Sacré-Coeur 3 – BP 15177 CP 10700 Dakar Fann – SENEGAL.
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La France et le G5 Sahel se réunissent pour la première fois depuis que Paris a annoncé la réduction de sa présence militaire dans la région.
Outre la fin prochaine de l'opération Barkhane, il est question de fermer les bases militaires et de réarticuler de la lutte antiterroriste autour d'une "alliance internationale".
Covid oblige, le président français s'entretiendra à distance avec ses homologues du G5 (Mauritanie, Tchad, Mali, Burkina, Niger) pour évoquer ce processus. Seul le président nigérien Mohamed Bazoum se trouvera à Paris.
Selon un haut responsable au secrétariat du G5 Sahel, "la redéfinition de l’opération Barkhane" sera au cœur des débats.
Les commandos d'élite de la task force française "Sabre" devraient pour leur part être maintenus pour poursuivre la traque des chefs terroristes.
Retour sur ce sommet entre la France et les pays du G5 Sahel sur la reconfiguration de la lutte antiterroriste dans la région avec Bakary Sambe directeur du "Timbuktu Institute" de Dakar.
Dans le cadre du partenariat entre Timbuktu Institute et Medi1TV la chronique L'hebdo Africain co-produit depuis Dakar revient sur le rôle des diaspora africaines pour relever les défis liés au Développement du continent.
Timbuktu Institute à invité Djiby Ndiaye, Directeur de la Société Africaine d'informatique.
On sait que la révolution numérique a replacé les diaspora africaines des pays développés au cœur des débats économiques de leurs sociétés d'origine. Mais quel a été leur apport concret pour ce qui est du transfert des technologies par exemple ?
De même, on dit souvent que les diaspora africaines en Europe et en Amérique du Nord constituent un pont et un atout pour combler le gap vers le développement. Comment s'est accélérée ces dernières années cette vague de retour massif pour contribuer à l'essor du continent ? Finalement peut on continuer à parler encorr de fuite des cerveaux à l'heure de la mondialisation et de la réduction de l'espace ? Comment s'opère cette mutation du global à l'agir local tel que le montre certains parcours comme le vôtre ?
A travers son expérience d'expatriation et de retour, Djiby Ndiaye répond à ces questions.
Timbuktu Institute « African Center for Peace Studies » a organisé le mercredi, 30 juin 2021 en collaboration avec le Programme pour la promotion de l’Etat de droit en Afrique subsaharienne de la Fondation Konrad Adenauer, un colloque régional sur « la judiciarisation de la lutte contre le terrorisme au Sahel : défis et limites » premier du genre dans la sous-région.
La cérémonie d’ouverture était placée sous la présidence de Mamoudou Kassogué, ministre de la Justice et des Droits de L’homme, Garde des Sceaux. Il avait ses côtés Dr. Bakary Sambe, Directeur de Timbuktu Institute, M. Ingo Badoreck, Directeur de la Fondation Konrad Adenauer en présence des experts venus du Niger, du Sénégal, de la Mauritanie, du Burkina Faso et du Mali.
Pour le Directeur du Timbuktu Institute dont le Bureau Mali & Sahel a été inauguré en mars dernier à Bamako, « l’objectif de ce colloque régional est de créer un cadre d’échanges pour exposer et comprendre les véritables défis et limites qui freinent les efforts de judiciarisation de la lutte contre le terrorisme dans la perspective d’une meilleure harmonisation des cadres légaux et des stratégies prenant en compte aussi bien les impératifs sécuritaires que le respect des droits humains ».
Pour le Directeur de la Fondation Konrad Adenauer, la lutte contre le terrorisme est généralement axée sur la répression presque partout à travers le monde au détriment de la prévention et du jugement des auteurs auprès des cours et tribunaux.
Selon le rapport sur la problématique du respect des normes internationales des droits de l’homme dans le cadre de la lutte contre le terrorisme au Mali de l’Institut d’études et de sécurité « il y’a une prévalence de l’approche militaire dans le contexte de lutte contre le terrorisme ». Les organisations de défense des droits de l’Homme comme Amnesty International ont également dénoncé « d’atteintes aux droits humains, des exactions perpétrées par des groupes armés et des groupes djihadistes » dans le nord du pays, que l’État burkinabé s’est engagé à élucider, explique M. Ingo Badoreck.
Dans le discours d’ouverture des travaux, le ministre Kassogué a fait savoir que la thématique qui est abordée par ce colloque est d’une importance et d’une pertinence que nul ne saurait mettre en doute, pour diverses raisons. ‘’Malgré les conséquences dramatiques et particulièrement douloureuses du terrorisme pour les populations, les Etats ne sauraient méconnaitre les règles élémentaires de respect des droits de l’Homme et de droits humanitaires dans le cadre des réponses militaires qui s’avèrent indispensables’’, a ajouté le ministre de la Justice et des Droits de L’homme, Garde des Sceaux.
Par ailleurs, il a fait un plaidoyer, sans détours, sur l’un des points essentiels pour la judiciarisation de la lutte contre le terrorisme. Il s’agit de la coopération judiciaire internationale. Si la lutte contre le phénomène, à l’échelle d’un Etat, a des limites, poursuit M. Kassogué, en termes de moyens d’actions et de barrières frontalières, celle pouvant être engagée à l’échelle de deux ou plusieurs Etats nécessite une coopération dont les formes de manifestation évoluent au gré des intérêts, souvent en violation des règles découlant de conventions internationales.
Bréhima DIALLO
Source: Maliweb
Premier colloque régional "Judiciarisation de la lutte contre le terrorisme au Sahel : Défis et Limites "
L'hebdo africain s'intéresse aujourd'hui à l'image de l'Afrique au narratif sur le continent avec Dr. Cheikh Gueye, du ENDA Tiers Monde, coordonnateur du rapport alternatif sur l'Afrique.
Les observateurs constatent que l’intervention militaire a été, jusqu’ici, privilégiée par nombre d’États avec des approches strictement militaires négligent la dimension préventive dans le cadre d’une approche holistique. Dans le cadre de son action en faveur de « solutions alternatives pour la stabilisation et la réconciliation au Mali et au Sahel », Timbuktu Institute en partenariat avec le Bureau Etat de droit de la Fondation Konrad Adenauer a choisi Bamako pour la tenue du premier colloque régional sur les enjeux de la judiciarisation de la lutte contre le terrorisme.
Pour le Directeur du Timbuktu Institute dont le Bureau Mali & Sahel a été inauguré en mars dernier à Bamako, « l’objectif de ce colloque régional qui se tiendra à l’Hôtel Azalaï Salam, est de créer un cadre d’échanges pour exposer et comprendre les véritables défis et limites qui freinent les efforts de judiciarisation de la lutte contre le terrorisme dans la perspective d’une meilleure harmonisation des cadres légaux et des stratégies prenant en compte aussi bien les impératifs sécuritaires que le respect des droits humains ».
D’après le comité d’organisation, ce premier Colloque régional vient en son heure, avec « l’urgence de judiciarisation de la lutte antiterroriste qui a plongé́ les praticiens du droit dans une situation de réadaptation continue alors que, pour beaucoup de pays, les dispositions encadrant la lutte contre le terrorisme sont loin d’être fixées.
Selon Bakary Sambe, « dans l’un ou l’autre des cas, la justice qui a un rôle incontournable à jouer dans cette lutte, se trouve quelques fois confrontée à des difficultés d’ordre conceptuel, de compréhension des enjeux mais surtout d’interaction entre la chaîne pénale et d’autres acteurs dont, principalement, les défenseurs des droits humains »
Le colloque verra la participation d’experts, de praticiens du droit et de divers acteurs de la chaîne pénale de même que des organisations de défense des droits humains venus du Burkina Faso, du Niger, de la Mauritanie et du Sénégal entre autres.
Synthèse Par Léonor Weyerstahl (Stagiaire)
(Télécharger le rapport intégral en bas de l’article)
Le Sénégal s’est illustré comme modèle de résilience aux problèmes de sécurité dans le Sahel. Cela n’est pourtant pas généralisable à l’ensemble de ses régions, pour certaines excentrées de leurs capitales. C’est notamment le cas des régions frontalières comme Kédougou, située au Sud-Est du Sénégal et voisine de la République de Guinée et du Mali. Les défis auxquels est soumise cette région riche en culture Bassari et en minéraux sont particuliers à la transnationalité des acteurs en jeu. En proie à d’importants flux migratoires générés par la recherche de l’or, la frontière entre ces pays pose des défis socio-sécuritaires entre activités illégales (prostitution, exploitation infantile) et menace terroriste. En effet, depuis l’appel transnational au djihad lancé par le chef de la Katiba Macina aux peuls du Sahel qui a pour but de rallier les pays côtiers, le nombre d’arrestations en zone militaire 4 a augmenté. Cela s’accompagne d’une intensification des contrôles de police indiquant une prise de conscience politique de la réalité des menaces ainsi qu’une volonté de préparation.
Grâce à une approche trilogique mixte quantitative-qualitative-participative réalisée avec des questionnaires, des entretiens et la création des focus groups, l’équipe de recherche a pu évaluer les capacités de résilience de la zone frontalière de Kédougou et d’en déduire des recommandations stratégiques de prévention des conflits.
Selon les analyses alarmistes sur la région de Kédougou, cette dernière est propice aux tensions de par sa frontalité avec un pays en crise sécuritaire et politique, le Mali. La porosité des frontières laissant facilitant la circulation des chercheurs d’or, représente un danger potentiel pour les kédovins. Cependant, ces derniers ne voient pas la situation d’un même œil : ils identifient leurs relations avec ces étrangers orpailleurs comme bonnes malgré le différend que peut créer la religion. En effet, la recherche de l’or est qualifiée de diabolique et non conforme par les chefs religieux de l’islam puisque l’or est la propriété du démon.
Le vivre-ensemble est un idéal kédovin, un peuple dont la majorité se targue d’un esprit de solidarité. Cela peut être expliqué par les initiatives mises en place pour le maintien d’un climat social calme telle que la pratique de la Tripartite qui est une forme d’intégration régionale. Cette initiative des années 1970 se traduit en une semaine d’activités culturelles dans les régions voisines de Guinée, du Mali et du Sénégal dans l’objectif de créer un dialogue et de gérer d’éventuelles tensions. L’ambiance sociale régnante est également aidée par certaines pratiques sociales (des codes de langage et les mariages mixtes) qui assurent un respect de l’autre. Finalement, l’histoire commune entre ces populations qui, auparavant, appartenaient toutes à l’Empire du Mali et plus tard à la Fédération du Mali renforce leur solidarité.
D’après les réponses au questionnaire, trois quarts des kédovins voient la frontière comme un avantage, notamment pour le commerce et la satisfaction de leurs besoins. On observe ici une inversion du paradigme de la frontalité comme synonyme de frustration. Cela s’exprime dans les initiatives gouvernementales cherchant à améliorer les conditions de vie des citoyens. Pour ce qui est du quart restant d’insatisfaits, ils expliquent leur sentiment par leur lien à la capitale, le banditisme répandu et les tensions entre autochtones et étrangers. Une certaine méfiance subsiste à cause de la peur d’appropriation culturelle et d’imposition de culture étrangère en retour. On peut cependant en déduire que les kédovins ressentent en général un sentiment de sécurité au vu de la satisfaction de leurs besoins, d’autant plus qu’ils apprécient aussi le travail des forces de défense et de sécurité contribuant à la surveillance de la frontière.
Les principales sources d’insécurité de la région pointées du doigt par les populations sont les trafics majoritairement d’origine étrangère, les vols à main armée et l’orpaillage d’étrangers. Alors que seuls 15% des répondants identifient un sentiment de menace général les trafics illicites explosent au point d’engager la société civile, les autorités sénégalaises et la communauté internationale. Un hiatus se forme entre la réalité d’insécurité et l’absence de prise de conscience de la population voire une banalisation de la situation de crise sécuritaire. De plus, les relations avec les sociétés minières ne sont pas constamment paisibles avec la multiplication des différends. La population de Kédougou est donc peu au fait des enjeux sécuritaires auxquels elle est soumise. Il est évident qu’une menace terroriste importante les entoure au vu de leur proximité avec le Mali. Néanmoins, environ 96% d’entre eux n’a aucune connaissance de groupes terroristes avoisinants et nombreux sont ceux qui en déclinent l’éventualité. Ainsi, il est nécessaire d’engager une campagne de sensibilisation sur le sujet notamment auprès des jeunes qui risquent l’endoctrinement basé sur leur ignorance.
La principale cause de radicalisation des jeunes est la frustration socioéconomique à laquelle les habitants de la zone frontalière de Kédougou ne font pas exception. L’enquête a permis de déterminer les potentielles causes de précarité et les déficits d’infrastructure et de formation professionnelle entraînant la région dans une dynamique de marginalisation.
La population kédovine estime majoritairement que sa région est riche (67% des répondant ayant répondu par l’affirmative à la question). En effet, Kédougou se distingue du reste du Sénégal de par sa richesse minière notamment en or, un secteur important de l’économie d’exportation sénégalaise ; mais aussi par sa pluviométrie d’exception. Malgré cela, elle reste l’une des régions les plus touchées par le chômage dans le pays. Cela permet de comprendre la frustration de certains, qui ne manquent pas de noter l’absence d’infrastructures. Il y existe véritablement deux causes de la précarité des habitants identifiées lors des entretiens qualitatifs : le manque de main d’œuvre qualifiée comparée à la demande et les défis de gouvernance. Il est vrai que les structures de formations sont nombreuses, entre le lycée technique industriel et minier, le programme de formation école entreprise et les multiples initiatives des partenaires internationaux. Mais les préoccupations survivent à cause du décrochage scolaire. De ce fait, les répondants considèrent que la couche sociale la plus impactée par les difficultés économiques est celle des jeunes, très vite confrontés à la pauvreté, au chômage et parfois même à l’exclusion. Ainsi, il est nécessaire de rediriger cette jeunesse vers des structures efficientes de formation et de prise en charge dont elle ignore encore l’existence. Pour cela, les kédovins interpellent l’État et les autorités locales qu’ils identifient comme responsables du lien entre richesse des sols et situation économique.
Comme nous l’avons exprimé plus tôt, la région de Kédougou connaît une pluviométrie importante avec une période hivernale de six mois ce qui représente un avantage considérable pour l’agriculture. Malheureusement, le relief accidenté mène à un délaissement de ce secteur qui pourtant, pourrait pallier le chômage des jeunes. Alors que la majorité des habitants détiennent des terrains, seule la moitié d’entre eux en font un usage agricole. D’après un rapport de l’ANSD, les jeunes délaissent l’agriculture au profit de l’orpaillage malgré les projets publics et privés cherchant à les stimuler. Ce délaissement malgré l’importance de l’agriculture pour la sécurité alimentaire, peut s’expliquer par le besoin de modernisation industrielle exprimé dans les entretiens et en tenant compte des défis environnementaux (déforestation, pollution, présence de produits chimiques venant des mines).
L’une des problématiques majeures que connaît le Sénégal et d’autres pays en développement est l’accès difficile aux Services Sociaux de Base (SSB) tels qu’ils ont été reconnus comme cause structurelle de la lutte contre la pauvreté par les Nations Unies. Malgré les efforts éducatifs d’augmentation du nombre d’écoles et les stratégies mises en place contre le décrochage scolaire, la question de la formation professionnelle dans la zone minière reste inchangée. La carence de structures efficaces pour prendre en charge ce défi passe sous le nez des habitants, qui ont besoin d’une sensibilisation avancée et de plus d’information. En conséquence, si on ajoute à cela des facteurs tels que les frustrations socio-économiques des jeunes, le rejet des politiques et l’adhésion à l’idéologie djihadiste, il existe un risque grandissant d’engagement dans un groupe violent pour ces derniers (même si des agences comme l’ARD restent positives quant à l’efficacité des actions de l’État).
III. Vivre en zone frontalière : avantage ou inconvénients ?
Les zones frontalières sont de potentiels foyers de tensions et de conflits. La porosité des frontières facilite un échange culturel mais aussi les trafics illicites menaçant la sécurité des habitants. De ce fait, les avis sont partagés sur l’avantage que représente la transfrontalité de Kédougou, qui est à la fois une richesse et un danger (de terrorisme, de conflits et de la COVID).
La région de Kédougou partageant sa frontière avec le Mali, des migrations quotidiennes ont lieu entre ce pays et le Sénégal. Les populations de nationalité différente mais voisines sont appelées à vivre ensemble mais grâce à leur histoire commune d’appartenance à la fédération du Mali (ce qui se symbolise dans leurs devises nationales similaires), il est normal qu’elles jugent leurs relations comme bonnes.
Alors que la crise sécuritaire au Mali inquiète la communauté internationale et les États du Sahel, la majorité des répondants à l’enquête ne se sentent pas concernés par cette menace. C’est un taux inquiétant vu le rôle de pivot que tient Kédougou sur la situation. Sa proximité géographique avec le Mali explique la mise en place de système sécurisants (des postes frontaliers et la présence de l’armée) ainsi que la crainte de ceux qui se sentent concernés. Ce sont surtout les femmes qui appartiennent à cette dernière catégorie, qui citent comme causes la proximité, les migrations et l’insécurité grandissante de la région. Malgré ce sentiment, il semble que beaucoup hésitent à s’inquiéter réellement du contexte au Mali.
Au moment où l’ONU déclare que la situation d’insécurité au Sahel est une menace pour tous les pays, près de la moitié des habitants de Kédougou disent ne pas savoir si le Mali représente un danger pour le Sénégal. Pourtant, la frontière représente la cause première de menace puisqu’un débordement peut aisément déstabiliser les communautés voisines.
L’insécurité et la menace pressante du Mali peut aboutir à de fortes crises par effet domino (selon le Dr. Bakary Sambe). Malgré ce contexte dont les sénégalais devraient s’inquiéter, près de la moitié des jeunes kédovins disent ne même pas savoir de quoi cette crise s’agit. Rappelons aussi qu’ils ne semblaient pas être au courant d’éventuelles actions de groupes terroristes et criminels. Cette population jeune qui apparaît comme inconsciente du contexte géopolitique du Sahel tarde à comprendre et donc à adhérer à la crainte de la communauté internationale d’une reproduction de la situation malienne au Sénégal.
Un rapport de l’ANSD en 2018 montre une part égale de sénégalais et de maliens dans les mines d’or de Kédougou, illustrant la diversité de la région. Mais cette cohabitation souffre de tensions entre étrangers et population locale mais aussi entre étrangers eux-mêmes. De ce fait, les habitants sont mitigés quant à l’accueil d’orpailleurs étrangers sur leur territoire.
Malgré les obstacles qui ont été cités, Kédougou conserve une image de zone résiliente aux crises de la zone Mali – Guinée - Sénégal. Cela s’explique par l’association de divers acteurs, à la fois administratifs et représentants culturels en passant par les femmes et les jeunes trop souvent exclus de ces dynamiques. Les kédovins sont un bel exemple de cohésion sociale malgré les tensions dues à l’orpaillage et à la proximité au Mali.
D’après les réponses au questionnaire, trois quarts des kédovins estiment que la culture et la tradition ont un rôle à jouer dans la cohésion sociale de la région. Il est vrai que la tradition participe activement à la cohésion et au raffermissement des liens sociaux entre les populations voisines. C’est notamment l’objectif de deux évènements que sont le Festival des minorités ethniques et l’organisation de la Tripartite, permettant le mélange et la démonstration culturelle de chaque communauté pour les autres. Il est donc naturel d’en déduire que variété de cultures n’est pas antonyme de solidarité et paix.
Les deux classes sociales des jeunes et des femmes sont considérées comme particulièrement vulnérables. Pourtant, les sociétés Bassari sont souvent matriarcales. Cela se retrouve dans les réponses des kédovins dont 84% accordent une forte confiance aux femmes quant à la consolidation de la paix. Elles sont donc désignées comme actrices de la paix et de la cohésion sociale. Il est dommage qu’elles ne se fassent pas autant confiance au regard du nombre important de femmes dubitatives quant au rôle important qu’elles peuvent jouer dans la consolidation de la paix, mais cela permet d’exposer les multiples obstacles auxquels elles font face. Parmi ceux-ci on compte surtout les défis culturels et religieux (souvent alliés du sexisme plaçant les femmes comme incapables). En opposition, les jeunes pourtant aussi acteurs de la paix font face à des défis culturels mais aussi socio-économiques et politiques (comme la gérontocratie).
Selon l’enquête menée à Kédougou, il semblerait que la responsabilité du maintien de la paix soit accordée à l’administration sénégalaise, incarnée par les chefs de village, la gendarmerie et la police. Cela ne veut pas pour autant dire que les chefs religieux et coutumiers en sont exclus, mais plutôt que ces divers acteurs s’associent. Ce sont effectivement ces derniers qui conservent une autorité morale sur la population. Ils sont également indiqués comme préservateurs de la paix sociale, bien plus que les acteurs politiques sujets à la critique (notamment des jeunes insatisfaits).
CONCLUSION
La région de Kédougou regorge de richesses, qu’elles soient culturelles ou minières. Toutefois, elle fait l’objet d’inquiétudes de la part des autorités et de la société civile à cause de sa proximité avec le Mali, épicentre de l’insécurité au Sahel. Face aux menaces terroristes et aux trafics illicites, l’administration s’allie efficacement à la culture pour assurer la sécurité des kédovins. Néanmoins, l’accueil d’étrangers dans les mines d’or de la région est un obstacle à la sécurisation de la zone, d’où la nécessité de renforcer la formation professionnelle des jeunes afin de disposer d’une main d’œuvre qualifiée. Les autorités sénégalaises se doivent donc de mettre en place des politiques permettant de réduire les frustrations socioéconomiques poussant à la radicalisation des jeunes mais également de faire barrière à d’éventuels liens avec les groupes terroristes sur la frontière sénégalo-malienne.
Le samedi 26 juin 2021 se tiendra une conférence-débat organisée par le Timbuktu Institute dans le cadre du Programme Different Leaders soutenu par l’Ambassade de France au Mali et en partenariat avec Polaris Asso. Ces différents partenaires s’associent à cette initiative de promotion du débat citoyen et au renforcement des capacités des jeunes leaders maliens sur les grandes questions contemporaines.
A cette occasion, Dr. Bakary Sambe Directeur du Timbuktu Institute, introduira le thème du jour par une revue des « sources du conflit de perception sur la présence de barkhane au sahel » Il y aura des interventions de Dr. Aly Tounkara, le Directeur du Centre des Études Sécuritaires et Stratégiques au Sahel (CE3S), et de Attaye Ag Mohamed, analyste de la Paix et la Sécurité au Sahel.
Ces experts, en interaction avec les jeunes bénéficiaires du Programme Different Leaders Fellowship échangeront autour de l’émergence de nouveaux défis, dans le contexte de l’après-Barkhane. Les risques et les opportunités de refondation de la coopération seront également abordés.
Le 12 juin, sur l’axe Tèhini- Togolokaye (région de Bounkani) localité frontalière du Burkina Faso, deux soldats et un gendarme ivoiriens ont perdu la vie dans une embuscade avec « usage d’engin explosif improvisé ». Cette attaque non revendiquée mais attribuée aux terroristes est la quatrième en moins de trois mois. Elle est intervenue deux jours après l’inauguration de l’Académie internationale de lutte contre le terrorisme (Ailct) à Jacqueville, près d’Abidjan, par le premier ministre ivoirien, Patrick Achi aux côtés du ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian.