Unir nos forces pour contrer la désinformation au Sahel.
Dans le cadre d’un Projet dénommé « La Vérité sur le COVID » mis en œuvre par Timbuktu
Institute et Sayara International, une convention de partenariat a été signé, ce vendredi 29 janvier
2021 à Dakar avec le Centre d’Etudes des Sciences et Techniques de l’Information (CESTI).


Le virus de la désinformation
En effet, une Déclaration interrégionale de ONU précisait en juin 2020, “En temps de crise sanitaire
due à la COVID-19, la propagation de « l’infodémie » peut être aussi dangereuse pour la santé et la sécurité
humaines que la pandémie elle-même” -.


Dans ce contexte de pandémie, les journalistes et les médias au Sahel ont des
responsabilités particulières et un rôle à jouer dans le traitement des informations relatives à
la situation sanitaire mais aussi pour tenter de résister à “l’infodémie” et à la déferlante de
multiples informations contradictoires sur la Covid 19.


En effet, la question de la vérité éditoriale est aujourd’hui posée de façon cruciale ; à la
difficulté de contrôler des sources souvent lointaines et invérifiables, s’ajoutent de multiples
discours et opérations de désinformation qui mettent en péril l’éthique et la déontologie dans la
profession et la stabilité même des pays de la région.


Les réseaux sociaux questionnent la déontologie
Cette question déontologique est particulièrement mise en lumière par la concurrence massive
des réseaux sociaux, où la production et la diffusion de l’information est à portée de toutes les
mains. Conscient du fait que sur ces plateformes numériques fleurissent des pseudo-journalistes,
des utilisateurs de tous ordres qui brouillent les messages tout en s’attirant une large audience, le
Timbuktu Institute et le CESTI joignent leurs efforts pour prévenir et lutter contre la
désinformation est ses effets nuisibles aux pays du Sahel

Le rôle déterminant du CESTI
Au regard de sa réputation en tant que centre d’excellence de formation en Journalisme, le
CESTI a toujours placé la question de la déontologie au cœur de son enseignement. Sa vocation
panafricaine lui procure un rayonnement dans de nombreux pays africains et sahéliens. Son
important réseau d’anciens étudiants pourrait jouer un rôle clef d’influence, de formation et
de diffusion des bonnes pratiques.

Éveiller les consciences, former les journalistes
C’est pour toutes ces raisons que le CESTI a convenu de faire profiter de son expertise dans le
cadre d’un partenariat pour réaliser un curriculum de formation contre la désinformation.
Ainsi la conception et la diffusion de contenus répondant aux mêmes objectifs mais aussi
l’animation de symposiums régionaux au bénéfice des journalistes, des blogueurs, des
activistes, des influenceurs et autres acteurs des média pourrait prendre en charge
efficacement la question de la désinformation dans les pays du Sahel.
Ce partenariat comporte aussi un large volet de renforcement des capacités, d'échanges et de
mutualisation des compétences avec notamment l’accueil de stagiaires du CESTI au Timbuktu
Institute durant l’exécution du projet « La Vérité sur le Covid ».

Contact Presse Timbuktu Institute : Adji Awa Samb - Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
Contact Presse CESTI : Mme Tabara Niang Sy - Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Pour Bakary Sambe, Directeur de Timbuktu institute et coordonnateur de l’Observatoire des radicalismes et conflits religieux en Afrique (Orcra), le Sénégal « devrait réglementer ce secteur » de la même manière qu’on a procédé avec la presse. Il soutient que « même le législateur français, pays considéré comme un Etat assez libéral en matière de gestion du religieux, a décidé de faire ce qu’il avait longtemps refusé de faire : une loi contre les sectes ».

Le chercheur au Centre des études des religions de l’Université Gaston Berger (Ugb) de Saint-Louis, pense qu’« il faudra maintenant savoir dans quelle mesure, on pourrait aboutir à un consensus dans le cadre d’un contrat social sénégalais, qui nous a garanti, jusqu’ici, la durabilité d’une laïcité de consensus ». Mieux, dit-il, « le dialogue national inclusif devrait inscrire cette question dans son agenda, de même que l’Assemblée nationale, mais il faudra une réelle volonté politique sachant que les questions religieuses très sensibles chez nous ont toujours été gérées par les régimes successifs comme des patates chaudes à léguer au suivant ».

Car, prévient-il, « la dangerosité d’un tel phénomène se mesure à l’aune de la probabilité d’exercice de la violence qui ne saurait avoir de limite et d’encadrement ».

A ce titre, Dr. Sambe a plaidé l’implication des chefs religieux dans un tel processus, afin que la religion puisse demeurer dans notre pays, cité pour sa tolérance, « un facteur de cohésion sociale et non un facteur de déstructuration malgré les signaux qu’on a notés ces dernières années ». 

(Source Le Soleil)

 

Le nouveau positionnement du Sénégal relève d’une parfaite conscience de la transnationalité du phénomène terroriste et du débordement progressif de l’épicentre malien surtout avec l’instabilité politico-institutionnelle qui a occasionné l’abandon de positions stratégiques par les forces spéciales au pouvoir à Bamako. Dans ce contexte marqué par des signaux peu rassurants aux frontières sénégalo-maliennes et mauritaniennes sans parler de la régionalisation effective de la menace terroriste, le Sénégal ne peut perdurer dans la stratégie réactive de construction d’une résilience nationale dans un contexte régional d’instabilité chronique. Il fallait passer au containment proactif des risques et au renforcement des dispositifs d’anticipation parmi lesquels le renseignement extérieur et intérieur qui se modernisent.


Même sans effectivement intégrer le G5 Sahel qui va nécessairement évoluer vers un cadre élargi, le contre-terrorisme sénégalais a bien besoin de toutes les sources et ne peut se passer des cadres régionaux de coopération et de partage d’informations dans le cadre d’une mutualisation qui s’impose. La présence du Président Macky Sall au dernier sommet si décisif de Ndjamena relève d’un certain réalisme et d’une prise de conscience de la nécessité d’une gestion des urgences sécuritaires sans perdre de vue l’enjeu de la prévention face au rapprochement des groupes profitant du vide laissé par des forces spéciales qui faisaient de la région Kayes le dernier verrou vers nos frontières.


Au-delà du soutien financier symbolique aux efforts du G5 Sahel, le Sénégal, déjà assez présent militairement au Mali dans le cadre de la MINUSMA, réaffirme, de fait, un des principes fondateurs de sa diplomatie à savoir la solidarité africaine mais donne aussi un signal fort par ce tournant décisif dans son engagement contre le terrorisme qui n’est plus perçu comme un phénomène lointain mais un danger immédiat.
La « conquête des cœurs » : clé de la « bataille de l’Est » ?


La frontière sénégalo-malienne est une préoccupation désormais assumée de nos forces de sécurité et de défense qui ont, intégré l’idée d’une bataille de l’Est à gagner. C’est un changement de paradigme. Cette affaire d’une cellule terroriste qui serait démantelée ne surprend guère sachant que, début février, un rapport international rendu public faisait état de cette incursion depuis le Mali. Une récente étude du Timbuktu Institute démontre que la région Est bénéficie encore d’une certaine résilience bien que quelques inquiétudes appellent à une approche holistique au-delà du sécuritaire.


Le véritable enjeu pour le Sénégal est d’arriver à empêcher que les groupes qui vont inéluctablement s’approcher ne trouvent pas de couveuses locales auprès des communautés, qu’elles soient l’allié des forces de sécurité et de défense, ne serait-ce que pour le renseignement humain, et non des groupes terroristes qui voudraient en exploiter les frustrations et marginalisations génératrices de radicalisation. Cela nécessitera encore plus d’investissements massifs pour renforcer le sentiment d’appartenance nationale. La bataille de l’Est ne se gagnera pas sans la conquête des cœurs qui me semble plus durable que la soumission des corps et le
tout-sécuritaire qui n’a jamais vaincu le terrorisme ailleurs.

Le Programme #Educating_for_Peace est une idée du Timbuktu Institute qui donne l'opportunité à la
jeunesse de s'exprimer sur des sujets touchant directement la société et l'environnement. En collaboration
avec Polaris Association et avec l'appui de l'Ambassade de Suisse au Sénégal, nous présentons cette petite
vidéo intitulée"Gender Perception"réalisée dans le cadre du programme sur la discrimination et la marginalisation
basées sur le genre.

Regardez la video

Le changement climatique est plus que jamais une problématique qui mérite qu'on y réfléchisse et qu'on
pose des actes afin de réduire au maximum nos actions qui altèrent notre environnement.
#EducatingforPeace est une idée du @Timbuktu Institute, en collaboration avec Polaris Asso avec
l'Ambassade de Suisse à Dakar, qui donne la parole à une jeunesse consciente qui nous informe,
par des données chiffrées, des dangers de la surconsommation de l'Homme qui menace l'équilibre de notre planète.
"Climate actions", la vidéo qui nous met en garde sur les dangers de la surconsommation de l'Homme.
 
 
A ce stade du Programme #EducatingforPeace, nous ne pouvions pas ne pas vous parler de l'entreprenariat.
A travers notre vidéo "Entrepreneurs United", nous vous dirons comment se former à l'entreprenariat et éviter
de mettre la clé sous la porte au bout de 5 ans comme c'est le cas de 80% des PME.
Timbuktu Institute - Polaris Association - Ambassade de Suisse au Sénégal
 
 

Le Sommet de Ndjamena a été un moment décisif de sursaut diplomatique marquant un nouvel esprit d’ouverture et d’une prise de conscience de la transnationalité du phénomène terroriste mais aussi de la nécessité d’une approche inclusive.  

L’ouverture à certains pays comme le Maroc et le Sénégal prouve une nouvelle volonté d’associer les pays qu’on considérait jusqu’ici comme loin des épicentres du terrorisme au Sahel. Certaines évolutions politiques dans les pays voisins ont fait que l’ostracisme relatif à l’égard du Sénégal s’est atténué et que son éventuel apport et celui de son armée pourraient peser sur le rapport de force face aux groupes terroristes. 

Le fait que la France, malgré son statut de puissance partenaire incontournable dans la région cherche de plus en plus l’appui sincère des pairs européens est le signe d’une nouvelle ère qui sera celle des coalitions stratégiques. Ce n’est point, comme certains le pensent un signal d’un début de retrait mais d’un niveau type d’engagement voulant éviter l’image peu avantageuse d’une ex-puissance coloniale malgré les tentatives de rupture introduites par Macron depuis le discours de Ouagadougou. Mais le Sommet de Pau a, tout de même, laissé quelques séquelles et des nuages qui pourraient peut-être se dissiper lors de celui de Montpellier à venir. 

Quant à l’intérêt des pays arabes pour le Sahel, ce n’est pas nouveau si l’on sait que les puissances du Golfe se livrent déjà une bataille d’influence même dans le domaine militaire dans la continuité de ce qui se joue actuellement sur le terrain libyen si encore glissant et instable. Il y a déjà des accords militaires entre certains pays comme le Niger avec les Emirats Arabes Unis sans parler de l'intérêt croissant du rival qatari pour la région où l'Arabie Saoudite dispose de fortes alliances.  

La France au Sahel : un nouvel engagement réaliste ?

Contrairement à ce qu’on peut croire, le Sahel n’a jamais été une question facile pour la France qui doit constamment y gérer l’urgence et l’histoire en même temps. Je ne suis pas du tout surpris de la réaffirmation d’une présence militaire française au Sahel alors que certains évoquaient un improbable retrait. Malgré un vent de nationalisme et de l’anti-impérialisme qui a soufflé au Sahel le temps d’un coup d’Etat au Mali qui aurait concrétisé le rêve de la fin de « l’emprise française », la réalité malienne, elle, reste inchangée et préoccupante. Elle était noyée dans la brève jubilation suscitée par la chute d’un « bourreau », ébranlé, délégitimé (IBK), tandis qu’était scrutée l’arrivée immédiate mais peut-être improbable de Russes ou d’autres acteurs. La réalité est que la France demeure un acteur incontournable dans le jeu sahélien. C’est bien chez nous qu’on dit que ceux qui ne peuvent se séparer doivent cohabiter. 

Autant la France reste une « grande puissance africaine » au regard de son influence et de ses intérêts géostratégiques, les pays de la région – surtout le Mali- ne gagneraient pas en matière de sécurité si cet allié arrivait à se retirer ; ce qui est peu probable, par ailleurs. Emmanuel Macron est, désespérément, en quête d’une pédagogie efficiente sur le Sahel auprès de ses concitoyens français, éloignés des réalités du terrain et qui semblent ne pas se retrouver dans ce choc des principes et la nécessité de conjuguer raisons politiques et moyens diplomatiques. 

Quelle que soit la pression de la rue, les élites politiques françaises de tous bords, malgré la démagogie de certains, ont toujours été conscientes de l’importance de l’Afrique pour leur pays, son économie et son influence. Que se passe-t-il donc entre les sociétés civiles africaines et la France ? S’agit-il, alors, vraiment d’un sentiment foncièrement anti-français ou plutôt des maladresses d’une nouvelle classe politique française qui a perdu la connexion avec un terrain qui, pourtant, ne lui était pas forcément défavorable ? 

Toutefois, la réponse des groupes terroristes qui n’a pas tardé suite à la déclaration du Président français à l’issue du sommet de Ndjamena n’augure pas d’une stabilisation prochaine de la région si l’on fonçait davantage dans le tout-militaire ayant abouti à l’échec constaté de Barkhane. La force Takuba annoncée et encore loin d’être soutenue par les autres pays européens, connaîtra-t-elle une issue différente ? Rien n’est moins sûr si l’on ne change pas de paradigme.

Dr. Bakary Sambe

Directeur du Timbuktu Institute (Bamako)

(source : TV5MONDE)
 
L’année 2020 a été, en effet, particulièrement meurtrière dans la région de Mopti où se trouve le cercle de Koro. Selon l’ONG Armed and Conflict Location and Event Data Project (Acled), 1592 décès liés au conflit ont été enregistrés durant cette année 2020 dans la région de Mopti, un record. Dans les 11 communes du cercle de Koro, qui ont signé les accords de paix, plus de 728 personnes sont mortes dans des conflits intercommunautaires de 2017 à 2020
 

Les affrontements se sont en effet multipliés ces dernières années entre les Peuls, et les ethnies bambara et dogon, qui ont créé leurs "groupes d'autodéfense"en s'appuyant sur les chasseurs traditionnels "dozos", la puissante milice dogon Dan Nan Ambassagou. Cette dernière est  officiellement dissoute par le gouvernement malien mais elle reste toujours active. Elle fut, selon les autorités maliennes, responsable du massacre du village de Ogossagou le 23 mars 2019. Dans ce lieu de la région de Mopti au moins 157 civils peuls furent massacrés et le village fut réduit en cendres.  Par la suite, l'attaque contre le village dogon de Sobane-Da dans le centre du Mali, le 10 juin 2019, avait fait 35 morts.

Bakary Sambe est universitaire, spécialiste du Sahel et directeur du Timbuktu peace Institute à Dakar au Sénégal. Selon lui, les autorités maliennes sont responsables de ce type de déchainement de violence. « Les Peuls sont des éleveurs et les Dogons sont des agriculteurs, il y a toujours eu des conflits autour de la question de l’eau et des terres entre ces communautés. L’État malien a délégué de fait la gestion de ces conflits à des milices, des groupes d’auto-défense. Même chose au Burkina faso où cela a été encouragé par le gouvernement. La gestion de la question sécuritaire par des communautés a créé un sentiment d’insécurité chez d’autres communautés rivales. Les Peuls ont cherché des protecteurs et ils ont trouvé cette protection notamment chez les groupes armés djihadistes », constate Bakary Sambe.

« Les Peuls sont une population marginalisée et laissée pour compte. Les élites politiques des pays comme le Burkina Faso ou le Mali se sont toujours méfiées de ces populations nomades difficilement contrôlables. Cette méfiance existait déjà chez les Français au moment de la période coloniale et les États centraux ont hérité de cette méfiance. L’État malien est quelques fois rentré dans une logique de dialogue avec les Touaregs. Cela n’a jamais été les cas avec les Peuls », constate l’universitaire. Au Burkina Faso, le gouvernement a encouragé la constitution de ces groupes d'autodéfense face aux groupes armés souvent assimilés à tort aux Peuls.

« Marginalisés, confrontés à l’armement d’autres communautés, le prédicateur peul Amadou Koufa, affilié à Al-Qaïda, a pu facilement et largement recruter au sein de sa communauté au profit de son groupe armé, la Katiba Macina en tenant un discours sur la marginalisation des Peuls », ajoute Bakary Sambé. Et c'est pour cela que, selon le chercheur, la résolution des conflits intercommunautaires dans la région des trois frontières est l'une des conditions de la fin de la violence. « Les groupes djihadistes se greffent sur ces conflits intercommunautaires », constate le chercheur. De fait, Le centre du Mali est pris dans un tourbillon de violences intercommunuataires depuis l'apparition en 2015 de ce groupe armé dans la région de Mopti.


Des accords similaires à ceux de janvier 2021 avaient déjà été signés il y a plus de deux ans mais ils n'avaient pas résisté à la poursuite des violences. Tiendront-ils cette fois-ci ?  Pour Bakary Sambé, la fin des violences intercommunautaires passe tout d’abord par une réforme des États malien ou burkinabé.

Selon l’universitaire Bakary Sambé, une partie des fonctionnaires, surtout au Mali, sont notamment perçus comme des prévaricateurs. « Des fonctionnaires et même des retraités de la fonction publique malienne n’hésitent pas à taxer, à extorquer les populations peules pour leur enrichissement personnel. Ce n’est pas pour rien que les Peuls évitent au Mali dans 20 pour cent des cas de faire appel à la justice du pays », décrit le chercheur. « Ces accords ont un aspect dilatoire. On cherche seulement à gagner du temps. On retarde la reprise de la violence », estime Bakary Sambe. La circulation des armes doit cesser et cette responsabilité incombe à l’État selon le chercheur. « Certaines communautés de Dogons parlent le peul et nombre de communautés réglaient leurs différends par des accords entre chefs coutumiers », rappelle l’universitaire Bakary Sambe.