a Chadian businessman, continues to arouse public criticism. His support committee has denounced the conditions of his detention, claiming that he was brutally arrested by armed soldiers. Relatives also denounce the arbitrary detention of some thirty people in his residence.

Controversy also erupted around the appearance of election posters of the transitional president before the official start of the electoral campaign. The opposition denounced this as a violation of the Electoral Code and accused the election management body of a partisan attitude in not taking action against these posters. Presidential candidates are also criticizing the use of state resources in the campaign, claiming that the transitional president is benefiting from an unfair advantage. In addition, tensions have arisen around electoral transparency, with a ban on photographing the minutes of the count, raising concerns about the validity of the electoral process.

The electoral campaign continued with ten candidates vying for the May 6 presidential election, including Pahimi Padacké and Lydie Beassemda, the only female candidate in the Chadian presidential election, who supports federalism as well as women's rights. A food industry engineer with ministerial experience, she heads the Party for Democracy and Integral Independence (PDI). The candidates' programs range from anti-corruption measures and energy sector reform to promises of restoring democracy and food self-sufficiency. While Mahamat Idriss Déby Itno is campaigning in opposition areas, Succès Masra, the current Prime Minister and presidential candidate, organized a massive rally in Moundou before embarking on a well-attended campaign even in the interior of the country and especially in the big cities. 

Against this tense backdrop, the United States plans to temporarily withdraw some of its forces from Chad, in response to a Chadian request to cease operations at an air base, and will do so, according to the authorities, as part of a review of security cooperation after the presidential elections.  

The elections went off smoothly and the partial results are being scrutinized from all sides, with heated debates already launched on social networks and claims of victory in the major cities by supporters of the opponent Succès Masra.

Les tensions entre éleveurs nomades arabes et cultivateurs autochtones sédentaires continuent de provoquer des affrontements meurtriers dans le sud du Tchad. Fin mars, au moins 23 personnes ont été tuées pendant sept jours de violences dans la région du Moyen-Chari. Ces heurts sont souvent déclenchés suite à des désaccords et des conflits liés au contrôle de certaines terres.

En parallèle, l'arrestation d'Ibrahim Hissein Bourma, un homme d'affaires tchadien, continue de susciter des critiques au sein de l’opinion publique. Son comité de soutien dénonce ses conditions de détention et affirme qu'il a été arrêté de manière brutale par des militaires armés. Des proches dénoncent également la détention arbitraire d'une trentaine de personnes dans sa résidence.

La polémique ont également éclaté autour de l'apparition d'affiches électorales du président de la transition avant le début officiel de la campagne électorale. L'opposition dénonçait, ainsi, une violation du Code électoral et accuse l'organe de gestion des élections d'avoir une attitude partisane en ne prenant pas de mesures contre ces affiches. Des candidats à la présidentielle critiquent également l'utilisation des moyens de l'État dans la campagne, affirmant que le président de transition bénéficie d'un avantage indu. En outre, des tensions ont surgi autour de la transparence électorale, avec une interdiction de photographier les procès-verbaux de dépouillement, suscitant des préoccupations quant à la validité du processus électoral.

La campagne électorale s’est poursuivie avec dix candidats en lice pour l'élection présidentielle du 6 mai, dont Pahimi Padacké ou encore Lydie Beassemda, seule candidate femme à l'élection présidentielle tchadienne, défendant le fédéralisme mais aussi les droits des femmes. Ingénieure en industrie agroalimentaire, elle a une expérience ministérielle et dirige le Parti pour la démocratie et l'indépendance intégrale (PDI). Les candidats présentent des programmes variés, allant de la lutte contre la corruption à la réforme du secteur de l'énergie, en passant par des promesses de restauration de la démocratie et de l'autosuffisance alimentaire. Alors que Mahamat Idriss Déby Itno mène sa campagne dans les terre de l’opposition, Succès Masra, actuel Premier ministre et candidat à la présidence, a organisé un rassemblement massif à Moundou avant de se lancer dans une campagne bien suivie même à l’intérieur du pays et surtout dans les grandes villes.

Dans ce contexte tendu, les États-Unis prévoient de retirer temporairement une partie de leurs forces du Tchad, en raison d'une demande tchadienne de cesser leurs activités sur une base aérienne, et cela se fera, d’après les autoritsé, dans le cadre d'un réexamen de la coopération sécuritaire après les élections présidentielles. 

Les élections se sont déroulées sans heurts et les résultats partiels sont scrutés de toutes parts avec des débats passionnés déjà lancés sur les réseaux sociaux et des revendications de victoire dans les grandes villes par les partisans de l’opposant Succès Masra.

In Togo, it is in a climate of high tension that citizens are called to vote to elect their deputies in a long-awaited legislative election that has been repeatedly postponed and finally rescheduled for Monday April 29. This new postponement follows President Faure Gnassingbé's request to re-examine the text aimed at amending the Constitution to move the country from a presidential to a so-called parliamentary regime, initially adopted by the assembly on March 25. With an overwhelming majority in parliament, it came as no surprise that the deputies confirmed the adoption of the text.

Henceforth, in Togo, power resides in the hands of a President of the Council of Ministers, appointed by the deputies, in charge of regalian functions. The president's term of office is six years, without specifying whether or not he or she can be reappointed. It is this point that worries the opposition, who fear that the current president, Faure Gnassingbé, could be appointed to this position, ensuring that he remains in power indefinitely. 

The day after the final adoption of the new constitution, the opposition lodged an appeal with the ECOWAS Court of Justice to demand the withdrawal of the country's new constitution, arguing that the constitutional reform "was made in the absence of prior public debate and political consensus", which, according to opponents and civil society, would undermine "democracy and good governance".

For some analysts, muzzled by bans on demonstrations, the opposition has concentrated its efforts on the run-up to the ballot scheduled for Monday 29, to raise awareness of how to vote, in order to avoid invalid ballots. According to the opposition, these legislative elections are an opportunity to "break the chains of slavery" that are shackling the Togolese people, and put an end to the Gnassingbé "dynasty".

According to the opposition, there is a flagrant lack of transparency in this election, with the authorities refusing to accredit an observer mission proposed by the Justice and Peace Commission. Even ECOWAS, which had announced an exploratory mission to interact with the main stakeholders on the latest developments in the country in a tweet, ended up modifying it the very next day, simply reclassifying the mission as "informational". It was thus in a rather confused climate that the Togolese were called to vote on Monday April 29, 2024, with the result ushering in a new political era in a country where the political scene has never been so turbulent in recent years.

Au Togo, c’est dans un climat de forte tension que les citoyens sont appelés à voter pour élire leurs députés lors d’une élection législative très attendue et maintes fois reportée pour finalement être reprogrammée le lundi 29 avril. Ce nouveau report fait suite à la demande du président Faure Gnassingbé de réexaminer le texte visant à modifier la Constitution pour faire passer le pays d’un régime présidentiel à un régime dit parlementaire initialement adopté par l’assemblée le 25 mars dernier. Avec une majorité écrasante au parlement c’est sans surprise que les députés ont confirmé l’adoption du texte.

Dorénavant, au Togo, le pouvoir réside entre les mains d’un président du Conseil des ministres, désigné par les députés, chargé des fonctions régaliennes. Son mandat est de six ans, sans qu’il soit précisé s’il sera renouvelable ou non. C’est ce point qui inquiète l’opposition qui craint que l’actuel président, Faure Gnassingbé, ne soit désigné à cette fonction, assurant son maintien au pouvoir pour une durée indéfinie. 

Au lendemain de l’adoption définitive de la nouvelle constitution, l’opposition a déposé un recours devant la Cours de justice de la CEDEAO pour réclamer le retrait de la nouvelle constitution du pays, estiment que la réforme constitutionnelle "a été faite en l'absence d'un débat public préalable et d'un consensus politique", ce qui, d’après les opposants et la société civile, porterait atteinte à "la démocratie et la bonne gouvernance".

Pour certains analystes, muselée par des interdictions de manifester l’opposition s’est concentrée sur les efforts en vue du scrutin fixé au lundi 29, pour sensibiliser sur la manière de voter, afin d’éviter les bulletins nuls. Selon cette même opposition ces législatives sont l’occasion de « rompre les chaînes de l’esclavage » qui entravent le peuple togolais et d’en finir avec la « dynastie » Gnassingbé.

Toujours, selon l’opposition, un manque flagrant de transparence plane sur cette élection avec le refus des autorités d’accréditer une mission d’observateur proposée par la commission justice et paix. Même la CEDEAO qui avait annoncé une mission exploratoirevisant à interagir avec les principales parties prenantes sur les derniers développements dans le pays dans un tweet finira par le modifier dès le lendemain requalifiant simplement la mission « d’informationnel ». C’est, ainsi, dans un climat assez confus que les togolais ont été appelés à voter le lundi 29 avril 2024 avec le résultat qui ouvre une nouvelle ère politique dans ce pays où la scène politique n’a jamais été aussi mouvementée ces dernières années.

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