De l’avis du directeur de Timbuktu institute, l’insécurité au Mali doit inquiéter tous les pays africains, surtout ceux qui lui sont frontaliers. Bakary Sambe estime que la crise malienne est celle de tous les pays frontaliers et invite le Sénégal à préserver la résilience pour demeurer cet îlot de stabilité dans une zone en perpétuelle turbulence.
Le Sénégal a encore assez de temps pour développer une approche préventive dans la lutte contre le terrorisme. Tel estl’avis du directeur de Timbuktu institute qui estime que l’heure est venue « d’assurer une véritable politique de prévention de l’extrémisme violent, adossée au renforcement de la sécurité ». Bakary Sambe s’exprimait en marge de l’atelier de restitution d’une étude sur « les défis transnationaux et sécuritaires aux frontières» avec le cas spécifique de la région de Kédougou, réalisée par son institut et la fondation internationale Konrad Adenauer. A en croire l’enseignant-chercheur, les récents événements au Mali donnent l’impression de déjà vu. «C’est comme si on était retourné au point de départ de 2012 où ce pays qu’est le Mali, un Etat fragile, cumulait deux crises : une crise politique institutionnelle à Bamako et une crise sécuritaire non seulement au nord mais aussi au centre qui est en train de déborder».
Dès lors, souligne Bakary Sambe, les acteurs régionaux doivent se mobiliser en tant qu’institution mais aussi faire jouer les relations personnelles et le leadership. Un leadership doit s’adosser aux efforts de la Cedeao. «D’autant que l’insécurité au Mali n’est pas seulement un problème malien, mais c’est un problème pour tous ses voisins», avertit-il. C’est la raison pour laquelle, il invite la Cedeao à s’impliquer davantage. De l’avis de Bakary Sambe, l’organisation régionale doit jouer un rôle moteur au regard de deux faits. «Il y a d’abord le fait que certains membres de la communauté internationale sont aujourd’hui critiqués dans leurs différences d’attitudes selon qu’il s’agisse de la crise au Tchad ou au Mali », relève-t-il. En plus, cette différence d’appréciation n’est pas du tout appréciée des populations maliennes. «Au regard de cette situation, la Cedeao doit jouer ce rôle moteur-là parce qu’on ne doit pas donner libre cours à ces formes de prise de pouvoir, des putschs qui pourraient influer négativement sur la stabilité assez fragile de la région », insiste le directeur de Timbuktu institute.
Sur le cas précis du Sénégal, il se veut formel : «Aucune résilience n’est durable s’il n’y a pas un suivi et un renforcement ». Pour cela, il révèle que ses recommandations vont dans le sens de co-construction des solutions entre d’une part l’Etat comme acteur principal, les forces de sécurité et de défense qui en sont un démembrement, l’administration territoriale, et d’autre part les populations locales au sein desquelles les leaders politiques et traditionnels, les femmes et les jeunes qui restent une préoccupation. Il estime également que le Sénégal doit préserver cette résilience pour pouvoir demeurer cet îlot de stabilité dans l’océan d’instabilité et d’insécurité régionale, surtout avec les déficits budgétaires qu’on connaît au Mali et dans d’autres pays voisins.
«IL N’Y A AUCUNE ZONE AU MONDE ET SURTOUT DANS LE SAHEL QUI NE SOIT PAS EXPOSEE AU TERRORISME»
Revenant sur la vulnérabilité du Sénégal du fait de sa proximité avec le Mali, Bakary Sambe renseigne que l’enquête réalisée à Kédougou révèle tous les phénomènes que l’on observe en termes de frontalité, notamment la circulation des biens et des personnes dans un contexte peu sécurisé, avec des populations qui ont des inquiétudes par rapport à leur proximité avec le Mali qui est actuellement en crise. « De ce fait, il y a un appel pressant aux autorités pour qu’elles renforcent la sécurité mais aussi surtout qu’elles créent un climat de confiance entre les forces de sécurité et de défense et les populations locales», avertit-il. A l’en croire, ceci est d’autant plus important que les forces de l’ordre sont les alliées des populations locales pour la lutte contre le terrorisme. Surtout que dans cette lutte, la bataille du renseignement doit être gagnée. Conscient qu’il n’y a aucune zone au monde et surtout dans le Sahel qui ne soit exposée au terrorisme, Bakary Sambe pense que l’autre enjeu de l’Etat, c’est d’éviter que ces groupes arrivent au Sénégal et qu’ils réussissent à créer des couveuses locales pour pouvoir s’insérer dans le tissu social.
Malgré un climat de suspicion général en Afrique, 80% des Sahéliens sont conscients de la gravité de la pandémie de COVID-19. Parmi eux, ce sont les hommes qui ont pris le plus au sérieux la maladie. Cependant, ce sont majoritairement les femmes qui estiment qu’il est très important de prendre des mesures de prévention pour lutter contre la propagation du virus. C’est le résultat d’une étude de Sayara International et du Timbuktu Institute menée en décembre 2020 dans le but de mesurer scientifiquement l’ampleur de la désinformation au Sahel.
Cette étude de perception est menée dans huit pays du Sahel à savoir le Burkina Faso, le Cameroun, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal, le Soudan et le Tchad. 80 enquêteurs ont mené plus de 4000 sondages et plus de 30 entretiens qualitatifs. 79% des Sahéliens âgés de 70 à 81 ans sont tout à fait d’accord sur le fait que le risque de COVID-19 est un danger pour leur communauté. Ils sont suivis des jeunes, âgés 15 à 24 ans, qui sont 69% à être conscients de la gravité de la pandémie. Ceci peut s’expliquer par le fait qu’ils soient en contact permanent avec l’information grâce aux réseaux sociaux, et ainsi avertis de la situation globale et des mesures de prévention pour lutter contre la propagation du virus.
Les hommes sont plus conscients que les femmes du caractère sérieux de la pandémie. Ils sont 68% à en être conscients, pour 65% de femmes. Les hommes ont, en effet, davantage accès aux informations relatives à la maladie que les femmes. Le faible taux de scolarisation des femmes dans les pays du Sahel, et l’illettrisme qui en découle, sont des facteurs pouvant expliquer cet état de fait. Ce sont les personnes âgées de 71 à 80 ans qui estiment que la mise en place de mesures de protection contre la pandémie est importante. 60% d’entre elles pensent qu’il est très important de mettre en place ces mesures. Les Sahéliens de 15 à 25 ans sont 59% à estimer la même chose.
Les femmes, plus enclines aux mesures de prévention
Curieusement, alors que les hommes sont mieux informés, ce sont les femmes qui pensent le plus qu’il est nécessaire de prendre des mesures pour prévenir la propagation de la COVID-19. 45% des femmes pensent qu’il est très important de prendre ces mesures, contre 17% d’hommes. Enfin, cette étude révèle que 27% des Sahéliens sont rarement capables de rester loin d’une personne étrangère à leur foyer. 14% des femmes et 16% des hommes ne sont jamais capables de respecter la distanciation physique dans le Sahel. Malgré leur prise de conscience, les hommes ne font pas toujours attention à certaines mesures de protection contre la pandémie. Cela s’explique par le fait qu’ils sont en contact permanent avec les informations grâce aux réseaux sociaux et au Web lesquels inondent de fausses informations concernant la COVID-19.
Suzanne Batista
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Les populations sahéliennes ne respectent pas souvent les mesures de protection contre le virus. Ce qui rend les campagnes de communication contre la COVID-19, pour la plupart, poussives. Ce non-respect se ressent plus dans les zones urbaines pour certains pays. Telle est la conclusion d’une étude du Timbuktu Institute et de Sayara International menée en décembre 2020 dans le but de mesurer scientifiquement et statistiquement l’ampleur de la désinformation et la circulation des fausses informations sur la COVID-19 dans huit pays du Sahel.
Cette étude de perception menée dans huit pays du Sahel à savoir le Burkina Faso, le Cameroun, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal, le Soudan et le Tchad, - 80 enquêteurs ont mené plus de 4000 sondages et plus de 30 entretiens qualitatifs - révèle que les Sahéliens sont majoritairement conscients de la dangerosité de la COVID-19. Cette majorité pense qu’il est grandement important de prendre des mesures contre la propagation de la pandémie. Parmi les pays étudiés, c’est au Mali et au Niger que l’on a le plus pris conscience du degré de gravité de la maladie. En effet, plus de 80% des Maliens en ont pris conscience. Et c’est au Cameroun que cette prise de conscience est la plus faible : seuls 58% des Camerounais pensent que la COVID-19 est un danger pour leur communauté. Pourtant, le Cameroun est l’un des pays qui a le plus de cas de contamination au Sahel.
C’est dans les zones rurales que les populations sont le moins informées sur le sérieux de la pandémie. En effet, 60% des populations vivant dans les zones rurales sont conscientes des risques de la maladie, alors qu'elles sont 70% en milieu urbain. Les différences de niveaux d’instruction des populations entre zones urbaines et zones rurales, ainsi que l’accès à la « bonne » information pourraient, en partie, expliquer cet écart.
Le respect des mesures barrières, un défi
Par ailleurs, nombre de Sahéliens ne respectent pas les mesures barrières pour faire barrière à la propagation de la COVID-19. Environ 27% des Sahéliens se disent rarement capables de rester à au moins un mètre de distance d’une personne qui ne fait pas partie de leur foyer. Les Tchadiens sont les plus respectueux de la distanciation physique. Seulement 6% des Tchadiens ne sont jamais capables de respecter la distanciation sociale. C’est en Mauritanie que cette mesure est la moins respectée : 48% des Mauritaniens sont rarement capables d’observer cette mesure. Au Sénégal, les populations des zones rurales respectent davantage la distanciation sociale que les populations des zones urbaines. Cela est dû au fait que les zones urbaines sont plus peuplées, et notamment à l’usage massif des transports en communs.
A l’inverse, au Burkina Faso, ce sont dans les zones urbaines que l’on respecte le plus les mesures de prévention. De fait, les Burkinabè qui résident dans les zones urbaines sont mieux informés des dangers de la COVID-19 et la manière de s’en protéger. Les Sahéliens sont certes majoritairement conscients du sérieux de la pandémie de COVID-19. Toutefois, parmi eux, certains continuent de faire fi de certaines mesures de protection contre la maladie.
Suzanne Batista
Soumettez-nous une information, les journalistes du CESTI la vérifieront.
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Au Sahel, la bataille de la prévention contre la COVID-19 est encore loin d’être gagnée. Selon une enquête de Timbuktu Institute et Sayara International, les Sahéliens sont une minorité à respecter scrupuleusement les mesures barrières, même si la majorité s’accorde sur l’efficacité de ces mesures pour enrayer la propagation du virus. L’objectif de cette enquête, est d’analyser les perceptions des populations du Sahel à propos des informations sur la COVID-19.
Cette enquête est réalisée en décembre 2020 dans huit pays: Burkina-Faso, Cameroun, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Soudan et Tchad. Avec un échantillon hautement représentatif de plus de 4000 répondants sur les données quantitatives (KAP) et plus de 30 entretiens qualitatifs (KIIs), elle est menée par 80 enquêteurs et 7 superviseurs locaux. L’échantillonnage probabiliste et aléatoire permet à chaque individu de la population cible d’avoir la chance d’être interrogé. Quatre strates homogènes (l’âge, le sexe, le niveau d’éducation et le milieu de résidence [rural/urbain]) ont permis de mieux atteindre la cible. Évaluer leurs pratiques par rapport à la COVID-19 est l’un des buts visés.
Près de 53 % des Sahéliens suivent les mesures barrières
Il y a un grand fossé entre la perception des mesures préventives et la mise en pratique de ces dernières afin d’enrayer la chaîne de contamination de la COVID-19 au Sahel. Près de 53 % des Sahéliens prennent au sérieux les mesures barrières préconisées pour lutter contre la propagation de la COVID-19. Les campagnes de sensibilisation sur la dangerosité du virus ont clairement impacté une majorité relative des populations interrogées. Aussi, plus de 30% constatent que les membres de leur communauté accordent de l’importance aux mesures barrières.
En revanche, le respect de la distanciation sociale n’est pas systématique. Seulement 25% de la population, soit une personne sur quatre, pensent rester « souvent » à un mètre de distance au moins des personnes qui ne font pas partie de leur foyer. Ils sont 25% à affirmer y rester « parfois ». Une minorité de 20% pense qu’un nombre suffisamment bas de 10 personnes sur 100 dans leur communauté portent un masque ou se couvrent le visage pour se rendre en public. Les résultats de cette étude montrent le degré d’ancrage des populations dans la lutte contre la maladie.
Max BILL
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Même si des réticences existent, les Sahéliens croient globalement en la capacité de leurs pays respectifs à gérer convenablement la pandémie de la COVID-19. Ce sont les conclusions d’une étude menée en décembre 2020, par Sayara International et le Timbuktu Institute, dans le but d’analyser les perceptions des populations du Sahel à propos des informations sur la Covid-19.
Avec un échantillon aléatoire comportant plus de 4000 répondants (KAP), 80 enquêteurs, 7 superviseurs locaux, plus de 30 entretiens qualitatifs (KIIs) et 95% de représentativité, cette étude se délimite au Sahel et plus précisément au Burkina-Faso, au Cameroun, en Mauritanie, au Mali, au Niger, au Sénégal, au Soudan et au Tchad. L'échantillon est divisé en strates homogènes réparties selon les critères de l’âge, du sexe, du niveau d’éducation et du milieu de résidence (rural ou urbain).
Au Sahel, 80% des populations ont confiance ou ont une certaine confiance dans les responsables gouvernementaux en charge de la santé pour gérer la pandémie. Seuls 11% ne leur font pas confiance. Aussi, 78% font confiance ou ont une certaine confiance dans les chefs religieux ou communautaires pour informer sur la pandémie. Et seulement 9% ne leur font pas confiance.