Source : Sahel weather July & august 2024 

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Chad continues to face up to the terrorist onslaught, year in, year out. At the beginning of July, the Chadian army declared that it had carried out operations in the Lake Chad province, neutralizing more than 70 terrorists and destroying the largest Boko Haram base in the area. According to the army, this base contained five camps. Washington also provided the Chadian army with communications equipment. Harris radio chargers, multi-band Harris radios, small intelligence and field information tablets, as well as aircraft systems control and analysis equipment, were all donated by the US military.

Meanwhile, the country is facing major flooding. In the north of the country, in the Tibesti province, torrential rains "swept away thousands of stores and vehicles", reports Agence France Presse (AFP). The toll: at least 60 dead. The waters did not spare the capital N'Djaména. The torrential downpours damaged numerous public and private infrastructures, and rendered some main roads impassable.

At the same time, community dissension between farmers and breeders shows no sign of abating. Quite the contrary, in fact. The latest incident was in the sub-prefecture of Goré, in the Logone Oriental region of southern Chad. Six people were killed and four wounded in new violent clashes. Between 2021 and 2024, the NGO International Crisis Group recorded 1,230 deaths and more than 2,000 injuries, due to agro-pastoral violence in the south and center of the country. 

On the diplomatic front, N'Djaména and Tripoli are trying to mend fences, with the aim of strengthening cooperation between the two countries, which are linked by strong historical ties. With this in mind, discussions between the Chadian President and the head of Libya's national unity government focused on the reopening of their respective diplomatic representations, as well as the construction of frameworks for consultation on cross-border security issues.  In addition, the Chadian Ministry of Foreign Affairs reported that N'Djaména had repatriated, by special flight, 157 of its nationalsdetained in neighboring Libya, in partnership with the International Organization for Migration (IOM), the United Nations and the Libyan state.

On the other hand, two months after the presidential election, opposition politician Succès Masra has finally come out of his silence. During a live chat on social networks, the former prime minister was quick to castigate the outcome of the electoral process. "They were in the minority, but they had a weapon of destruction to try to stifle the majority (...) By violating laws, by refusing to make the results file available to candidates, by refusing to make copies of the minutes available, by preventing people from filming the minutes", he lamented. In this connection, the platform of opposition political parties known as GCAP (Groupe de concertation des partis politiques) has published a manifesto criticizing the texts on the new administrative and electoral boundaries. These texts have been denounced as "irregular and iniquitous" by the GCAP.

At the same time, the suspension of the main news media, Tchadinfos, prompted a number of reactions. The reason was "a complaint from Mr. Abakar Manany, former advisor to the Head of State, demanding the withdrawal of all articles concerning him, which Tchadinfos refused to do", reports the Chad Online Media Association (AMET). According to Tchadinfos managing director Mamadou Djimtebaye, the complainant, through his lawyers in South Africa, "contacted our hosting provider in the United States to suspend us". Subsequently, the media's editor-in-chief, Oumar Ali Badour, was arrested on August 7, detained by the intelligence services and then released 24 hours later.

Finally, a preliminary investigation into President Mahamat Idriss Déby Itno's suspected ill-gotten gains has been opened in France. This investigation follows revelations by the French media outlet Mediapart, which in November 2023 reported spending in excess of 900,000 euros on suits, shirts and luxury clothing. According to the investigation, these payments came from a mysterious company called MHK Full Business, registered in N'Djamena and with an account at the Banque Commerciale du Chari (BCC).

Source : Météo Sahel Juillet & Août 2024

Télécharger l'intégralité de la Météo Sahel

 

Le Tchad continue bon an, mal an, de faire face à la poussée terroriste. Début juillet, l’armée tchadienne a déclaré avoir mené des opérations dans la province du Lac Tchad, qui ont permis d’une part, de neutraliser plus de 70 terroristes et de détruire la plus importante base de Boko Haram dans la zone, d’autre part. Celle-ci renfermait cinq campements, à en croire l’armée. Par ailleurs, Washington a appuyé l’armée tchadienne en équipements de communication. Ainsi, chargeurs radio Harris, la radio Harris multi-bandes, petites table-lettes de renseignements et des informations de terrain, ainsi que des appareils de contrôle de systèmes et d'analyse des avions, ont été offerts par l’armée américaine.

Pendant ce temps, le pays doit faire face à de grandes inondations. En effet, au nord du pays dans la province de Tibesti, des pluies diluviennes « ont emporté des milliers de boutiques et de véhicules », informe l’Agence France Presse (AFP). Bilan : au moins 60 morts. Ces eaux n’ont pas épargné la capitale N’Djaména. Les averses torrentielles ont endommagé de nombreuses infrastructures publiques et privées, et ont rendu certaines routes principales impraticables.

Parallèlement, les dissensions communautaires entre agriculteurs et éleveurs, ne montrent pas de signe d’apaisement. Bien au contraire. Le dernier incident en date, est celui dans la sous-préfecture de Goré, dans la région du Logone Oriental au sud du Tchad. En effet, six personnes ont été tuées et quatre autres blessées dans de nouveaux violents affrontements. Entre 2021 et 2024, l’ONG International Crisis Group a recensé 1 230 morts et plus de 2 000 blessés, dus aux violences agropastorales dans le sud et le centre du pays.

Sur le plan diplomatique, N’Djaména et Tripoli essaient de recoller les pots cassés, dans l’objectif de raffermir la coopération entre ces deux pays, liés par de forts liens historiques. C’est dans cette optique que les discussions entre le président tchadien et le chef du gouvernement libyen d’union nationale, ont notamment porté sur la réouverture des représentations diplomatiques respectives, ainsi que la construction de cadres de concertation au sujet de la sécurité transfrontalière.  De plus, le ministère tchadien des Affaires étrangères a indiqué que N’Djaména avait rapatrié, par vol spécial, 157 de ses ressortissants détenus en Libye voisine, en partenariat avec l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) les Nations Unies et l'État libyen.

D’un autre côté, deux mois après la présidentielle, l’opposant Succès Masra est enfin sorti de son mutisme. Lors d’un live sur les réseaux sociaux, l’ancien premier ministre n’a pas manqué de fustiger le dénouement du processus électoral. « Ils étaient minoritaires, mais ils avaient une arme de destruction pour tenter d’étouffer ce peuple majoritaire (…) En violant des lois, en refusant de mettre à la disposition des candidats, le fichier des résultats, en refusant de mettre à disposition des copies des procès-verbaux, en empêchant les gens de filmer les procès-verbaux », a-t-il déploré. A ce propos, la plateforme des partis politiques de l’opposition dénommée « GCAP » (Groupe de concertation des partis politiques), a publié un manifeste, pour fustiger les textes sur le nouveau découpage administratif et électoral. Des textes dénoncés comme « irréguliers et iniques » par le GCAP.

Dans la même période, la suspension du principal média d’informations « Tchadinfos », a suscité moult réactions. Pour cause, « une plainte de monsieur Abakar Manany, ancien conseiller du chef de l’Etat, exigeant le retrait de tous les articles le concernant, ce que Tchadinfos a refusé », renseigne l’Association des médias en ligne du Tchad (AMET). Selon le directeur général de Tchadinfos, Mamadou Djimtebaye, le plaignant aurait « saisi à travers ses avocats en Afrique du Sud, notre hébergeur, qui se trouve aux Etats-Unis, pour nous suspendre ». Par la suite, le rédacteur en chef du média, Oumar Ali Badour, a été arrêté le 7 août, détenu par les services de renseignement, puis relâché 24 heures plus tard.

Enfin, une enquête préliminaire visant le président Mahamat Idriss Déby Itno pour des soupçons de biens mal acquis, a été ouverte en France. Cette instruction fait suite aux révélations du média français Mediapart, qui en novembre 2023, faisait état de dépenses s’élevant à plus de 900 000 euros pour l’achat de costumes, de chemises et de vêtements de luxe. Selon l’enquête, ces versements provenaient d’une mystérieuse société nommée MHK Full Business, enregistrée à N’Djamena et possédant un compte à la Banque commerciale du Chari (BCC).

Source : Sahel weather July & august 2024 

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To mark the first anniversary of the Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie's (CNSP) stewardship of the transitional government, the Prime Minister held a press briefing at his office on August 10 to take stock of the situation. For him, the union of the people around the CNSP is the greatest satisfaction to be noted at the end of this special year, because all the components of society have formed a shield around the nation. For him, managing current affairs and ensuring the smooth running of the country in all sectors, relying solely on his own forces, would be proof that Niger would not need any outside help. The Prime Minister also welcomed the departure of foreign armed forces from Niger and the resumption of cooperation between Niger and financial institutions. The solidarity of African and foreign countries such as China was also a great help when the embargo was imposed, he maintained.

However, on July 25, on the eve of the anniversary of the putsch, the management of the transitional government was criticized by human rights defenders. Indeed, Human Rights Watch, Amnesty International and the International Federation for Human Rights noted that "human rights are in freefall" in Niger, and called for the release of all political detainees and respect for fundamental freedoms, especially those of the media.

A week after this anniversary, the first technical reshuffle of the government team made news on August 17. The dismissal of the Minister of Petroleum, Barké Bako Mahaman Moustapha, for unknown reasons, gave rise to speculation. His replacement by Dr. Sahabi Oumarou is said to be part of a drive for reform and initiatives to optimize management of oil resources and improve energy policy.

In early July, an attack on a base of the Nigerien Defense and Security Forces (FDS) in Tahoua, positioned as part of Operation SHARA, resulted in the death of at least six soldiers. The information bulletin issued by the FAN (forces armées nigériennes) states that the riposte forced the enemy to retreat. An earlier communiqué, dated July 3, reported the arrest of around 100 terrorists in response to the deadly attack orchestrated ten days earlier by the Coalition of Armed Groups.

In the Mehana region, serious atrocities cost the lives of 14 civilians (on August 13), particularly in Gangania, Amara, Mamassey, Tchibi Bero, Tchibi Kaina and Bandabarey, localities close to the so-called three-border zone. The "lakal-Kaney" operation led to the arrest of two terrorists and the recovery of stolen cattle. Also in Torodi, in the Tillabéri region, a notorious criminal was arrested by the FDS following clashes with terrorists. In Dosso Kourégou, a village in the same region, seven civilians were killed by terrorists on motorcycles.

At Koutoukalé prison, inmates including terrorists escaped from the high-security prison with weapons following a mutiny on July 11. This event testifies to the fragility of security in the country, both inland and in border areas.

Caused by various factors such as conflict, climate change, economic instability and disease, food insecurity affecting 3.4 million people is the other threat facing Niger.

On the international front, the war between Ukraine and Russia seems to have invaded the Sahel. In Mali, Ukraine's support for armed groups to confront Wagner has led to unprecedented diplomatic crises. In response, Niger, a member of the Alliance of Sahel States, announced that it was severing diplomatic relations with Ukraine with immediate effect.

Generally speaking, the security situation has deteriorated considerably with the Transitional Government celebrating its anniversary at the helm of Niger, in a context where "the number of jihadist attacks has increased", demonstrating that the problem of insecurity is far from over. The withdrawal of American troops, a pillar of the fight against insurgents in the Sahel region, has probably had an effect on control of this area.

Source : Météo Sahel Juillet & Août 2024

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 À l’occasion du premier anniversaire de la gestion du Gouvernement de transition par le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP), le premier ministre a tenu un point de presse le 10 août à son cabinet pour faire le bilan. Pour lui, l’union du peuple autour du CNSP est la plus grande satisfaction à noter au sortir de cette année spéciale, car toutes les composantes de la société se sont constituées en bouclier autour de la nation. Pour lui, gérer les affaires courantes et s’assurer du bon fonctionnement du pays dans tous les secteurs, en ne comptant que sur ses propres forces, serait la preuve que le Niger n’aurait besoin d’aucune aide extérieure. D’ailleurs, le premier ministre s’est également félicité du départ des forces armées étrangères du sol nigérien et la reprise de la coopération entre le Niger et les institutions financières. La solidarité des pays africains et ceux étrangers comme la Chine a été aussi d’un grand soutien lors de l’imposition de l’embargo, soutient-il.

Cependant, le 25 juillet, à la veille de l’anniversaire du putsch, la gestion du Gouvernement de transition est critiquée par les défenseurs des droits de humains. En effet, Human Rights Watch, Amnesty internationale et la Fédération internationale pour les droits humains, constatent « les droits humains en chute libre » au Niger et demandent la libération de tous les détenus politiques et le respect des libertés fondamentales, celles des médias surtout.

Une semaine après cet anniversaire, c’est le premier remaniement technique de l'équipe gouvernementale qui fait actualitéle 17 août. En effet, le limogeage du ministre du pétrole, Barké Bako Mahaman Moustapha, sans raisons connues, a donné lieu à diverses spéculations. Son remplacement par le Dr. Sahabi Oumarou, s’inscrirait dans une volonté de réformes et d’initiatives pour une gestion optimale des ressources pétrolières et une meilleure politique énergétique.

En début juillet, au nord-ouest du Niger, l’attaque d’une base des forces de défense et de sécurité (FDS) nigériennes positionnée dans le cadre de l’opération SHARA, à Tahoua, a causé la mort d’au moins six militaires. Le bulletin d’information diffusé par les FAN (forces armées nigériennes) précise que la riposte a poussé l’ennemi à se replier. Un précédent communiqué à la date du 3 juillet, informait de l’arrestation d’une centaine de terroristes en réaction à l’attaque meurtrière orchestrée dix jours avant par la Coalition des groupes armées.

Dans la région de Méhana, de graves exactions ont couté la vie à 14 civils (le 13 août), particulièrement à Gangania, Amara, Mamassey, Tchibi Bero, Tchibi Kaina, et Bandabarey, des localités proches de la zone dite des trois frontières. L’opération « lakal-Kaney » a permis d’arrêter deux terroristes et de récupérer du bétail volé. À Torodi également, dans la région de Tillabéri, un criminel notoire fut arrêté par les FDS à la suite d’affrontements contre des terroristes. À Dosso Kourégou, un village de cette région, sept civils ont trouvé la mort dans l’attaque de terroristes à moto.

À la prison de Koutoukalé, des détenus dont des terroristes se sont échappés de la prison de haute sécurité avec des armes suite à une mutinerie le 11 juillet. Cet événement peut témoigner de la fragilité de la sécurité dans ce pays, à l’intérieur comme dans les zones frontalières.

Causée par divers facteurs tels que les conflits, les changements climatiques, l’instabilité économique et les maladies, l’insécurité alimentaire qui touche 3,4 millions de personnes est l’autre menace qui pèse sur le Niger.

Sur le plan international, la guerre entre l’Ukraine et la Russie semble s’être invitée au Sahel. Au Mali, le soutien de l’Ukraine à des groupes armés pour affronter Wagner, est à l’origine de crises diplomatiques sans précédent. En réaction, le Niger, membre de l’Alliance des États du Sahel, a annoncé la rupture, avec effet immédiat, de ses relations diplomatiques avec l’Ukraine.

D’une manière générale, la situation sécuritaire s’est considérablement détériorée avec le Gouvernement de transition qui fête son anniversaire à la tête du Niger dans un contexte où « le nombre d'attaques djihadistes a augmenté », démontrant que le problème d’insécurité est loin de connaître son épilogue. Le retrait des troupes américaines, un pilier de la lutte contre les insurgés dans la région du Sahel, a probablement eu des effets sur le contrôle de cet espace.

 

 

Timbuktu Institute - September 2024

(Download the full Report at the bottom of the article)

Studies on youth radicalization and violent extremism have multiplied in recent years, particularly in the Sahelian region with the resurgence of the terrorist phenomenon as a threat to peace and stability. Originally perceived as the antechamber to a shift towards terrorist violence, successive approaches have been enriched by the diversity of experiences in different countries, leading experts to analyze radicalization as the result of a process, factors or consequences that are political, economic, social, ideological, etc.,

This radicalization is thus described as manifesting itself in the use of violence as a means of affirmation, expression or vindication of the most diverse kinds. But the study of radicalization soon fell victim, on the one hand, to the popularity of a “perfect subject” for media sensationalism, surfing on the spectacular character of terrorist attacks that tended to spill over from the Sahelian epicenter into previously unsuspected zones such as the Gulf of Guinea. On the other hand, the diversity of experiences and the speed of change have led to a multiplication of approaches, often reflecting the preoccupations that experts project onto the phenomenon, which in most cases ends up no longer being studied in its own right. Finally, the specializations of analysts who used to focus on subjects such as governance, crime or urban violence have rubbed off on many studies, deliberately denying the phenomenon its ideological or intercommunity dimensions, etc., for example.

Thus, the predominance of criminological approaches to the point of inducing states in the region to adopt strictly security-oriented approaches has increased, with analyses focusing more often than not on actors in the “second circle”, such as traffickers, logistical assistance couriers and so on. Meanwhile, these studies neglect the actors of the first and third circles. The first circle is made up of ideological/community entrepreneurs whose role is fundamental in recruiting, inciting and instrumentalizing grievances. The third circle, often inaccessible to criminological studies, is that of actors predisposed to extremist violence, or who may ideologically prepare for it. Most often, they interview them in prison or in situations of “remorse”, where numerous biases distort the analysis of real or initial motivations.

What's more, the tools of the criminological approach are often ill-suited to the subtleties of extremist discourse, with its ideological charge and references requiring deciphering, even exegesis, often beyond the reach of experts lacking the key concepts needed to understand symbols, allusions and language codes.

It is often after the act has been committed that many analysts who deny the ideological dimension gain access to the subjects in question, either in prison or in a situation where the security environment, prison pressure or even criminal actors weigh heavily, thus accentuating the criminological bias despite documentation efforts.

This criminological bias, which has had its full effect on the approach to the phenomenon of radicalization in the Sahel, has not spared certain studies following the spillover of the epicenter of extremist violence to the countries of the Gulf of Guinea. Many of them suffer from the lack of renewal of conceptual tools, as well as the rush to “document” a multidimensional and often diffuse phenomenon in contexts where the gaze is oriented by realities elsewhere.

Moreover, in the face of security and political pressure to develop responses, many analysts must have overlooked the paradigmatic turning point of the accentuation of the communalization of extremist violence, concomitant with the first visible phases of the spillover of the epicenter of terrorism from the central Sahel to the coastal countries of West Africa.

Thus, in the case of certain coastal countries, political responses strongly inspired by conclusions drawn from the criminological approach seem not to have learned from the mistakes of the Sahel, naturally turning towards security-dominated solutions, sometimes even reducing the extremist phenomenon to a “simple” criminal problem. Whereas criminality is not in itself the root of evil, but rather one of its symptoms.

In Benin's case, several studies point to its geographical proximity to Sahelian countries, which are victims of insurgency by armed terrorist groups, porous borders, the weak presence of the State in certain regions, community conflicts, youth unemployment, corruption, injustice, social inequalities and many other factors. Despite the measures, efforts and mechanisms implemented by the State to counter this advance, the security situation is gradually deteriorating in the Alibori and Atacora departments. Since the first terrorist incident in 2019, the number of terrorist attacks on Beninese soil, particularly in the septentrion, has been on the rise, with a growing number of deaths, injuries and displaced persons.

Using a comprehensive approach based on the perceptions of local populations, Timbuktu Institute  - African Center for Peace Studies took advantage of several field missions in the departments of Donga, Alibori and Atacora to conduct qualitative interviews with 270 young people living in the various localities and communes. In addition to these individual interviews, a dozen focus groups were organized on site.

In order to avoid “one shot” interviews, we adopted an approach based on continuous observation over a long period of time. In order to mitigate against approaches based on a chronology of security incidents, or which confine such a complex issue to a criminological “straitjacket”, this study aims to probe factors and question local perceptions in a comprehensive approach. The testimonies and responses gathered throughout the survey, and on which the analyses in this report are based, are the result of extensive fieldwork over the period from March - May 2023 to June 2024, directed on site by Dr. Bakary Sambe.

This study, the first in a series on Benin, is intended to contribute to a better understanding of the phenomenon, leading to conclusions and recommendations that can support the initiatives and solutions put in place by the State, its partners and above all local communities, who are at the heart of this reflection.

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Timbuktu Institute – Septembre 2024

(Télécharger l’intégralité du Rapport en bas de l’article)

Les études sur la radicalisation des jeunes et l’extrémisme violent se sont multipliées ces dernières années, notamment, dans la région sahélienne avec la recrudescence du phénomène terroriste en tant que menace à la paix et la stabilité des États de la région. De phénomène perçu, à l’origine, comme l’antichambre du basculement vers la violence terroriste, les approches successives se sont enrichies de la diversité des expériences, selon les pays, qui a poussé les experts à analyser la radialisation comme la résultante d’un processus, de facteurs ou de conséquences politiques, économiques, sociales, idéologiques etc.

Cette radicalisation est, ainsi, décrite, comme se manifestant par l’usage de la violence comme moyens d’affirmation, d’expression ou de revendication les plus diverses. Mais, très vite, l’étude du phénomène de radicalisation va être victime, d’une part, de la popularité d’un « sujet parfait » pour le sensationnel médiatique, surfant sur le caractère spectaculaire des attaques terroristes qui tendent à déborder de l’épicentre sahélien vers des zones jadis insoupçonnés comme le golfe de Guinée. De l’autre, la diversité des expériences et la rapidité des mutations ont eu comme corollaire, la multiplication des angles d’approches souvent empreintes des préoccupations que des experts projettent sur le phénomène qui finit, dans la plupart des cas, par ne plus être étudié en soi. Enfin, les spécialisations d’analystes qui naguère étaient focalisés sur des sujets comme la gouvernance, la criminalité ou encore les violences urbaines ont déteint sur de nombreuses études allant, par exemple, jusqu’à dénier, délibérément, au phénomène ses dimensions idéologique ou encore intercommunautaire etc.

Ainsi, la prédominance des approches criminologiques au point d’induire des États de la région vers des approches strictement sécuritaires s’est accentuée avec des analyses s’intéressant le plus souvent aux acteurs du « second cercle » tels que les trafiquants, les convoyeurs d’assistance logistique etc. Pendant ce temps, ces études négligent les acteurs du premier et du troisième cercle. Le premier cercle est constitué des entrepreneurs idéologiques/communautaires dont le rôle est fondamental dans le recrutement, l’incitation et l’instrumentalisation des griefs. Le troisième cercle auquel les études à dominante criminologique n’ont souvent pas accès est celui des acteurs prédisposés au basculement dans la violence extrémiste ou pouvant y préparer idéologiquement. Le plus souvent, c’est dans l’univers carcéral qu’ils les interrogent ou dans des situations de « remords » où de nombreux biais viennent fausser l’analyse sur les motivations réelles ou celles de départ.

Il s’y ajoute que les outils de l’approche criminologique ne sont souvent pas adaptés pour rendre compte des subtilités du discours extrémiste avec sa charge idéologique et ses références qui nécessitent un décryptage voire une exégèse souvent hors de portée d’experts démunis des concepts-clés permettant une intelligence des symboles, des allusions et des codes langagiers.

C’est, souvent, après le passage à l’acte que beaucoup d’analystes niant la dimension idéologique accèdent aux sujets en question soit en prison ou dans une situation sur laquelle pèse lourdement l’environnement sécuritaire, la pression carcérale ou même des acteurs de la criminalité accentuant ainsi le biais criminologique malgré les efforts de documentation.

Ce biais criminologique ayant eu tout son effet sur l’approche du phénomène de la radicalisation au Sahel n’a pas épargné certaines études suite au débordement de l’épicentre de la violence extrémiste vers les pays du Golfe de Guinée. Beaucoup d’entre-elles souffrent du non renouvellement des outils conceptuels de même que l’empressement à « documenter » un phénomène multidimensionnel et souvent diffus dans des contextes où on projette un regard orienté par les réalités d’ailleurs.

De plus, face à la pression sécuritaire et politique pour l’élaboration de réponses, il a dû échapper à nombre d’analystes, le tournant paradigmatique de l’accentuation de la communautarisation de la violence extrémiste concomitante aux premières phases visibles du débordement de l’épicentre du terrorisme du Sahel central vers les pays côtiers d’Afrique de l’Ouest.

C’est ainsi que, dans le cas de certains pays côtiers, les réponses politiques fortement inspirées par des conclusions issues de de l’approche criminologique semblent ne pas apprendre des erreurs du Sahel, en s’orientant naturellement vers des solutions à dominante sécuritaire, réduisant, même parfois le phénomène extrémiste à un « simple » problème criminel. Alors que la criminalité n’est pas en soit la racine du mal mais un des symptômes entre autres.

Pour le cas du Bénin, plusieurs études font état de sa proximité géographique avec les pays sahéliens victimes de l’insurrection des groupes armés terroriste, la porosité des frontières, la faible présence de l’État dans certaines régions, les conflits communautaires, le chômage des jeunes, la corruption, l’injustice, les inégalités sociales et bien d’autres facteurs. Malgré les dispositions, les efforts et les mécanismes mis en œuvre par l’État pour contrer cette avancée, la situation sécuritaire se dégrade progressivement dans les départements de l’Alibori et de l’Atacora. Ainsi, depuis la première attaque terroriste enregistré en 2019, le nombre d’incidents terroristes sur le sol béninois notamment dans le septentrion est en hausse avec un nombre de morts croissant, de blessés et de déplacés.

S’inscrivant dans une démarche compréhensive et à partir de la perception des populations locales, Timbuktu Institute a mis à profit plusieurs missions de terrains dans les départements de la Donga, de l’Alibori et de l’Atacora afin de conduire des entretiens qualitatifs auprès de 270 jeunes habitant les différentes localités et communes. En plus de ces entretiens individuels, une dizaine de focus groups ont été organisés sur site. Afin d’éviter des interviews « one shot » nous avons adopté la démarche consistant à faire de l’observation continue sur le temps long. Ainsi, pour mitiger les approches basées sur une chronologie des incidents sécuritaires ou encore enfermant une problématique aussi complexe dans le carcan criminologique, cette étude vise à sonder les facteurs et à interroger les perceptions locales dans une démarche compréhensive. Les témoignages et réponses recueillis tout au long de l’enquête et sur lesquelles se fondent les analyses de ce rapport sont issus d’un travail de terrain étendu sur la période de Mars – Mai 2023 à juin 2024[1] dirigé, sur place, par Dr. Bakary Sambe.

Cette étude, première d’une série sur le Bénin, se veut une contribution à une meilleure compréhension du phénomène à même d’aboutir à des conclusions et recommandations pouvant accompagner les initiatives et solutions mises en place aussi bien par l’État, ses partenaires mais surtout les communautés locales qui sont au cœur de cette réflexion.

Télécharger l’intégralité du Rapport

[1] - Le rapport étant construit essentiellement sur des entretiens qualitatifs individuels et divers témoignages lors des focus group avec les jeunes des trois départements, nous signalerons à chaque fois, dans le corps du texte, l’identité minimale et la zone exacte (commune, arrondissement, village) où à défaut, selon la sensibilité du témoignage, le département où habite l’interlocuteurs. Les dates se situent dans la période allant de Mars- Mai 2023 à Juin 2024.

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