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Source : Météo Sahel 

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Ousman Sonko, un ancien ministre gambien âgé de 55 ans, est jugé en Suisse à partir du 8 janvier 2024 pour crimes contre l’humanité. Il a été ministre de l’Intérieur pendant 10 ans sous la présidence de Yaya Jammeh, qui a dirigé le pays d’une manière autoritaire pendant 22 ans. Sonko risque la prison à perpétuité. Ancien inspecteur général de la police, il a été limogé en 2016 et a demandé l’asile en Suisse. L’ONG Trial International a déposé une plainte contre lui pour crimes contre l’humanité, ce qui a conduit à son arrestation en janvier 2017 et à sa détention provisoire depuis lors. Il est accusé d’avoir participé, ordonné ou omis d’empêcher des meurtres, des actes de torture, des viols et des détentions illégales entre 2000 et 2016. Le procès devrait durer environ un mois, avec un verdict attendu en mars.

Au Mali, les bases du dialogue inter-malien pour la Paix et la réconciliation nationale, sont en train d’être jetées. Le 5 mars dernier, les termes de référence du dialogue ont été remis au président de la Transition. Pour Dr Bakary Sambe, « le premier signal qu’on peut espérer jouer en faveur de l’efficacité [de ce dialogue], c’est d’abord son caractère assez décentralisé, avec différentes phases dont l’objectif est la plus grande inclusivité. ». Il revient sur les enjeux de cette initiative dans le cadre de la chronique hebdomadaire du Timbuktu Institute en partenariat avec la chaîne de télévisions panafricaine Medi1TV.

Dr Bakary Sambe, vous affirmiez, dans la presse malienne, lors d'une récente visite à Bamako, que soutenir le Mali c'est d'abord appuyer le dialogue inter-malien pour une sortie de crise urgente dans ce pays. Alors depuis l'annonce de ce dialogue, y a-t-il eu des avancées sur le terrain?

Oui, effectivement les choses semblent avoir avancé depuis. Après 20 jours de travail soutenu dans des commissions thématiques, ce rapport précisant les termes de référence du dialogue inter-malien pour la Paix et la réconciliation nationale a été remis lundi au président de la Transition dans le symbolique palais de Koulouba. Ce travail avait été coordonné par un Président du Comité de pilotage en la personne de Monsieur Ousmane Issoufi Maïga, par ailleurs ancien Premier ministre. Pour les autorités et les membres de cette commission, il fallait d’abord s’accorder sur des termes de référence préliminaires avant le démarrage du dialogue qui se veut cette fois-ci décentralisé. Et il a fallu un atelier ad hoc, auquel ont participé plusieurs responsables désignés représentant le district de Bamako, les différentes régions du Mali mais aussi la diaspora.

Mais, Dr. Sambe, comme vous le savez, il y a eu des dialogues organisés dans ce pays ces dernières années. Celui-ci , dont les termes de référence viennent d'être remis au chef de la transition cette semaine, n'est-il pas vu par certains comme un simple dialogue de plus ?

J’ose espérer que ce ne soit le cas, bien que certains experts maliens le craignent. Mais d’après Ousmane Issifou Maïga qui a présidé le comité de pilotage, les autorités avaient demandé de questionner sans complaisance la société malienne pour, je le cite, « mieux comprendre les causes apparentes et profondes des conflits qui l’assaillent, de nous adonner à un exercice d’autocritique et de vérité ». Et, dit-il au Président de la transition, « Vous aviez demandé de créer les conditions favorables à un dialogue franc et sincère entre les maliens de manière inclusive afin que nul ne se sente exclu.» Il a, en outre, rappelé que « les délégués à l’atelier ont retenu des thématiques très importantes parmi lesquels, bien entendu, la paix, la réconciliation nationale et la cohésion sociale, les questions politiques et institutionnelles, l'économie et le développement durable, sans négliger les aspects sécuritaires et ceux liés à la défense du territoire national, ainsi que la géopolitique mais aussi l’aspect environnemental.»

Alors, quels résultats immédiats pourrait-on attendre pour une sortie de crise effective dans ce pays en proie à des difficultés depuis 2012 ? Y a-t-il de nouveaux signaux d'espoir selon-vous ?

Le premier signal qu’on peut espérer jouer en faveur de l’efficacité c’est d’abord le caractère assez décentralisé de ce dialogue avec différentes phases dont l’objectif est la plus grande inclusivité avec la prise en compte du niveau communal, régional du district de Bamako, mais aussi le niveau des ambassades et consulats et le niveau national. D’ailleurs pour ne pas répéter les erreurs du passé, le président du comité de pilotage de ce nouveau dialogue insiste sur le fait que les commissions aient pris la peine d’avoir, je le cite « observé, écouté et compris pendant un mois ,les doutes, les suspicions et les colères des uns et des autres, soulignant, et ce sont toujours ses mots, qu’il “y a lieu de montrer des signaux forts pour briser la glace des méfiances et des craintes de l’autre », pour finir par interpeller les autorités et les parties prenantes qu’il y a une grande urgence à rétablir la confiance entre les Maliens comme préalable indispensable vers la paix et la réconciliation.

 

 

Source : Timbuktu Institute

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The term of office of Togo's deputies has expired, and no legislative elections have been held in time. This situation has caused concern among civil society and non-governmental organizations, who have called on President Faure Gnassingbé to open an inclusive dialogue, a "broad consultation", with a view to organizing free and transparent elections.

Simultaneously with these political concerns, the death of Monseigneur Philippe Kpodzro, a leading Togolese opposition figure, was announced. Monseigneur Kpodzro, who played a key role in the Sovereign National Conference of the early 1990s, was a fervent advocate of democracy and political alternation in Togo. His commitment to democracy was widely acclaimed, but his death leaves a void in Togo's political landscape. 

In addition, revelations that two Togolese journalists had been spied on using Pegasus cyber-espionage software have raised concerns about press freedom and the safety of journalists in the country. The case raises concerns about the misuse of surveillance technology by the authorities to stifle dissent and restrict freedom of expression.

Source : Météo Sahel 

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Le mandat des députés togolais est arrivé à expiration sans qu’aucune élection législative n’ait été organisée dans les délais prévus. Cette situation a suscité des inquiétudes au sein de la société civile et des organisations non gouvernementales, qui ont appelé le président Faure Gnassingbé à ouvrir un dialogue inclusif, une « large consultation », en vue d’organiser des élections libres et transparentes.

Simultanément à ces préoccupations politiques, le décès de Monseigneur Philippe Kpodzro, une figure de l’opposition togolaise, a été annoncé. Monseigneur Kpodzro, qui avait joué un rôle clé dans la Conférence nationale souveraine du début des années 1990, était un fervent défenseur de la démocratie et de l’alternance politique au Togo. Son engagement en faveur de a démocratie a été salué, mais son décès laisse un vide dans le paysage politique togolais.

En outre, des révélations selon lesquelles deux journalistes togolais auraient été espionnés à l’aide du logiciel de cyber-espionnage Pegasus ont suscité des inquiétudes quant à la liberté de la presse et à la sécurité des journalistes dans le pays. Cette affaire soulève des préoccupations quant à l’utilisation abusive de la technologie de surveillance par les autorités pour réprimer la dissidence et restreindre la liberté d’expression.

Source : Météo Sahel 

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In Guinea, the military regime led by Colonel Mamadi Doumbouya has raised expectations and concerns by announcing a constitutional referendum for the year 2024. This initiative, presented as a step towards a return to constitutional order and the organization of democratic elections, was greeted with some scepticism, given the country's tense political context. The coup d'état in September 2021, which toppled President Alpha Condé, initially raised hopes of change, but recent restrictions on press freedom and Internet access have raised concerns about the direction the political transition will take.

Indeed, the growing repression of media freedom and online censorship has attracted the attention of the international community. The United Nations High Commissioner for Human Rights, Volker Türk, has expressed his concern at these measures, pointing out that they do not meet international human rights standards. Journalists have been harassed and intimidated, and several have been arrested. In addition, the authorities have blocked access to several social media sites and restricted Internet access, citing national security imperatives. In response to these restrictions, protests broke out, including a day of mobilization for press freedom. However, the security forces violently repressed these demonstrations, arresting and intimidating journalists and members of civil society. 

The deteriorating human rights situation in Guinea, as reported by the international press, has led to increased mobilization by the international community and trade unions. Human rights organizations and journalists' unions have called for the release of detained journalists, including Sekou Jamal Pendessa of the Syndicat des professionnels de la presse de Guinée (SPPG), who has been remanded in custody, and for the restoration of fundamental freedoms. According to a report by the Committee to Protect Journalists, the number of journalists incarcerated in the region increased from 31 in 2022 to 47 on December 1, 2023, highlighting the persistent challenges facing media professionals in many countries in the region.

Source : Météo Sahel 

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En Guinée, le régime militaire dirigé par le colonel Mamadi Doumbouya a suscité des attentes et des préoccupations en annonçant un référendum constitutionnel pour l’année 2024. Cette initiative, présentée comme une étape vers le retour à l’ordre constitutionnel et l’organisation d’élections démocratiques, a été accueillie avec un certain scepticisme compte tenu du contexte politique tendu du pays. Le coup d’État de septembre 2021, qui a renversé le président Alpha Condé, avait initialement soulevé des espoirs de changement, mais les récentes restrictions imposées à la liberté de la presse et à l’accès à Internet ont suscité des inquiétudes quant à la direction que prendrait la transition politique.

En effet, la répression croissante de la liberté des médias et la censure en ligne ont attiré l’attention de la communauté internationale. Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Volker Türk, a exprimé son inquiétude face à ces mesures, soulignant qu’elles ne respectent pas les normes internationales en matière de droits de l’homme. Les journalistes ont été harcelés, intimidés, et plusieurs ont été arrêtés. De plus, les autorités ont bloqué l’accès à plusieurs sites de médias sociaux et restreint l’accès à Internet, invoquant des impératifs de sécurité nationale. En réponse à ces restrictions, des manifestations ont éclaté, notamment une journée de mobilisation pour la liberté de la presse. Cependant, les forces de sécurité ont violemment réprimé ces manifestations, procédant à des arrestations et à des intimidations contre les journalistes et les membres de la société civile.

La détérioration de la situation des droits de l’homme en Guinée, telle que rapportée par la presse internationale, a conduit à une mobilisation accrue de la communauté internationale et des syndicats. Des organisations de défense des droits de l’homme, ainsi que des syndicats de journalistes, ont appelé à la libération des journalistes détenus, dont Sekou Jamal Pendessa du Syndicat des professionnels de la presse de Guinée (SPPG), placé sous mandat de dépôt, et à la restauration des libertés fondamentales. Selon un rapport du Comité pour la protection des journalistes, le nombre de journalistes incarcérés dans la région a augmenté, passant de 31 en 2022 à 47 au 1 er décembre 2023, mettant en évidence les défis persistants auxquels sont confrontés les professionnels des médias dans de nombreux pays de la région.

Source : Météo Sahel 

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The complete withdrawal of MINUSMA, the UN peacekeeping mission, has been hailed by UN Secretary-General António Guterres as an important step forward, despite the many challenges encountered. However, the withdrawal comes against a backdrop of continuing tensions between the Malian government and northern Tuareg separatist groups, despite the effective recapture of Kidal - a political and military success for the transitional government. 

At the same time, the Malian authorities received a delivery of drones from Turkey as part of their efforts to strengthen national defense capabilities. This acquisition is part of Mali's strategic reorientation, marked by a break with the former French colonial power and a rapprochement with partners such as Turkey and Russia. However, these developments raise concerns about the impact on regional security dynamics and diplomatic relations with traditional international players, who fear a loss of influence that has been underway for some time.

In addition, recurrent attacks on Fulani villages near Ségou have been reported, highlighting the persistent intercommunity tensions and security challenges facing Mali. These attacks were condemned by the Tabital Pulaaku association, which stressed the need for urgent action to protect civilians and promote reconciliation between the country's different ethnic groups. 

Finally, the ruling junta announced the end of the 2015 Algiers Agreement, considered moribund since the resumption of hostilities in the north of the country. This decision marks a new stage in Mali's political evolution and raises questions about the future of the peace process and regional stability. In response to this situation, the Malian authorities have set up an inter-Malian dialogue committee with the aim of promoting a peaceful resolution to internal conflicts. Where the Tuaregs had rejected the idea of an inter-Malian dialogue proposed by the ruling junta, believing it called into question the 2015 peace agreement. However, uncertainties persist as to the composition and concrete objectives of this committee, raising doubts as to its ability to restore peace and stability in the country, despite the launch of the inter-Malian dialogue, whose players have just been designated and which marks a new stage in the affirmation of the policy of sovereignty initiated by Bamako since the departure of France.

Source : Météo Sahel 

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Le retrait complet de la MINUSMA, la mission de maintien de la paix des Nations Unies, a été salué par le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, comme une étape importante malgré les nombreux défis rencontrés. Cependant, ce retrait intervient dans un contexte où les tensions persistent entre le gouvernement malien et les groupes séparatistes touaregs du Nord malgré la reprise effective de Kidal qui a été un succès politque et militaire pour le gouvernement de transition.

Parallèlement, les autorités maliennes ont reçu une livraison de drones de Turquie dans le cadre de leurs efforts pour renforcer les capacités de défense nationale. Cette acquisition s’inscrit dans le cadre d’une réorientation stratégique du Mali, marquée par une rupture avec l’ancienne puissance coloniale française et un rapprochement avec des partenaires tels que la Turquie et la Russie. Cependant, ces développements suscitent des inquiétudes quant à l’impact sur la dynamique sécuritaire régionale et les relations diplomatiques avec les acteurs internationaux traditionnels qui craignent une perte d’influence pourtant amorcée depuis quelques temps.

Par ailleurs, des attaques récurrentes contre des villages peuls près de Ségou ont été signalées mettant en lumière les tensions intercommunautaires persistantes et les défis de sécurité auxquels le Mali est confronté. Ces attaques ont été condamnées par l’association Tabital Pulaaku soulignant la nécessité d’une action urgente pour protéger les populations civiles et promouvoir la réconciliation entre les différents groupes ethniques du pays.

Enfin, la junte au pouvoir a annoncé la fin de l’accord d’Alger de 2015, considéré comme moribond depuis la reprise des hostilités dans le nord du pays. Cette décision marque une nouvelle étape dans l’évolution politique du Mali et soulève des questions sur l’avenir du processus de paix et de la stabilité régionale. En réponse à cette situation, les autorités maliennes ont créé un comité de dialogue inter-malien dans le but de favoriser une résolution pacifique des conflits internes. Là les Touaregs avaient rejeté l’idée d’un dialogue inter-malien proposé par la junte au pouvoir, estimant que cela remettait en question l’accord de paix de 2015. Cependant, des incertitudes persistent quant à la composition et aux objectifs concrets de ce comité, laissant planer des doutes quant à sa capacité à rétablir la paix et la stabilité dans le pays malgré le lancement du dialogue inter-maliens dont les acteurs viennent d’être désignés et qui signe une nouvelle étape dans l’affirmation de la politique de souveraineté initiée par Bamako depuis le départ de la France.

Allaa Ghanem, Vendredi, 01 mars 2024

Une table ronde s’est tenue cette semaine au Centre international du Caire pour la résolution, le maintien et la consolidation de la paix (CCCPA) avec la participation d'acteurs régionaux agissant dans la lutte contre le terrorisme.

Les acteurs internationaux agissant au nom de la lutte contre le terrorisme sont nombreux. Néanmoins, l’élaboration de réponses adéquate répondant aux enjeux locaux est une opération complexe nécessitant une connaissance approfondie de ces milieux où prospère le terrorisme et une stratégie de contextualisation.

Le CCCPA participe à la réflexion sur l’extrémisme menant au terrorisme à travers des recherches et les efforts de négociation et de dialogue en coopération avec des organismes différents. Le centre a organisé cette semaine une table ronde sur la thématique « Repenser le contre-terrorisme au Sahel et en Afrique de l’Ouest ».

Cette table ronde a été l’occasion de réfléchir sur la prévention et la lutte contre l’extrémisme conduisant au terrorisme au Sahel et en Afrique de l’Ouest. L’ambassadeur Abdel-Latif, DG du CCCPA a souligné d'emblée l'importance que le CCCPA attache à l'échange d'expériences avec d'autres institutions africaines travaillant dans le même domaine en vue de tirer des leçons et d'identifier les meilleures pratiques.

La table ronde a été ponctuée par une présentation du Dr. Bakary Sambe, le directeur régional, sur le travail du Timbuktu Institute ACPS à Dakar suivie d'une discussion animée, avec la participation de plusieurs partenaires et experts, qui ont souligné la nécessité de promouvoir des réponses globales et des stratégies contextualisées pour limiter l’expansion du terrorisme en Afrique.

Les intervenants ont insisté sur la nécessité d'éviter les solutions importées pour faire face à la montée du terrorisme dans la région. Ils ont souligné le rôle central de l'appropriation nationale et locale dans l'élaboration des réponses actuelles et futures visant à prévenir et à contrer l'extrémisme violent menant au terrorisme. Les discussions ont mis en lumière l'importance d'un soutien efficace et durable, notamment par le biais de partenariats, de manière à contribuer à la mise en place d'institutions efficaces et à renforcer les réponses accordant la priorité aux besoins et aux aspirations des communautés locales.

Source : www.french.ahram.org.eg

Bakary Sambe est enseignant-chercheur à l’université Gaston Berger de Saint-Louis, au Sénégal, et directeur régional du Timbuktu Institute, l’observatoire des radicalismes et conflits religieux en Afrique. Quelques jours après les sanglantes attaques de deux lieux de culte au Burkina Faso, il apporte son éclairage.

La Croix Africa : Dimanche 25 février, deux lieux de culte (une église et une mosquée) ont été attaqués par des djihadistes au Burkina Faso. Pourquoi ces attaques contre des lieux de culte ?

Bakary Sambe : Les groupes djihadistes ont très tôt intégré l’enjeu, pour eux, de s’attaquer à l’harmonie religieuse de ce pays qui est un exemple de cohabitation par excellence. Cette attaque contre l’église d’Essakane dans la Liptako Gourma est la dernière d’une série. Déjà en 2019, les églises de Silgadji dans le département de Tongomayel (province du Soum) et la paroisse de la localité de Touflé avaient été attaquées (six morts dont un prêtre), en plus de l’attentat sanglant contre l’église protestante de Hantoukoura (Est). Il s’agissait déjà de signaux forts d’une volonté de communautariser la violence pour déstabiliser davantage le Burkina Faso. C’est le même modus operandi pour l’attaque contre une autre église à Pansi dans la province symbolique du Yaga (Sahel). Les djihadistes semblent vouloir installer un esprit de vendetta détériorant les rapports intercommunautaires comme le montre la récente attaque contre la mosquée de Natiaboani dans le département de Fadam Gourma. Ce qui semble une nouveauté s’inscrit dans une réelle stratégie pour attiser les velléités déjà profondes d’où la réaction du 26 février du pape François qui rappelait, à la suite de cette terrible attaque, que « la haine n’est pas la solution aux conflits ».

La situation sécuritaire qui avait été donnée comme prétexte par les juntes du Burkina Faso, du Mali et du Niger pour justifier leurs coups d’État, s’est-elle améliorée sur place ?

Bakary Sambe: Il est vrai que les pouvoirs militaires arrivés à la suite des coups d’État ont tenté de reprendre en main la situation sécuritaire que n’avaient pas réglée l’intervention et la présence française qui se sont soldées par un certain échec évident. La diversification des partenariats de la part du Mali, par exemple, avait permis l’acquisition de nouveaux moyens qui avaient longtemps fait défaut aux forces armées du Mali . Mais certains succès militaires comme la reprise de Kidal ne peuvent cacher l’ampleur des défis qui restent à relever notamment au Centre mais aussi dans la région de Ménaka sans compter les dernières attaques qu’a connues le pays malgré les efforts des autorités de la transition. Le Burkina Faso s’est inscrit dans une stratégie de communautarisation de la lutte avec notamment les volontaires pour la défense de la patrie (VDP) et autres groupes d’auto-défense dans un pays où une large part du territoire échappe au contrôle des forces de défense et sécurité ( FDS). Le régime actuel compte, pour sa légitimation politique, sur des succès médiatisés pour donner l’impression d’une reprise en main malgré les attaques qui continuent. Le Niger qui semble avoir mieux stabilisé le front contre Boko Haram, fait face à d’énormes défis dans la zone des trois frontières notamment dans la région de Tillabéri surtout avec le fait d’avoir recentré les forces spéciales dans des missions de sécurité intérieure alors que le front djihadiste n’a jamais connu de répit.

Peut-on craindre que l’insécurité dans ces trois pays ait un effet de contagion dans des pays un peu plus stables ?

Bakary Sambe : Le risque est réel. Les partenaires internationaux ont commis l’erreur stratégique de départ d’extraire les pays du Sahel central du reste de l’Afrique de l’Ouest alors que le débordement des épicentres a toujours été une réalité depuis que la zone affectée par la crise sécuritaire s’est étendue du Mali pour atteindre le Burkina Faso et le Niger. Il n’y a jamais eu d’étanchéité entre les pays de la région et les attaques terroristes ne sont que les signaux les plus visibles de la présence des groupes terroristes si l’on sait que leur ravitaillement et leur repli stratégique sont assurés depuis les pays voisins de ceux en proie à un phénomène de djihadisme massif. La Côte d’Ivoire est confrontée à une menace persistante dans le Nord avec le continuum socioculturel depuis le Mali et le Burkina Faso malgré une certaine résilience due à la difficulté des groupes terroristes de trouver des couveuses locales notamment dans le Bunkani. Mais jusqu’à quand ? Au Sénégal, il ne faudrait pas que la crise politique interne actuelle détourne le regard de sa frontière Est avec le Mali où la Katiba Macina tente une avancée comme le montre la dernière attaque de Melgué dans la toute proche région de Kayes à à peine 35 kilomètres de la frontière sénégalaise. Au même moment, malgré la focalisation sur les zones aurifères de Kédougou, les dynamiques sociopolitiques telles que le phénomène des castes, marginalisations et frustrations affectant de larges zones de Kayes sont déjà connus dans la Guidimakha, la zone des trois frontières de la Mauritanie, du Sénégal et du Mali. La prise en compte de dimension est cruciale si l’on veut éviter le développement de couveuses locales dont les groupes ont toujours besoin pour accentuer leur infiltration encore difficile au Sénégal.

Le Burkina Faso, le Mali et le Niger, dirigés par des juntes militaires ont annoncé leur retrait de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Quelles seraient les implications d’un tel retrait ?

Bakary Sambe : Le départ éventuel de ces trois pays de la CEDEAO aurait de lourdes conséquences politiques, socio-économiques alors que les partenaires internationaux semblaient avoir dépossédé l’organisation régionale de la question sécuritaire au profit du G5 Sahel. D’abord un tel départ signera la déstructuration dommageable de l’architecture régionale de sécurité régionale, un rétrécissement de la taille du marché communautaire alors que la région a plus besoin d’intégration que de fragmentation. Ces trois pays représentent plus de 17 % des 425 millions des habitants de la zone CEDEAO, 10 % du PIB de la région. Les responsables politiques de la CEDEAO semblent avoir appris de l’expérience de la gestion de la crise malienne et nigérienne et s’inscrivent désormais plus dans une stratégie de maintien de ces trois pays dans le giron communautaire avec les signaux d’un dégel vis-à-vis des régimes militaires depuis le dernier sommet extraordinaire de la CEDEAO et la levée de l’essentiel des sanctions, en plus de gestes symboliques de bienveillance comme l’allocation à ces pays de 100 millions de dollars dans le cadre du plan d’action de la CEDEAO de lutte contre le terrorisme. La CEDEAO tente de ne plus se mettre à dos les populations et est parfaitement consciente des risques institutionnels et géostratégiques d’un retrait de ces pays de l’organisation sous-régionale. Le pari sera difficile dans le contexte d’un nouveau « grand jeu » sahélien avec une lutte d’influence entre les puissances.

www.africa.la-croix.com - Recueilli par Lucie Sarr