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Au Forum international de Dakar sur la Paix et la Sécurité en Afrique qui s’est ouvert ce lundi 19 novembre 2019 au Centre international de Conférence d’Abdou Diouf de Diamniadio (Cicad), des dirigeants et experts de haut niveau ont pris part. Au cours de cette rencontre, il a beaucoup été question de multilatéralisme en rapport avec les défis de sécurité et de la paix en Afrique. Pour sa part, le Dr. Bakary Sambe, Directeur et Fondateur de Timbuktu Institute s’est exprimé sur la question tout en insistant sur la prévention de l’extrémisme violent et, par ricochet, la nécessité pour l’Etat du Sénégal, de se doter d’une véritable stratégie nationale de prévention en la matière.
MAMADOU YAYA BALDE
En marge du Forum international de Dakar sur la Paix et la sécurité en Afrique, le Fondateur et Directeur de Timbuktu Institute/African Center For Peace Studies, a noté un changement de paradigme de l’Etat face à la menace terroriste. Selon cet enseignant-chercheur à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, l’Etat du Sénégal a bel et bien pris au sérieux la question du phénomène de l’extrémisme violent à travers de mesures concrètes. Il en veut pour preuve, le discours du président Macky Sall lors du Forum de Dakar sur la Paix et la sécurité en Afrique et les nombreuses initiatives prises par l’Etat, notamment la mise en place, depuis 2014, de la Cellule de lutte anti-terroriste.
Insistant sur la dimension de la prévention, le Directeur de Timbuktu Institute prévient : « Le Sénégal est certes longtemps resté cet îlot de paix dans un océan d’instabilité qu’est la sous-région ouest-africaine, mais il ne doit pas dormir sur ses lauriers. Il doit gérer les impératifs de sécurité et s’investir de plus en plus dans la prévention qui, à mon avis, est plus durable», a-t-il préconisé.
Dans le même ordre d’idées, il estime que « le Sénégal ne doit pas verser tout de suite dans le tout-militaire avant le préalable d’une stratégie nationale de prévention de l’extrémisme violent avec une approche holistique distincte des opérations de lutte contre le terrorisme ». D’où la nécessité préalable de doter le Sénégal d’une stratégie nationale de prévention qui mettra l’accent sur l’éducation de la population, l’implication des leaders religieux, préalable incontournable dans le cadre de la prévention contre le terrorisme.
Au cours de ce Forum, le président de la République, Macky Sall, a plaidé pour un renforcement des mandats des Nations contre les Djihadistes. Une démarche soutenue par le nouveau président mauritanien, Mohamed Ould Ckeikh El Ghazouani.
Le Forum international de Dakar sur la paix et la sécurité en Afrique se tient du 18 au 19 novembre 2019 au Centre international de Conférence d’Abdou Diouf de Diamniadio (CICAD) sur le thème : « Paix et sécurité en Afrique : les défis actuels du multiculturalisme ».
« J’ai dit et écrit qu’il est urgent voire impérieux d’engager le dialogue avec les groupes radicaux violents au Mali »
Invité à Dakar par Timbuktu Institute dans le cadre du séminaire sous-régional « coopérations sécuritaires au Sahel à l’heure des conflits intercommunautaires » dont il était l’un des panélistes, le Dr. Aly Tounkara, enseignant-chercheur à la Faculté des Lettres et sciences humaines à l’Université de Bamako dresse une analyse sans complaisance de la crise malienne. Dans cet entretien exclusif qu’il nous a accordé, cet expert des questions sécuritaires au Collège sahélien de sécurité de Bamako revient sur ‘’la mise sous tutelle de l’armée malienne’’ par les forces étrangères, les enjeux économiques, stratégiques et géopolitiques qui enveloppent le discours sur la lutte contre le terrorisme, la position ambigüe de la classe politique malienne et la ‘’nécessité absolue’’, selon lui, de déclencher le dialogue avec les groupes radicaux violents. Entretien.
PROPOS RECUEILLIS PAR MAMADOU YAYA BALDE
Vous êtes Invité à Dakar par Timbuktu Institute dans le cadre d’un séminaire sous-régional intitulé : « Les coopérations sécuritaires au Sahel à l’heure des conflits intercommunautaires » dont vous êtes un des conférenciers. En tant que chercheur, comment vivez-vous le phénomène de l’extrémisme violent au Mali ?
Evoquez aujourd’hui l’extrémisme violent ou les attaques avec le référentiel musulman qu’on peut qualifier d’attaques djihadistes, cela dépend de quelle partie du Mali se place-t-on. De 2012 à nos jours, les régions du Nord et celles du centre du Mali connaissent effectivement des attaques terroristes de la part des différentes katiba notamment Alqaida, Ançar Al-charia et d’autres katiba qui se sont greffées aux tensions communautaires particulièrement dans la région de Mopti. L’action terroriste, dans le contexte malien, est quand même quotidienne. On ne peut dire que le Mali s’habitue au phénomène, mais le vit plus que les autres pays de la sous-région.
Est-ce que la présence de la force française barkhane et d’autres forces étrangères dans le pays, en plus des efforts singuliers de l’armée malienne, n’ont pas atténué la percée et l’action djihadistes au Mali ?
Quand on prend les différentes interventions militaires étrangères notamment, l’on se rend compte que celles-ci ne s’adaptent pas forcément aux logiques du terroir. Autrement dit, les différents mandats qui sont assignés à la force barkhane française et la force onusienne (MINUSMA) sont des mandats qui ont été décidés tout en mettant le Mali sur la touche. De ce fait, ces forces militaires, à mon entendement, peuvent difficilement s’accommoder aux attentes des populations maliennes notamment celles du Nord et du Centre. Par exemple, quand tu prends l’intervention française de 2013 à aujourd’hui, elle a permis incontestablement une accalmie dans les centres urbains. Mais toujours est-il que l’objectif final recherché par cette intervention française, qui est de mettre fin à l’action violente terroriste, est loin d’être atteint pour des raisons plurielles. Et, très souvent, on n’oublie que derrière les actions militaires, il y a d’autres dimensions importantes. Au nom de la lutte contre le terrorisme, on s’intéresse à la migration irrégulière. Au nom de la lutte contre le terrorisme, les entreprises internationales opérant sur le territoire malien et dans le Sahel de façon générale sont préservés par les militaires occidentaux. Au nom de la lutte contre le terrorisme, il y a des enjeux financiers conséquents qui concernent toute la zone sahélienne qui regorge une quantité importante de minerai, du pétrole…Bref, tout ce dont l’humanité a besoin pour sa survie. Je pense qu’au-delà du levier militaire, il y a bien d’autres enjeux économiques, géopolitiques, géostratégiques qui sont là. Si l’armée française et l’armée loyale du Mali peinent à contenir la violence par le simple fait qu’il n’y a pas une coopération objective entre les deux. On va vous parler des actions conjointes menées dans les zones en conflits, mais lesquelles opérations dites conjointes sont sérieusement hypothéquées par le simple fait que la force barkhane française n’associe pas effectivement l’armée malienne dans la définition de ses différentes stratégies de lutte contre le terrorisme. S’il y a par exemple des opérations conjointes à mener par l’armée française et la force malienne, c’est la force française sui décide toute seule. Une fois que les décisions sont prises, on demande 5 à 10 militaires maliens de se joindre à eux.
C’est juste pour un complément d’effectif ?
Exactement ! En termes de stratégies, l’armée malienne ignore tout et ne maitrise même pas aussi les différents itinéraires à emprunter. Voilà des armées étrangères qui ont mis l’armée malienne sous tutelle. C’est la triste réalité. Mais les politiques peuvent le nier. Mais quand on s’intéresse à la cartographie de conflits au Mali, naturellement l’on se rend compte que l’armée malienne est sous-tutelle. Cela s’explique par le fait que les forces étrangères (Barkhane et la MINUSMA) ont un mépris vis-à-vis de l’armée nationale. Tout ceci fait que la lutte contre le terrorisme devient très complexe dans le contexte malien.
Qu’en est-il de la propagation du phénomène ?
Il faut aussi rappeler que les forces terroristes ont réussi à épouser les logiques du terroir. Elles ont réussi à enrôler un nombre important de jeunes en se basant sur les tares de l’Etat malien, la distribution de la justice, la délivrance des services sociaux de base…Ce sont ces insuffisances qui ont été récupérées par les groupes radicaux violents afin d’enrôler davantage les communautés locales. C’est là qu’on comprend aisément que toutes les solutions militaires portées jusqu’ici ont certes permis d’instaurer un semblant d’accalmie, mais elles peinent à mettre un terme à l’action violente. D’où la limite de ces actions militaires parce qu’elles ne bénéficient pas forcément d’un soutien populaire.
Vous êtes un fervent militant du dialogue avec les groupes radicaux violents. Pourquoi adoptez-vous une telle posture ?
On a vu en Irak, en Afghanistan, en Syrie, ces mêmes puissances étrangères occidentales avaient catégoriquement refusé de déclencher le dialogue avec Al-Qaida, les Talibans mais elles ont fini par comprendre que les réponses militaires, à elles seules, ne peuvent contenir l’action violente des groupes djihadistes. Des pourparlers ont été engagés entre les Etats-Unis et les Talibans, entre la France, l’Angleterre et certains éléments de l’Etat islamique. La force militaire est nécessaire, mais ne suffit pas. J’ai dit et écrit qu’il est urgent voire impérieux d’engager le dialogue avec ces groupes radicaux au Mali. On me dira qu’il y a mille et un groupes à la fois. Certes, il y a toute une kyrielle de groupes, mais les ‘’gros poissons’’ sont connus. Il y a une cartographie des acteurs qui opèrent sur le terrain. On sait qu’au centre du Mali, la katiba de Malam Dicko et celle d’Amadou Kouffa sont les plus actives. Quand on s’intéresse aux régions du Nord, la katiba Ançar Dine d’Iyad Aghali opère suffisamment dans la zone. On connait les ères géographiques d’intervention de ces différents groupes violents.
Quelles seraient les raisons et la démarche qui sous-tendent cette invite au dialogue à laquelle vous appelez de vive voix ?
L’offre du dialogue me parait importante parce que le dialogue coûte moins cher. Quand vous prenez, rien que pour l’entretien de la force Barkhane, c’est trop cher. De même que la force onusienne, elle est hyper chère. Au contraire, avec des sommes vraiment symboliques, on peut déclencher le dialogue avec l’ensemble des oulémas. Il serait plus facile de se rapprocher des groupes radicaux violents du point de vue idéologique. On sait pertinemment que beaucoup de ces groupes s’appuient sur l’interprétation littérale des textes sacrés. On a aussi des adeptes de la même pensée littérale dans nos centres urbains qui peuvent bien être une sorte de passerelle entre l’Etat central du Mali et ces groupes radicaux violents. Quand on prend le centre du Mali par exemple, on sait que Amadou Kouffa a des accointances avec les chefferies locales qui peuvent également constituer un pont entre l’Etat central du Mali et lui. Mais le hic, c’est que les puissances étrangères ne veulent pas qu’on parle de ce dialogue tandis que ces mêmes puissances ont engagé le dialogue en Libye, en Syrie, en Irak et en Afghanistan. Au bout du compte, on voit qu’on nous prend pour des idiots. Ces puissances savent pertinemment que le Mali n’a pas une armée bien structurée afin de faire face à ces groupes radicaux violents et les seuls outils efficaces et utilisables qui restent à l’Etat malien, ce sont les outils du dialogue. De ce fait, je défends partout où je passe, à travers mes travaux, qu’une des meilleurs issues à la crise malienne serait de déclencher le dialogue avec ces groupes radicaux violents : Iyad Ag-Ali, Amadou Kouffa et Malm Dicko.
On sait que ces groupes diront naturellement qu’ils ne veulent pas voir la force française, onusienne lors du dialogue. De l’autre côté aussi, on nous dira également qu’on ne peut pas dialoguer avec des gens qui ont tué des innocents, violé ou fait ceci ou cela. Mais ce qu’on reproche aux mêmes groupes radicaux violents, est valable pour les groupes indépendantistes du Nord Mali qui ont tué, saccagé, violé. Mais en dépit de toutes ces exactions, on a fini par se mettre autour d’une table et signer les accords de la paix et de la réconciliation d’Alger. Maintenant, je ne sais pas en quoi on pourrait avoir une lecture à géométrie variable face à des acteurs qui ont tous des mains tachetées de sang.
Il est de la responsabilité de l’élite politique malienne de prendre son destin en main, d’avoir le courage d’heurter les sensibilités des puissances occidentales afin de déclencher un tel dialogue avec les groupes radicaux violents. Quand on aura déclenché le dialogue, de part et d’autres, les positions seront revues. Ce qui est intéressant, c’est que quand ces groupes vont se retrouver autour d’une table de négociation, les tensions intercommunautaires connaitront un affaissement parce qu’on sait que ces tensions sont, quelque part nourries, par le référentiel musulman. Dialoguer avec ces groupes radicaux violents permettra un recul net des affrontements intercommunautaires.
Vous avez parlé du dialogue. Mais qui peut prendre une telle initiative et comment piloter tout ça ? Quels seraient les préalables ou termes de référence à cet éventuel dialogue ?
L’initiative revient à l’Etat central. Ce n’est pas une communauté, ni un enseignant encore moins un journaliste de déclencher un tel processus. Et ce qu’on ne dit pas souvent, c’est que quand vous allez sur le terrain, les acteurs interrogés dans leur écrasante majorité, prônent le dialogue avec ces groupes radicaux violents. Ce qui n’est pas suffisamment relayé par les médias. Une des études récentes de l’International Crisis Group montre effectivement ce besoin d’aller vers le dialogue exprimé dans les parties en proie à l’insécurité. Je pense qu’au nom de la démocratie, il faut écouter ces acteurs, au nom de l’inclusion et du vivre-ensemble, il faut les écouter. Et le savant musulman a toute sa place dans ce dialogue pour décrypter et déconstruire le discours de ces partisans de la pensée littérale. Ce qui permettra de faire comprendre à ces djihadistes que leur argumentaire ne tient pas. Les textes sacrés restent l’arme la plus redoutable pour la déconstruction du discours des auteurs de violence au nom du référentiel musulman.
En quoi ce dialogue sera-t-il différent ou semblable dans sa démarche avec les pourparlers qui ont abouti aux accords d’Alger ?
Ce qu’on ne dit pas aux gens, c’est ce que les termes de référence des accords d’Alger ont été élaborés en mettant sur la touche les vrais acteurs. Partout au Mali, je rappelle que ce ne sont pas les bergers, les journalistes, les agriculteurs qui ont déclenché cette crise. Cette crise a pris de l’ampleur à cause de l’immixtion du référentiel musulman. L’accord pour la paix devait impérativement intégrer les groupes radicaux violents. Ils constituent le moteur de l’insécurité. De nos jours, les gens qui sévissent réellement au Mali tout comme au Burkina, se revendiquent de l’islam. Comment peut-on négocier avec d’autres acteurs tout en ignorant les acteurs les plus importants dans la compréhension de la dynamique conflictuelle au Mali ? C’est ainsi qu’on comprend aisément que les documents sur les accords d’Alger, appelés « processus d’Alger ou l’accord pour la Paix et la réconciliation », ne reflètent pas forcément la réalité du terroir. Et c’est là que nous sommes dans le déni de la réalité. Le Mali a aujourd’hui un sérieux problème de gouvernance. Mais il est important, à un moment donné, que le Mali s’assume devant son histoire. Vouloir s’opposer aujourd’hui à des puissances étrangères, on peut même risquer sa vie.
Puisqu’il est avéré que l’Etat n’est plus capable de nous protéger, il faut négocier avec ces groupes radicaux violents. La crise malienne doit être résolue par les Maliens eux-mêmes. Les autres ne doivent être que des appuis. Mais ce à quoi nous assistons, c’est que les appuis deviennent l’essentiel, l’essentiel devient l’accessoire. Voilà un pays aujourd’hui où il y a beaucoup d’acteurs régionaux et internationaux, mais qui ont fini par écarter les acteurs nationaux.
Est-ce que les défaillances de l’Etat en matière de gouvernance et la contestation sérieuse de sa légitimité ne peuvent pas conduire à un refus des populations locales et des groupes radicaux de voir l’Etat conduire ces pourparlers ? La société civile malienne ne serait-elle pas l’acteur le plus approprié pour essayer de nouer le fil du dialogue ? Si oui, est-elle suffisamment outillée et à équidistance entre les différentes forces en jeu ?
Quelle que soit la fragilité d’un Etat ou ses défaillances, il y a quand même des questions régaliennes. Ce n’est pas à une société civile ou une entité confessionnelle de faire ce travail. Il est vrai qu’au Mali, il y en ce moment un gros souci de légitimité à propos de l’Etat, mais en dépit de tout cela, l’Etat est indispensable. Il doit être le garant, quelle que soit la provenance de l’initiative. Il faut aussi rappeler que tous les fonctionnaires ou agents de l’Etat ne sont pas aussi rejetés par ces groupes radicaux violents. Toujours est-il qu’on peut trouver des acteurs qui pourraient aider l’Etat central, de manière indirecte, à déclencher un tel processus. La société civile et les leaders religieux ont beau été engagés, la partition de l’Etat est indispensable.
Et l’opposition malienne dans tout ça ?
Elle fait son mieux, faut-il le rappeler, en se prononçant sur la question. Mais les positions sont très ambigües parce que les politiques font des déclarations tout en restant très prudents à l’endroit notamment des puissances occidentales. Ce qui fait que cette question de la prise en compte de l’avis des populations du terroir n’est pas là. C’est la catastrophe. Les gens parlent tout en faisant attention à ne pas faire entorse aux Etats-Unis, à la France, etc. Sinon comment prétendre défendre un peuple tout en ayant peur de porter la voix de ce peule ? Même l’opposition est dans le déni, elle aussi. Je n’ai pas entendu un leader influent, appeler à ce dialogue de peur d’être mal vu. Quand on gère un Etat avec de tels calculs et raccourcis, les conséquences s’appellent la catastrophe. Il faut sortir du déni de l’évidence, du simplisme.
En conclusion, peut-on dire que les forces étrangères venues aider, appuyer l’Etat malien constituent-elles aujourd’hui le blocage, le problème même ?
Les puissances le sont, à certains égards d’autant plus que les mandats qui sont le leur ne sont pas forcément en phase avec les attentes des populations maliennes. De ce fait, l’action de ces puissances devient contre-productive en termes de lutte contre le terrorisme et en termes même de contribution à la paix et à la stabilité sociale. C’est pourquoi, des soulèvements sont observables au Sahel pour demander, sans équivoque, le départ immédiat de ces différentes forces étrangères sur le territoire malien. Je pense que la question de l’utilité de ces forces se pose dans le contexte malien d’aujourd’hui.
De la mise en place de la Fédération des Associations islamiques du Sénégal à l’implantation du Bureau régional de la Ligue islamique mondiale (LIM) au Sénégal, en plus du raffermissement des liens entre notre pays et le Maroc ou l’Arabie Saoudite et l’Egypte, d’éminentes personnalités de l’Ecole de Tivaouane se sont longtemps investies et ont accompagné le processus qui a conduit à la situation enviable des relations arabo-sénégalaises actuelles.
Dans l’histoire de la diplomatie et des relations entre le Sénégal et le monde arabe, Tivaouane et les nombreux autres foyers religieux qui y sont liés, ont joué un rôle déterminant et ce, avent même l’indépendance.
Cet état de fait découle de liens historiques qui surplombent les seules réalités diplomatiques ou bilatérales et sont le fruit d’un long processus dans lequel le religieux comme élément facilitateur a eu un incontestable rôle.
Sans parler de la période récente où des personnalités religieuses issues de Tivaouane ou de son Ecole comme Serigne Abdoul Aziz Sy Al-Amine et El Hadji Moustapha Cissé de Pire ont incarné le statut de véritables interfaces entre le Sénégal indépendant et le monde arabe, la ville de Maodo a toujours été au centre de ces relations.
La prédominance du paradigme institutionnel dans l’analyse du fait diplomatique, sous nos tropiques, a fait que cet aspect reste méconnu parfois même des spécialistes qui ne vont pas au-delà des circuits officiels, des déclarations ou encore des accords bilatéraux.
Il faudrait revisiter l’histoire des liens entre le Sénégal et le Maroc pour comprendre pourquoi le royaume chérifien lui-même a toujours tenu à mettre en avant la dimension religieuse comme capital symbolique que Rabat a fini par convertir en capital diplomatique…
Dans Falâ Budda Min Shakwâ à travers une belle complainte poétique, Maodo exprime son regret de ne pouvoir se rendre physiquement à Fès (Wa kam ashtakî indal ilâhi ziyâratan). Mais, l’impossibilité matérielle pour Seydi El Hadj Malick de se rendre à Fès n’a pas empêché des échanges entre Tivaouane, la communauté tijânie du Sénégal et la ville de Fès ainsi que d’autres régions du Maroc.
Ces échanges qui ont comme cadre principal la confrérie et l’appartenance commune à celle-ci, ont amené certains grands dignitaires religieux marocains à effectuer des visites au Sénégal, dans une période où les conditions administratives des déplacements étaient plus que difficiles. Non seulement les moyens de communications n’étaient pas très développés, mais que les autorités coloniales françaises voyaient d’un mauvais œil tout contact entre les deux rives du Sahara dans le sillage du rapport Willaim Ponty.
D’après nos entretiens, ces relations initiées, déjà, à son époque, par El Hadj Malick Sy lui-même, se sont poursuivies après sa disparition en 1922. Ainsi, son fils aîné et premier calife Seydi Ababacar Sy reçut la visite au Sénégal du petit-fils du fondateur de la confrérie Tijâniyya Cheikh Muhammad al Tayyib al-Tijânî en 1948. Cette visite inscrite dans la continuité des rapports entre la famille Sy et le Maroc sera suivie de celle de Sayyid Ben’amar al-Tijânî dès 1951 dont Serigne Mansour Sy Dabakh garde encore d’intéressantes traces photographiques.
Il faut savoir que ces relations et ces échanges ont toujours été inscrits dans une certaine continuité de part et d’autre. Rappelons que, de son vivant, El Hadj Malick Sy avait essayé de rapprocher du Maroc sa famille, en l’occurrence son fils aîné, Seydi Ababacar Sy, en le chargeant d’organiser la visite et la tournée au Sénégal de cheikh Ahmad ibn Sâ’ih, de la branche Tijâniyya de la région de Rabat où se trouve encore leur Zâwiya.
C’est cette même volonté qui se manifesta à l’occasion des visites de 1948 et de 1951 lorsque Seydi Ababacar Sy confia son frère et futur calife El Hadj Abdou Aziz Sy d’organiser la tournée des marabouts Ben ‘Amar et Tayyib al-Tijânî à travers les villes et villages du Sénégal, pour rencontrer les communautés tijânies.
C’est pourquoi, lors de nos études de terrain, on nous fit savoir, au niveau de la famille Sy, que le « vœu cher » formulé par El Hadji Malick Sy de se rendre à Fès et qui ne s’est jamais matériellement réalisé a été « exaucé » et s’est concrétisé lorsque son fils El Hadji Abdou Azîz Sy se rendit à Fès en 1949.
Signalons que cette visite à Fès s’est effectuée lors de son retour du pèlerinage à la Mecque, comme il est de coutume chez les Tijânis sénégalais. Cette visite est d’une importance clé dans l’approche des relations entre le Maroc et la communauté tijânie du Sénégal dans le sens où la personnalité en question l’a effectuée comme le représentant de tous les fidèles du pays, en faisant ou renouvelant l’allégeance à la zâwiya-mère.
D’après nos sources, très proches des personnalités concernées, c’est lors de ce séjour au Maroc que le futur calife de la Tijâniyya sénégalaise fit la connaissance d’un certain Ahmad Bensûda. Celui-ci deviendra, plus tard, un des Conseillers du Roi Hassan II très attaché à la qualité des relations entre le Maroc et le Sénégal, notamment, celles liant le Trône aux Zâwiya Tijaniyya.
Il s’est, ainsi, établi une tradition de coopération et de relations « personnelles » entre la communauté tijânie du Sénégal et le trône alaouite du Maroc. On pourra, par la suite, constater que, simultanément,, étaient nées des relations semi-officielles entre acteurs politiques et relais religieux d’une coopération bilatérale.
Ainsi, El Hadj Abdou Aziz Sy de Tivaouane et Thierno[1] Saïdou Nourou Tall, petit-fils d’El Hadj Omar Tall seront les deux personnalités religieuses sénégalaises à aller accueillir le Roi Mohamed V du Maroc, lors de son escale à Dakar, alors de retour d’exil de Madagascar suite à de nombreux efforts de la part de personnalités sénégalaises religieuses comme politiques.
La zâwiya de Fès n’a jamais sous estimé le rôle et la place des communautés tijanies et leurs marabouts dans les rapports entre le Sénégal et le Maroc. C’est certainement ce qui a assuré à ces rapports la continuité qui les caractérise encore aujourd’hui.
D’ailleurs deux émissaires – et non des moindres – seront présents à Tivaouane suite au décès de Seydi Muhammad al-Mansour Sy, fils d’El Hadj Malick Sy. En 1922 Il venait – juste une semaine avant - de succéder à Seydi Ababacar Sy.
Ce sera l’occasion pour ces deux émissaires de Fès – Sidî Ahmed Tijânî et Chérif Muhammed al-Habîb Tijânî- d’assister à l’installation d’El Hadj Abdou Azîz Sy comme calife de la Tijâniyya sénégalaise.
Serigne Maodo Sy fils d’El Hadji Abdoul Aziz Sy Dabakh avait eu la générosité de nous fournir une copie de cette lettre manuscrite adressée par la Faqîh Cheikh Ahmad Sukayrij à cette même famille, à la mort d’El Hadj Malick Sy afin d’appeler à l’unité de la communauté Tijânie[2].
Même à la mort d’El Hadji Malick Sy en 1922, les rapports entre la ville de Tivaouane et, à travers elle, la communauté tijânie du Sénégal et le Maroc se sont distingués par cette imbrication d’un processus de coopération bilatérale et d’une légitimation religieuse de « liens historiques entre deux peuples ».
Les politiques tendent à se servir de cette réalité dans le cadre de la diplomatie d’influence. Elle devient, même, un outil de politique extérieure dans le sens où elle facilite la réception positive des initiatives bilatérales. La Maroc l’a bien compris dans sa stratégie africaine contemporaine.
Dans le cadre de cette tournure particulière des rapports sénégalo-marocains, on pourrait dire, sans excès, que les relations entre la «zâwiya et le trône » ont connu une intensification sans commune mesure, sous le règne de Hassan II.
Rappelons que le Roi du Maroc d’alors procédera à l’inauguration de la Grande Mosquée de Dakar en 1964. On peut même se demander si les autorités sénégalaises, dans l’organisation protocolaire de cette cérémonie, n’avaient pas, déjà, une parfaite compréhension de l’enjeu de la Tijâniyya dans leurs rapports avec le royaume chérifien. Sans être l’imam « officiel » de la Grande Mosquée, par la suite, El Hadj Abdou Azîz Sy, par ailleurs, calife de la Tijâniyya au Sénégal, fut désigné par les autorités sénégalaises pour diriger la prière inaugurale du vendredi avec, précise, Pape Makhtar Kébé, « deux remarquables sermons prononcés devant Sa Majesté Le Roi Hassan II ».
Ainsi, d’après nos multiples entretiens avec les guides religieux et muqaddams de la Tijâniyya, nous avons toujours senti la volonté unanime de placer les relations sénégalo-marocaines à un niveau « exceptionnel ». Les différentes familles de la confrérie essayent, même, de mettre en exergue leur proximité avec le royaume chérifien par l’intermédiaire de la « zâwiya mère » de Fès. Ainsi, on note cet aspect chez les autres acteurs de la Tijâniyya sénégalaise qui ont, tous, leurs réseaux de relation au Maroc pourvu qu’ils puissent accéder à la reconnaissance de la zâwiya-mère de Fès. A côté des relations entre Tivaouane et le Maroc d’autres obédiences tijânies ont établi de nombreux contacts avec le royaume, utilisant les réseaux confrériques.
La dernière tournée de l’actuel Khalife Général des Tidianes Serigne Mbaye Sy Mansour a été l’occasion d’une réception au Ministère des Habous et des Affaires Islamiques, accueillis par Ahmed Toufiq qui voyait en cette visite une continuité des rapports historiques.
Mais, le Maroc qui est dans une stratégie de promotion de son modèle islamique comme partie intégrante de sa diplomatie d’influence sur le continent, a bien réalisé l’importance capitale de la Zawiya de Tivaouane en tant qu’alliée incontournable avec laquelle il partage le Fiqh malikite, le dogme ash’arite et le Taçawwuf dans le contexte d’une forte concurrence des offres religieuses et spirituelles.
Répondant à une interview de Sputnik France, le Directeur de Timbuktu Institute revient sur la situation au Sahel qui a beaucoup marqué les discours au Sommet Russie -Afrique qui s'est tenue à Sotchi et analyse certaines déclarations de chefs d'Etats comme l'expression d'un certain désarroi.
Pour Bakary Sambe, directeur de l’Institut Timbuktu basé à Dakar, fondateur en 2012 de l’Observatoire des radicalismes et des conflits religieux en Afrique (Orcra) et professeur à l’université Gaston-Berger de Saint-Louis au Sénégal, les États sahéliens sont à la peine pour financer l’effort de guerre que représente la déstabilisation, depuis 2012, par divers groupes terroristes ayant envahi la région en s’engouffrant par le nord du Mali.
Ils cherchent donc à mutualiser leurs efforts, mais sans toujours y parvenir, afin de contrer l’avancée de ces groupes djihadistes, au sud, vers les États côtiers. D’où, selon lui, une nouvelle logique africaine de promouvoir le multilatéralisme sur le plan international en appelant la Russie à rejoindre la coalition de lutte contre le terrorisme au Sahel, dont elle ne fait pas partie pour le moment. Pas plus d’ailleurs qu’elle n’a obtenu une position d’observateur au G5 Sahel en raison, selon plusieurs sources diplomatiques, de l’opposition jusqu’ici de la France.
«La Russie bénéfice du statut de pays non colonisateur aux yeux des populations africaines. Elle est donc un acteur différent, plus désirable. Il ne faut pas séparer cette demande d’une opinion montante en Afrique francophone que les interventions étrangères feraient partie du problème, en même temps que d’un rejet très fort de la France comme en témoignent actuellement les débats sur le franc CFA. La Russie apparaît donc comme un allié moins encombrant que les autres puissances occidentales, notamment l’ex-puissance coloniale», a déclaré au micro de Sputnik le directeur de l’Institut Timbuktu.
Pour le chercheur sénégalais, grand spécialiste de la radicalisation au Sahel, ces déclarations du président Roch Marc Christian Kaboré sont aussi une façon subtile de rappeler aux bailleurs de fonds du G5 Sahel leurs promesses d’aide financière qui n’ont pas été tenues à la hauteur des engagements initiaux. Au point que des pays comme la Chine, voire les États du Golfe, ont fini par être sollicités.
«C’est une manière de prendre Paris au mot et de lui forcer un peu la main puisque lors du dernier sommet du G7 à Biarritz, la France a demandé davantage d’ouverture pour financer le G5 Sahel à l’Afrique elle-même, mais aussi à des pays comme l’Allemagne, par exemple. Face à la montée du terrorisme et à l’insécurité grandissante au Sahel, le désarroi des chefs d’État africains est apparent. D’autant que la grogne des populations de ces États ne va pas s’arrêter là: celles-ci souffrent de plus en plus des conditions de vie difficiles dues au manque de sécurité dans cette région, alors qu’elles sont elles-mêmes de moins en moins en sécurité», estime Bakary Sambe.
Source : Sputnik France https://fr.sputniknews.com/afrique/201910291042340202-apres-sotchi-quelle-implication-de-la-russie-dans-la-lutte-contre-le-terrorisme-au-sahel/
Timbuktu Institute, qui vient d’installer son Bureau Sahel-Bassin du Lac Tchad à Niamey ouvre un nouveau chapitre de recherche-action à propos des questions migratoires et des enjeux sécuritaires pour l’Europe et ses partenaires de la région. Cette thématique de recherche va couvrir aussi bien les volets migratoires que la question de la réinsertion socio-économiques. Ce sera à partir d’une approche holistique de la question migratoire très souvent confinée dans le domaine du contrôle des flux et des mesures répressives.
Récemment, s’est tenue à Las Palmas de Gran Canaria, la 7e rencontre des Envoyés spéciaux UE et partenaires du Sahel avec une forte participation des différents services de coopérations européens dont la France, la Suisse, la Norvège, la Finlande, la Belgique, souligne Bakary Sambe. Selon le directeur de Timbuktu Institute, "la question de la coopération était au centre de nombreux échanges pour aller au-delà du sécuritaire et s’ouvrir sur les perspectives basées sur le développement et la coopération. L’idée du Fonds fiduciaire européens de même que d’autres initiatives de l’OCDE entrent dans le cadre d’un tel tournant dans l’approche de la question migratoire à laquelle souscrit Timbuktu Institute".
En effet, depuis des décennies la migration en Afrique de l’ouest est une des plus denses et ne cesse de s’intensifier d’année en année. En 2000, le nombre de migrants intra-africains s’élevait déjà à 12,5 millions et ce chiffre est monté jusqu’à 19,4 millions en 2017[1].
En dépit de la croyance populaire, les migrants quittant l’Afrique subsaharienne n’ont pas tous l’intention de traverser la méditerranée pour arriver en Europe, la plupart ont pour destination finale un autre pays de leur communauté économique. En effet, d’après une étude de la CNUCED, 47% des migrants internationaux issues de pays de la CEDEAO vivent dans un pays de la même zone.
En Afrique plusieurs zones de transit important sont à noter dont le Niger qui fait partie des 10 plus grands pays de transit au monde, avec des zones d’affluence comme Agadez, Séguédine et Arlit.
Les flux migratoires à travers le Niger se structurent autour de plusieurs sous‐canaux, les principaux reliant d’une part, le Sahel à l’Afrique côtière et, d’autre part, le Sahel à l’Algérie et à la Libye. Le Niger est actuellement avant tout un pays de transit et d’émigration. Des filières migratoires se sont consolidées au fil du temps, associant l’installation pérenne d’un flux migratoire circulairesouvent correspondant à des activités agricoles saisonnièresgénéralement compris entre six et sept mois[2].
Les migrants utilisant le Niger comme pays de transit proviennent principalement du Nigéria, de la Gambie, du Mali, du Sénégal et dans une certaine mesure du Ghana, du Liberia, de la Sierra Leone et de la Cote d’ivoire[3].
Cela s'explique par plusieurs raisons, comme la position géographique stratégique du Niger par rapport à la Libye qui est l'un des principaux pays d’accueil de migrants irréguliers ainsi que d’autres pays de la région à forte taux migratoire. Les couloirs d’Agadez, du Niger–Sabha et de la Libye concentrent la majeure partie des flux migratoires transsahariens.
Flux migratoires observés sur certains axes du Niger de Janvier à Février 2019
Mois |
Flux entrants |
Flux sortants |
Janvier |
24808 |
21924 |
Février |
34875 |
35402 |
March |
44900 |
47819 |
April |
64356 |
68326 |
Mai |
64356 |
68326 |
Juin |
101231 |
105425 |
Juillet |
110673 |
124450 |
Aout |
131490 |
141862 |
Septembre |
142354 |
188369 |
Total |
719043 |
801903 |
Source IOM/DTM, Flow monitoring report, dashboard January to February 2019
Le tableau ci-dessus nous montre l’importance des flux migratoires à travers le Niger. Ces données ont été collectées sur des points de points de suivis des flux nommés FMP (flow monitoring points) installés par l’OIM dans des zones d’affluences comme Agadez, Séguédine, Arlit… Même si ces données ne représentent pas l’ensemble des flux mensuels de migrants, ils donnent une vue d’ensemble de leur importance.
Quand on observe les données mensuels de l’OIM sur l’étude des flux migratoires au Niger, on se rend compte qu’il y a principalement 3 types de profils de migrants au Niger les migrants économiques, les migrants saisonniers,et les migrants de courte durée[4].
La migration économique du Niger vers le sud de la Libye a également un effet, avec une migration économique circulaire bien établie entre les deux pays. Depuis de nombreuses années, les Nigériens ont l'habitude de travailler pendant plusieurs années en Libye ou en Algérie avant de retourner au Niger.
Ce statut de pays de transit fait peser beaucoup de pression en provenance de pays d’accueil européens dont la France, l’Italie et bien d’autres pour que le Niger prenne des dispositions dans le but de résoudre la question de la migration irrégulière. Mais, d'après Bakary Sambe, "le Niger qui a déjà fourni de nombreux efforts, ne pourra le faire qu’en étroite collaboration avec les cadres régionaux existants comme le G5 Sahel et la CEDEAO. Le dernier sommet extraordinaire de la CEDEAO sous présidence nigérienne mais aussi la rencontre de Las Palmas semble confirmer une certaine volonté de synergie dans les actions pour la sécurité et le développement"
On sait que le fort flux de migrants pose aussi des problèmes de sécurité nationale (l’arrivée de migrants et de réfugiés rend difficile d’installer un certain climat de sécurité stable). Aussi les conflits au Mali, en Lybie et les attaques de Boko Haram au Niger ont mis le Sahel dans un climat d’instabilité sécuritaire.Ces crises ont par ailleurs permis le développement de la criminalité transnationale, notamment le trafic et la traite des migrants.
A partir d’un el constat, on peut donc comprendre le durcissement de la politique migratoire du Niger, qui adopte une gestion de plus en plus répressive des flux. Le principe de liberté de circulation est souvent mis au second plan pour favoriser l’aspect sécuritaire et le maintien de l’ordre public En 2015 a été adopté la Loi n° 2015-36 du 26 mai 2015 qui a pour but la protection des migrants, la sanction du trafic illicite de migrants (qui peut aller jusqu’à 30 ans[5] d’emprisonnement) et la sécurisation des frontières.
C’est dans le cadre de ce dernier aspect que s’inscrit le projet de monitoring des flux aux frontières du gouvernement nigérien lancé en octobre 2019 qui vise à améliorer la lutte contre la migration irrégulière.
L’un des problèmes principaux de ces flux importants de migrants au Niger demeure la protection des droits de ces derniers qu’ils soient réguliers ou clandestins. En effet les migrants en transit au Niger sont souvent victimes d’extorsion de fond, de problèmes administratifs, leur droit de libre circulation leur est souvent dénié surtout au niveau des points de contrôle policier, ce qui met ceux-ci dans une situation de danger permanent.Aussi beaucoup de migrants périssent dans le désert nigérien durant sa traversée vu les conditions précaires dans lesquelles les passeurs les mettent.
Le Niger doit pouvoir compter sur ses partenaires internationaux notamment l’Union européenne à travers le programme intitulé Mécanisme de réponse et de ressources pour les migrants, qui vise à aider le gouvernement dans sa gestion des flux migratoires par le développement économique et social basé sur la migration circulaire.
L’Organisation internationale pour la migration (OIM) est un autre des partenaires phares du gouvernement nigérien dans sa gestion des flux migratoires à travers l’assistance humanitaire aux migrants en détresse, le relèvement précoce des communautés nigériennes, la réintégration socioéconomique des retournés et la stabilisation communautaire, le renforcement des capacités techniques et opérationnelles en matière de gestion des flux migratoires, les campagnes d’information et de sensibilisation sur les risques liés à la migration irrégulière, l’appui technique en cas d’urgence ou catastrophe naturelle, la lutte contre la traite et le trafic des personnes et la mobilisation de la diaspora pour le développement.
Même si le problème de l’importance des flux de migrants passant par le Niger demeure actuel, il faudra quand même noté que le nombre de migrants transitant par ce pays et mêmepar la Lybie selon les donnéesrecueillies par l’OIM a considérablement baissé ces dernières années. Le Niger a mis en place un contrôle plus accru des frontières, à procéder à la fermeture de plusieurs maisons de transit de passants ainsi qu’à l’arrêt massif de trafiquants de migrants.
Des discussions vont être ouvertes avec les parties prenantes aussi bien au niveau régional qu’auprès des partenaires internationaux du Niger et des pays sahéliens pour le lancement de cette initiative de recherche-action. Les résultats pourront aider à accompagner les projets en cours comme ceux prévus dans le cadre des actions de l’Union Européenne, des pays-membres mais aussi des entités des Nations Unies comme l’OIM et l’UNHCR.
Joseph Christophe Adams Diouf
Expert Junior Migrations et apatridie (Timbuktu Institute)
[1] Le développement économique en Afrique : les migrations au service de la transformation structurelle ; rapport 2018, CNUCED
[2]Enquétesur les politiques migratoires en Afrique de l’Ouest, 2016 ; page 249
[3] Irregular migration between West Africa, North Africa and the Mediterranean, page 26, préparé par Altai Consulting pour OIM Nigeria | ABUJA - novembre 2015
[4]Point de suivi des populations du Niger, OIM/DTM, avril 2019
[5] Article 18 de la loi n° 2015-36 du 26 mai 2015 relative au trafic illicite de migrant
Sur invitation du Ministère espagnol des Affaires étrangères de l'Union européenne et de la Coopération, Dr. Bakary Sambe, Directeur de Timbuktu Institute, basé à Dakar et à Niamey, a pris part à la 7e Rencontre des Envoyés spéciaux de pays l'Union Européenne et partenaires au Sahel.
Dans un contexte où la région sahélienne est marquée par la recrudescence des attaques au Burkina Faso et au Mali, avec une réelle menace sur la sécurité et la stabilité du Sahel, l’Espagne a abrité à Las Palmas de Gran Canaria, la 7eme rencontre « informelle » des Envoyés Spéciaux et partenaires du Sahel les 17 et 18 octobre derniers.
Dr. Bakary Sambe a déclaré que "cette réunion sur l'initiative de l'Espagne va donner sans doutre donner un nouvel élan à une meilleure synergie entre les organisations sous-régionales dans le domaine de la paix et de la sécurité" . Les échanges étaient "constructifs dans un esperit de partenariat de conscience commune des défis qui nous interpellent tous. Je remercuie vraiment l'Ambassade d'Espagne au Sénégal d'avoir bien voulu faciliter la participation de Timbuktu Institute"
Organisée dans l’enceinte de Casa África de Las Palmas, cette réunion a traité de plusieurs sujets avec la participation de diplomates européens, africains issus d’organisations régionales et sous-régionales et d’experts de haut niveau venus de plusieurs pays.
Contribuant au soutien financier de l’Union européenne aux plans bilatéral et multilatéral, au fond fiduciaire de l’Union européenne pour l’Afrique (EU Trust Fund for Africa), l’Espagne, à l’instar de ses pairs européens, « assuré un soutien militaire et sécuritaire pour lutter contre le terrorisme au Sahel », confie un diplomate.
La question de la sécurité et de la stabilisation du Sahel, le développement économique, de même que la contribution des femmes dans la consolidation de la paix et de sécurité, ont été discutés pendant plusieurs sessions en huis-clos dans la salle de conférence de Casa África.
Pour rappel, Casa África, dirigé par José Segura Clavell, est un consortium de diplomatie publique et économique espagnole au service de l’action extérieure de l’Etat sur le continent africain dont le but est de « créer un dialogue et des relations durables entre l’Afrique et l’Espagne ». Cette institution espagnole collabore aussi avec les médias africains et les intellectuels et experts dans plusieurs domaines « pour raffermir les liens avec le continent ».
La région demeure une priorité stratégique pour l’Union européenne et pour l’Espagne qui avaient déjà pris part à la conférence internationale de haut niveau sur le Sahel du 23 février 2018.
Le Président Issoufou Mahamadou arrive en tête du CEDEAO dans un contexte où la région est énormément inquiète par la menace terroriste et d'autres envies sécuritaires. "Et la nécessité d'une synergie des partenariat est ressentie aussi bien par les pays de la région que par leurs partenaires"
Selon Dr. Bakary Samb, Directeur de Timbuktu Institute - Centre africain d'études sur la paix Qui a ouvert, récemment, un nouveau bureau à Niamey, « La Présidence Issoufou devra traiter les grandes questions d'intérêt régional, de sécurité, au delà des orientations et des priorités distinctes de chaque organisation ».
Pour ce spécialiste des réseaux transnationaux dans le Sahel, joint par Niamey et les 2 Jours, le rôle des historiques et du Niger dans le G5 qu'il a beaucoup inspiré, sa place stratégique dans la sous-région lui permet d'uniformiser les positions et de rapprocher la CEDEAO du G5 Sahel
"Le dernier sommet extraordinaire de la CEDEAO à Ouagadougou était un nouvel élan vers une coopération plus soutenue entre les deux organisations, selon Bakary Sambe qui estime que même les partenaires internationaux du Sahel encourageraient une telle démarche comme le montre la derni_re rencontre des Envoyés spéciaux de l'UE au Sahel tenue récemment à Las Palmas dans l'enceinte de Casa Africa", analyse le directeur de Timbuktu Institute.
Pr. Moulaye Hassane- CNESS : « L’installation de Timbuktu Institute au Niger va mieux nous aider à comprendre et prévenir l’extrémisme violent »
Alors que le Sahel est fortement secoué par des attaques et conflits asymétriques d’une fréquence préoccupante, Timbuktu Institute-African Center For Peace Studies a procédé, lundi 14 octobre 2019, à l’ouverture de son nouveau Bureau à Niamey. La cérémonie de lancement officiel des activités de l’antenne de ce Think Tank spécialisé dans la prévention des conflits et de l’extrémisme violent au Niger, a suscité un réel engouement et la participation de divers acteurs de haut niveau.
Par Mamadou Yaya BALDE (STAGIAIRE)
C’est dans un contexte sécuritaire sous-régional assez délétère que Timbuktu Institue-Africain Center For Peace Studies a pris l’heureuse décision d’ouvrir un Bureau à Niamey, ce lundi 14 octobre 2019. En marge de cette cérémonie, le Dr. Bakary Sambe, Directeur dudit institut et M. Moulaye Hassane, enseignant-chercheur à l’Institut de Recherches en Sciences humaines de l’Université Abdou Moumouni de Niamey, ont co-animé une conférence sur un thème d’une brûlante actualité libellé comme suit : « Lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent au Sahel : synergie des partenariats et renforcement de la résilience communautaire ».
Au cours de leurs communications respectives, Dr. Bakary Sambe, fondateur, depuis 2012, de l’Observatoire des radicalismes et conflits religieux en Afrique (ORCRA) et Pr. Moulaye Hassane, ancien ambassadeur du Niger en Arabie Saoudite ont tour à tour examiné la question de la lutte contre le terrorisme au Sahel. D’où toute la pertinence et le bien-fondé de cette nouvelle antenne de Timbuktu Institute à Niamey, venue à son heure.
A en croire le Dr. Bakary Sambe, le choix porté sur le Niger pour l’ouverture de ses bureaux est loin d’être fortuite : « A u regard de la dimension géopolitique et géostratégique du pays, je pense qu’il était important que notre bureau soit installé ici et qu’on puisse travailler avec tous les acteurs, aussi bien universitaires qu’académiques, sans oublier les décisionnaires et la communauté internationale qui donne une importance capitale au Niger dans le cadre de la lutte contre le terrorisme », a-t-il expliqué. Poursuivant, M. Sambe fait savoir que la vocation de cet institut c’est la recherche, la documentation afin de mieux formuler des recommandations utiles aux décideurs, aux pouvoirs publics ainsi qu’aux partenaires internationaux. « Nous allons faire beaucoup de recherche, du conseil et aussi de la formation avec le renforcement des capacités des décideurs mais aussi des acteurs de terrain qui travaillent sur la prévention », a-t-il poursuivi.
Pour sa part, M. Hassane perçoit l’arrivée de cet institut comme une valeur ajoutée aux nombreux efforts et actions qui se déploient dans le cadre de la prévention et de la lutte contre l’extrémisme violent. « Cet institut va nous nous aider à avoir une étude raffinée », espère-t-il. L’ouverture de ce Bureau de Timbuktu Institute à Niamey, en République du Niger, a eu lieu en partenariat avec le média d’actualité nigérien ‘’Niamey et les 2 jours’’.
La pertinence du thème et le choix stratégique porté sur le Niger pour abriter ce nouveau Bureau a suscité un intérêt certain auprès de nombreux acteurs et organismes internationaux ayant pris part aux fructueuses discussions de cette rencontre de haut niveau. Dans la salle, on pouvait remarquer la présence des universitaires, diplomates, des représentants d’organismes internationaux, des hommes politiques, des personnalités du monde judiciaire, parmi lesquelles Madame Bintou Djibo, (Représentante Résidente du PNUD, Coordonnatrice résidente du Système des Nations Unies), leur Excellence, l'Ambassadeur du Sénégal au Niger, Oumar Maal, l'Ambassadeur d'Espagne (Ricardo Mor Sola), les Représentantes de l'Ambassade de France (Laurence Brattin, Conseillère politique et Delphine Laurore, SCAC) le Représentant de l'Ambassade des Etats-Unis le Représentant Résident de la JICA (Eihiko Obata), le Représentant de la coopération UK, le Représentant résident du FNUAP (Ismaila Mbengue), un Représentant du CICR, des Représentants de l'OIM, des Représentants de Mercy Corps, les Représentants de l'USAID, Dr Saliou Gaye Ndoye (CILSS), les Députés de la Commission de Défense et de Sécurité et de Sécurité de l'Assemblée Nationale du Niger, le Directeur Général du CMEN (Ibrahim Mamane), le Représentant du Président de la Cour des Comptes, des Enseignants et chercheurs de l'Université Abdou Moumouni de Niamey, le Représentant du recteur de l'Université de Diffa, les Représentants de la HACP, du CNESS, du Projet SDS (Secrétaire exécutif Lawali Ada), et de la Police Nationale du Niger.
Monsieur le procureur de la République de Niamey (Chaibou Samna), Monsieur le vice-Président du Tribunal de Grande Instance, Maman Aminou Koundy), Monsieur le vice-Président de la Cour d'Appel (Falalou Nassirou Sofo), du Représentant de Monsieur le Bâtonnier des Avocats
(Niamey et les 2 jours) - Suite au départ des forces françaises de la base nigérienne de Madama, mise « en sommeil », le débat s’est installé autour d’un certain désintérêt par rapport à la position stratégique que représente cette région du Niger aux portes de la Libye, où la situation sécuritaire s’est beaucoup détériorée ces derniers temps. D’autres analystes penchent aussi pour la thèse d’un « mauvais calcul » au regard de l’enjeu de la stabilisation du couloir sud-libyen traversant le Niger, avec toutes les incidences sur la circulation des groupes terroristes et des armes à travers le Sahel. Mais, pour Dr. Bakary Sambe, directeur du Timbuktu Institute* basé, le récent redéploiement sur Gossi, au Mali, s’inscrit dans « la suite logique dans l’approche différenciée de l’armée française au Sahel à travers Barkhane ».
Interrogé par le site d’informations Niamey et les deux jours, ce spécialiste des réseaux transnationaux dans le Sahel et expert auprès des pays de la région sur leurs stratégies de prévention l’extrémisme violent, revient, dans cette interview, sur la nouvelle dynamique sécuritaire ainsi que les choix stratégiques qui, selon lui, expliqueraient un tel redéploiement. Mais Sambe soutient, arguments à l’appui, que le renforcement d’une approche civilo-militaire aiderait Barkhane à atténuer les incompréhensions autour d’une force qui a eu le mérite de stabiliser ces vastes zones et d’apporter un soutien précieux au Niger et aux pays de la région dans la lutte contre le terrorisme.
« Il ne suffit pas de gagner seulement la guerre contre les terroristes, il faut aussi gagner la paix avec les populations locales.»
Niamey et les 2 Jours : Barkhane est-elle une opération militaire de plus dans le Sahel ? Comment l’analysez-vous ?
Bakary Sambe : L’opération Barkhane, devenue opérationnelle en août 2014, était comme la suite de Serval déclenchée en janvier 2013, en réponse à la demande en aide du gouvernement malien suite à l’avancée inquiétante des groupes djihadistes sur la route de Konna. Cette force dont la mission est différente de Serval, a la particularité d’opérer aussi en dehors du Mali, couvrant d’autres pays avec un quartier général à Ndjaména, au Tchad. Il est vrai que ces dernières années ses effectifs sont passés de 3000 hommes à ses débuts à 4500 courant 2018, avec des troupes au sol qui ont enregistré environ une quinzaine de pertes dans leurs rangs. Cette force dont les missions peuvent être parfois floues pour certaines populations, est caractérisée par sa mobilité et l’importance stratégique des vastes étendues qu’elle couvre. Quelles que soient les questions que peuvent soulever ses interventions, leur pertinence et leur efficacité, la présence de Barkhane joue un rôle multiple : dissuasif, préventif et opérationnel avec de nombreux succès parfois peu mis en exergue, mais déterminants dans la lutte contre le terrorisme dans la région…
N2J : Mais justement, selon vous, comment, dans une telle situation sécuritaire, expliquer le départ d’un point aussi stratégique que la base de Madama au Niger ?
BS : Madama était ce qu’on appelle une base avancée, qui a été un poste de commandement tripartite (français, nigérien, tchadien). On se souvient de l’opération Mangouste en 2014. Cette base se situait à 340 km au Nord de Dirkou, avec comme vocation principale le renseignement, du moins à l’origine. C’était une sorte de filtre stratégique aux portes de la Libye, contre la descente des groupes terroristes vers le Sahel à partir du Niger via la région d’Agadez, vaste comme deux fois la France, au plus fort de la crise qui perdure encore en Libye. Il est vrai qu’à l’époque, on avait beaucoup évoqué les tentatives d’Abul Walid Al-Sahraoui qui était à la recherche d’un espace de déploiement, tout en excluant l’option du Sud algérien, domaine où ont régné pendant longtemps un certain Belmokhtar et ses hommes. Dans une telle configuration, le Niger, dans sa partie frontalière avec la Libye, représentait une priorité stratégique voire un véritable enjeu de sécurisation de la région dans son ensemble. Je ne dis pas que le Niger a perdu en importance stratégique, mais il a dû y avoir d’autres impératifs qui ont fait basculer le centre de gravité vers le Liptako et le Gourma…
N2J : Barkhane se chercherait-il, donc, ou il y a, selon vous, un véritable cadre logique qui en guiderait l’action ?
BS : Tout d’abord, je crois que l’opération Barkhane entrait dans le cadre de l’approche différenciée de la France au Sahel. Si Serval avait pour mission initiale d’éviter que le verrou stratégique de Konna ne sautât ; ce qui ouvrirait la route sur Bamako et peut-être plus loin au Sud, Barkhane pourrait être analysée sous l’angle d’une mission de sécurisation durable et de lutte accélérée contre le terrorisme au regard des urgences sécuritaires. Ensuite, la base de Madama servait d’avant-poste et de verrou afin de parer aux dangers à partir du Sud Libyen longtemps considéré – à tort ou à raison - comme le nouveau refuge naturel des groupes terroristes, surtout à l’amorce de la déroute de Daech en Irak et en Syrie. Maintenant, avec la multiplication des zones d’instabilité telle que théorisée par Al-Sahraoui, juste après Serval, des priorités semblent se signaler autour des frontières communes entre le Burkina Faso, le Mali mais aussi le Niger. On peut même dire que l’Etat Islamique au Grand Sahara (EIGS) est devenu une réalité dans cette zone avec l’accélération des attaques entre les environs de Gorom-Gorom et Markoye, mais aussi le Niger et le Mali (Liptako Gourma) et l’acharnement sur le Burkina Fasso, comme le verrou à casser pour atteindre l’Afrique côtière.
N2J : Mais pourquoi seulement maintenant, alors que les risques restent élevés dans tout le Sahel ?
BS : N’oublions pas que l’insécurité est aussi présente, par exemple, aux environs du département d’Ayerou (région de Tillabéri) avec des attaques qui se multiplient. Il doit être opérationnellement plus simple d’intervenir dans cette zone à partir du Liptako tout en couvrant les régions stratégiques aux alentours de Gao, au Mali, mais aussi des zones fragilisés autour d’Aribinda et de Dori au Burkina Faso. Il ne faut pas, non plus, oublier le caractère vital du contrôle de cette vaste zone carrefour sous la boucle du Niger, avec cette route faisant la jonction entre Bamako et Gao qu’est le Gourma et qui s’étend sur les trois départements maliens de Mopti (Centre), Tombouctou et Gao. Loin de négliger la sécurité du Niger, ce redéploiement de Barkhane me semble plutôt un positionnement stratégique sur le nouveau carrefour des menaces transnationales au Sahel, qui concerne aussi ce pays.
N2J : On dirait aussi que Barkhane a, encore, beaucoup de défis à relever notamment en termes d’image et d’une bonne compréhension de ses missions dans la région …
BS : Vous savez la complexité de la mission de forces comme Barkhane réside dans le fait qu’il ne suffit pas de gagner seulement la guerre contre les terroristes, il faut aussi gagner la paix avec les populations locales. Même après avoir relevé les défis sécuritaires, le retour à la paix dans un pays comme le Mali rudement touché par une crise qui perdure va nécessiter un long processus. Il faudrait anticiper et se projeter dans l’avenir. Il me semble que Barkhane avait expérimenté des actions civilo-militaires en participant à l’amélioration de la vie des populations partageant ses points d’eau comme les éléments de la force tentent aujourd’hui de sécuriser les activités économiques dans la zone Gossi où les habitants des localités avoisinantes avaient coutume de tenir des marchés hebdomadaires. Je pense que tout effort dans le sens de rétablir progressivement les bases d’une vie sociale, publique, économique, toute initiative pour répondre aux nombreuses urgences dans les zones d’intervention seraient en faveur d’une meilleure perception de la présence de Barkhane par les populations locales. Il sera important, à cet effet, de multiplier ces actions civilo-militaires afin d’assister et de faciliter la projection des populations vers l’avenir dans ces zones meurtries par les conflits. En fait, il faudrait agir de sorte que les actions entreprises dans le cadre de l’amélioration des conditions de vie de la force soient en même temps bénéfiques et profitables aux acteurs locaux comme les populations, les ONG actives dans la zone et même les acteurs locaux. En d’autres termes, la présence de Barkhane, en plus des opérations de sécurisation, doit participer à recréer les conditions d’une vie plus décente des populations qui ont tendance à subir l’impact des conditions draconiennes de sécurité tout en ayant le sentiment de vivre dans l’insécurité. Cette forme de conquête des cœurs pourraient améliorer et rendre plus positives les perceptions développées sur Barkhane dans la région où son rôle est jugé assez constructif. L’action de cette force qui, selon les observateurs, assure des missions essentielles, devrait, à mon sens, être accompagnée par un véritable travail de communication pour être mieux comprise. C’est dans sa relation quotidienne avec les populations locales que Barkhane devrait corriger certaines incompréhensions.
*Timbuktu Institute, basé à Dakar, annonce l’ouverture prochaine d’un bureau à Niamey, au Niger.
Propos recueillis par Babacar Cissé
Le Débat BBC Afrique-Africa Radio, 52 minutes pour comprendre l'Afrique et ses changements, vus d'ici et de là-bas.
Deux journalistes passent en revue les événements de la semaine avec un invité au cœur de l'actualité.
Cette semaine, notre invité est Dr. Bakary Sambe, directeur du Timbuktu Institute - African Center for Peace Studies basé à Dakar et à Niamey
Pour écouter le Debat :Le Débat BBC Afrique - Dr Bakary Sambe
Source: https://www.bbc.com
La tempête semble encore passée et les choses rentrées dans la normalité avec la réadmission des filles voilées à l’Institution Sainte Jeanne d’Arc. Mais pour le Dr. Bakary Sambe, directeur de Timbuktu Institute, cette affaire est « loin d’être vidée » d’autant plus que « l’Etat sénégalais n’a jamais cherché à résoudre définitivement la question plus générale de l’enseignement privé confessionnel avec une réglementation claire, égalitaire et définitive ».
Selon cet enseignant-chercheur au Centre d’étude des religions (CER) de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis « il y a bien eu une différence entre la gestion précipitée de cette crise au mois de mai, à ses débuts, et l’attitude finalement plus souple de l’Etat du Sénégal qui a heureusement cherché le dialogue. L’Etat ne pouvait pas imposer à une institution catholique une règle à laquelle il a fait de multiples exceptions ailleurs en fonction du rapport de force et des logiques électoralistes».
Pour le Dr. Sambe, par ailleurs, coordonnateur de l’Observatoire des radicalismes et conflits religieux en Afrique (ORCRA), « l’embarras de l’Etat s’explique par sa faiblesse et ses inconséquences dans la gestion des questions religieuses dans un pays où, concernant le religieux, les autorités politiques ont multiplié les exceptions sans avoir jamais voulu définir des règles ».
Se disant perplexe, le Dr. Sambe estime que « le calme est revenu, juste le temps d’une nouvelle affaire qu’on se précipitera d’étouffer avant de passer la patate chaude au prochain régime ; c’est ainsi, malheureusement, la recette politique depuis les indépendances »
« Notre Etat continuera toujours à être embarrassé par de telles questions tant qu’il ne réglera pas définitivement le statut de l’enseignement privé confessionnel ou apparenté par une législation claire et cohérente au lieu de rester sur des fuites en avant successives pour une question éminemment stratégique comme l’éducation », alerte l’auteur des « Contestations islamisées », (Ed. Afrikana, Montréal, Octobre 2018)
Selon ce chercheur spécialiste des rapports entre politique et religion, « cette affaire qui est loin de se tasser a aussi été un exutoire des crispations et frustrations accumulées : des organisations musulmanes qui y projetaient des revendications non satisfaites d’une plus grande reconnaissance de l’enseignement islamique aux divers mouvements catholiques qui ont montré les signes d’une communauté dans ses derniers retranchements ».
« Il va falloir, tôt ou tard, s’attaquer à cette brûlante question de la dualité du système éducatif sénégalais qui veut modeler des citoyens mais sans le ciment national d’une école uniformisée même avec une diversité des langues d’enseignement qui peut être une richesse », soutient Dr. Bakary Sambe.
Convaincu qu’un « règlement définitif » est nécessaire pour éviter les « crises à répétition », le directeur du Timbuktu Institute en conclut que « la question éducative reste l’une des plus grandes vulnérabilités de notre pays comme cette crise l’a montré avec des signaux évidents de crispations, mais aussi de faiblesse d’une cohésion sociale tant vantée et qui, à chaque occasion, étale ses limites de même que ses inconséquences constamment refoulées... »
Où va la Tunisie ? Comment les enjeux de cette élection présidentielle sont vus d’Afrique subsaharienne ? Quel avenir pour les réformes sociales et politiques entamées depuis la révolution ? La démocratie tunisienne est-elle encore assez enracinée au point de donner des gages pour des transitions paisibles ? Les interrogations se multiplient alors que la crainte d’errements politiques, de compromissions « décomplexées » avec les islamistes inquiètent, de plus en plus, la société civile et les franges progressistes du pays..
L'auto-immolation par le feu du jeune vendeur ambulant Mohamed Bouazizi en fin 2010[1], a constitué l’élément déclencheur du soulèvement populaire contre le régime de Ben Ali, ainsi que l’avènement inattendu du printemps arabe. En effet, partant d’un divorce avec un régime dictatorial, en passant par lachute de Ben Ali, la révolution tunisienne a fait souffler le vent de la démocratie dans le pays, et ouvrant ainsi la porte aux pays du Maghreb et même du Moyen-Orient. Le retour sur la scène politique de Beji Caïd Essebsi[2], illustre homme politique et avocat tunisien pour occuper le poste de premier ministre et assurer la transition démocratique marquait le début d’une nouvelle ère pour la Tunisie.
D’ailleurs, il va créer son propre parti, le Nidaa Tounes[3] et ainsi devenir le premier président tunisien élu démocratiquement au suffrage universel en 2014. Sous Ben Ali, un climat de crainte gagnait le quotidien des tunisiens avec une presse muselée, une liberté d’opinion bafouée, des opposants politiques emprisonnés, une instabilité constitutionnelle qui sont entre autres des ingrédients de la dictature. Au lendemain de l’insurrection de 2011, si les tunisiens savourent la liberté, le gouvernement lui, fait face à de nouveaux défis notamment l’apaisement du climat politique, la satisfaction des urgences sociales, le cas du chômage, bref rebâtir le pays.
Autrement dit, pour prendre en charge les exigences sociales, motifs de soulèvement populaire, le nouveau gouvernement va s’inscrire dans une logique de mener une réforme institutionnelle qui marquera le début d’une nouvelle époque avec une volonté de prise en charge des préoccupations des populations. Et c’est dans ce sillage qu’une nouvelle Constitution[4] a été adopté afin d’apaiser le climat politique et de fonder un Etat de droit, même si la demande en termes d’emploi des jeunes reste pressante.
La disparition de Béji Caid Essebsi, dont le mandat était presque fini, intervint dans un contexte où la Tunisie se trouvait dans une posture de reconstruction avec de nouvelles réformes qui sont engagées. Le décès du président tunisien a ainsi, bouleversé malgré une transition plus ou moins réussie qui a placé le chef du parlement et actuel président intérimaire Mohamed Ennaceur dans une situation de leadership inattendu. Il a dû occuper le fauteuil présidentiel jusqu’à la fin du mandat comme le prévoyait la Constitution en ces termes : « En cas de vacance provisoire de la fonction de Président de la République pour des motifs qui rendent impossible la délégation de ses pouvoirs, la Cour constitutionnelle se réunit sans délai et constate la vacance provisoire, le Chef du Gouvernement remplace le Président de la République. La durée de la vacance provisoire ne peut excéder soixante jours. Si la vacance provisoire excède les soixante jours ou en cas de présentation par le Président de la République de sa démission écrite au Président de la Cour constitutionnelle, de décès ou d’incapacité permanente ou pour tout autre motif de vacance définitive, la Cour constitutionnelle se réunit sans délai, constate la vacance définitive et en informe le Président de l’Assemblée des représentants du peuple qui est sans délai investi des fonctions de Président de la République par intérim, pour une période de quarante-cinq jours au moins et de quatre-vingt-dix jours au plus ».
C’est dans ce contexte inédit dans son histoire que la Tunisie organise des élections présidentielles et se trouver un dirigeant pour les cinq prochaines années. Dès lors, les tunisiens sont appelés aux urnes ce 15 septembre avec une pléthore de candidatures consacrant le multipartisme dans ce pays tout en interrogeant sur la pertinence des différentes offres politiques. Deux figures connues de la vie politique tunisienne, le Premier ministre Youssef Chahed[5], et le président intérimaire de l’Assemblée Nationale en l’occurrence Abdelfattah Mourou[6] sont très attendues.
Mais l’autre candidature surprenante dans cette course à la présidentielle sera l'avocat Mounir Baatour[7] qui se présente ouvertement comme homosexuel et défenseur du droit des gays. Elle ne sera pas finalement retenue, car l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections en Tunisie (ISIE)[8] ne validera que 26 candidatures sur 97.
Toutefois, cette course à la présidentielle va aussi se distinguer avec la participation de deux femmes qui témoignent, ces dernières années, d’une plus grande reconnaissance d’un rôle féminin sur l’espace politique et dans les institutions publiques.
Un détour historique pour apprécier la position de la Tunisie sur la question du droit des femmes nous amènera à comprendre que cette évolution qui tranche d’avec la situation dans les autres pays arabes sera encore plus prononcée dans les années à venir.
Cette place de la femme dans la société tunisienne pourrait être sujette à double interprétation. D’abord, vouloir apporter une touche de modernité en responsabilisant la femme et lui octroyer plus de liberté mais aussi une ligne de démarcation vis-à-vis du monde arabe où la la reconnaissance des droits de la femme reste limitée. Ensuite, on sait qu’au regard de la situation internationale, l’image que renvoie le pays compte beaucoup et que différents organismes internationaux apprécient la mise en évidence du rôle féminin dans les affaires des institutions publiques. Il faut aussi rappeler que la Tunisie se distingué par l’émergence sur la scène publique de fortes personnalités féministes –comme Raja Benslama - qui ont même pu investir le champ de l’interprétation des textes religieux afin de lutter contre les lectures islamistes qui brident l’évolution de la société comme dans d’autres pays arabes et musulmans.
Mais, c’est avec la nouvelle constitution adoptée le 26 janvier 2014 que ce rôle féminin sera encore mieux pris en compte avec l’octroi de plus reconnaissance des droits à travers d’abord son article 21[9] qui proclame l'égalité entre les citoyens et citoyennes devant la loi sans aucune discrimination, ensuite, l'article 34[10] garantit la représentativité des femmes dans les assemblées élues.
Si l’essence du printemps arabe était de rompre avec l’autoritarisme, la dictature, pour permettre aux populations d’épouser le modèle démocratique, la Tunisie semble le seul pays à avoir préservé les acquis issus des révolutions, même si elle rencontre certains problèmes notamment, une économie moins compétitive, ainsi qu’une forte demande sociale qui constituent des défis auxquels le prochain président devra faire face pour réaliser les rêves de progrès. De son côté, le parti islamiste Ennahda qui continué à tisser sa toile bien au-delà des couches paupérisées et des militants originels, présente officiellement un candidat mais aborde cette présidentielle quelque peu divisé.
De fortes personnalités de la société civile avec un passé militant assez marqué à gauche expriment encore des craintes quant à l’attitude de certains hommes politiques qui, pour des raisons électoralistes, n’hésiteront pas à répondre aux sirènes des islamistes au prix de « liaisons dangereuses » pour l’avenir de la démocratie en Tunisie. Au même moment les formations progressistes sont plongées dans de profondes divisions, des querelles de chapelles qui les ont considérablement affaiblies au point que l’universitaire tunisien, Mohamed-Chérif Ferjani, estime qu’à cette veille de présidentielle décisive la gauche « perd complètement la boussole[11] »
Mamadou SOW, stagiaire, Observatoire Africain du Maghreb et du Moyen-Orient, Dakar (Sénégal)
[1]https://fr.wikipedia.org/
[2]https://fr.wikipedia.org/
[3]http://www.rfi.fr/afrique/
[4]https://www.lemonde.fr/
[5]https://information.
[6]https://information.
[7]https://information.
[8]https://www.france24.com/
[9]http://www.legislation.tn/
[10]http://www.legislation.tn/
Le projet intitulé « Les jeunes des OSC et des ASC mobilisent leurs cités pour des valeurs citoyennes et contre la violence » a été soutenu par l’Ambassade de France à Dakar à travers son dispositif PISCCA (Projets Innovants de la Société Civile et des Coalitions d’Acteurs). Le principal objectif était de renforcer les capacités de ces jeunes des mouvements associatifs pour l’acquisition d’outils afin de promouvoir le vivre-ensemble, la culture de la paix et la non-violence. En effet, lors de la cérémonie de lancement le 2 juillet 2018 à Mbour, Timbuktu Institute lançait un appel solennel en faveur du rapprochement et de la réunification des fractions pour le bien du mouvement navétanes. Et tout au long du déroulement des activités du projet à Dakar, Mbour, Kaolack et Saint-Louis, des messages de paix ont été véhiculés en étroite collaboration avec les partenaires allant dans le sens d’une saison apaisée.
Malgré tous les efforts consentis par les différentes parties prenantes, la violence ne s’est pas estompée. Pour rappel, plus de 50 associations sportives de la ville avaient décidé de créer une structure parallèle conduisant à l’existence de deux championnats émaillées de perturbations et de manifestations. Sur le terrain, plusieurs fois la police a eu à intervenir pour rétablir l’ordre avant, pendant et après l’organisation des matchs et l’occupation du stade Caroline Faye qui faisait l’objet de polémique entre les deux championnats rivaux. Cette situation a abouti à l’interdiction des activités de navétanes depuis le 28 janvier dernier, à la veille de la campagne présidentielle de février 2019. Fort heureusement, la plupart de ces ASC frondeuses ont rejoint la « grande famille », l’organisme départemental de coordination des activités de vacances (ODCAV) authentique dirigé par Pape Amar Mbodj. Un grand pas vers l’organisation d’un championnat sans risque de violence.
C’est ce mardi 27 août 2019 que le Préfet du département de Mbour, Saër NDAO sort enfin l’arrêté tant attendu portant levée de la suspension des activités du championnat national populaire. En effet, les autorités administratives du département avaient interdit les activités de « navétanes » depuis le 28 janvier dernier, veille de la campagne présidentielle. Suite à des concertations sérieuses entre le Préfet et les acteurs des tous bords du mouvement, les matchs peuvent enfin démarrer sur toute l’étendue du département à compter de la date de publication de l’arrêté n° 19-528 / DMB / P. Un ouf de soulagement pour les dirigeants et supporters du football amateur mbourois qui ont vécu la saison dernière dans la division.
A la capitale, la saison passée a été émaillée de scènes de violence graves et un manque criard d’infrastructures pouvant accueillir correctement les compétitions. Des dysfonctionnements ont été notés et les amateurs du football local ont dénoncé cet état de fait. Il s’avère urgent de résoudre ces tares congénitales afin d’anticiper sur l’organisation de l’année à venir. Avec la Coupe d’Afrique des Nations, la tenue comité local de développement (CLD) de Dakar-plateau concernant la saison 2019-2020 qui était initialement prévu le 18 juillet a été reportée à une date ultérieure. Ce sera l’occasion de discuter profondément sur la question brûlante de la réouverture du stade Demba Diop fermée depuis la date du drame ayant abouti à la mort de huit supporters du Stade de Mbour le 15 juillet 2017 au cours du match contre l’US Ouakam.
Saint-Louis aussi avait enregistré des scènes de violence ayant abouti à la mort d’un jeune supporter dans le département de Dagana. Par la suite, le sous-préfet avait interdit toute activité de navétanes dans cette localité.Les phases nationales se déroulent du 20 août au 7 septembre dans la région de Louga sans incident majeur.
Timbuktu Institute appelle les différentes parties prenantes au calme et au dialogue inclusif pour une saison de championnat populaire sans problème.
Ensemble, œuvrons pour la non-violence dans le milieu sportif !
"It is clear that this kind of event allows France to heal her diplomacy. But I think we can hope for more. Africa's participation in the G7 is a good thing if we go beyond the stage. This contrasts, of course, with the vision of a great ball of the powerful, between-rich. But the process will be inclusive only if we succeed in giving substance to this spirit of openness. The Sahel expects more actions, not speeches. I hope that the voices of these heads of state will be heard in the hubbub of this felted high mass. "
Are the concerns of Bakary Sambe, director of the Timbuktu Institute-African Center for Peace Studies and coordinator of the Observatory of Religious Radicals and Conflicts in Africa, well-founded? The G7, the gathering of the seven richest countries on the planet, was this year on the theme of reducing inequalities. The French presidency of the G7 has made it her warhorse with, in a line of sight, the African continent which she wants to ensure the development "on new bases partnership", as Emmanuel Macron has repeatedly said, goaded into this. Germany, which wants to put a stop to illegal immigration to Europe by helping Africans stay at home.
Even if this meeting, in the end, focused much on other subjects than Africa, starting with the Amazon ravaged by fires, the Iranian nuclear, the international trade, even Hong Kong, the initial objective France to put Africa at the heart of the discussions has nevertheless been achieved. Most of our African colleagues have hailed the "good intentions" of the French presidency in their coverage of the summit, but are nevertheless very skeptical about the ability of the rich to take an interest in the poor, especially when they arrogate to seven the right to decide the fate of the planet:
"The sad reality is that Africa, which accounts for about 5% of world trade, has a hard time hearing about its specific problems related to climate change, the tax evasion orchestrated by multinationals, unemployed , insecurity, etc., "comments the Burkina Faso newspaper Le Pays, which also regrets that the five African presidents invited to this summit" have been just to furnish the decor. "
The composition of the African delegation has been much in the news in Africa. Kigali's main daily, the New Times, believes, for example, that the choice of guest countries owes nothing to chance, but to a clever mix. Thus, "Paul Kagame of Rwanda was officially invited as former President of the African Union, Al-Sissi of Egypt as current President of the African Union, Cyril Ramaphosa as newly elected President of the African Union. South Africa's second largest economy, Senegal's Macky Sall as president of NEPAD, and finally Roch-Marc Christian Kaboré as president of G5 Sahel and as head of state for a country, Burkina Faso, first line concerning the fight against terrorism in a region under secure tension ", writes the newspaper.
Which, in the opinion of most African commentators, hides also the diplomatic backslides of France who would have benefited from it to "work its bilateral relations with Africa". According to the Elysee, President Macron will make an official visit to South Africa in 2020. As for the country of Paul Kagame with which France has long had a heavy judicial liability on the causes of the 1994 genocide, it is a question of reunion assumed:
"Rwanda has a major geostrategic role to play in the Great Lakes area. In addition, since October 2018, it is a Rwandan, Louise Mushikiwabo, who is at the head of the International Organization of the Francophonie (OIF), "recalls the New Time.
Speaking on behalf of the G5 Sahel member states (Burkina Faso, Mauritania, Mali, Niger, Chad), the Burkinabe head of state pleaded with both the French presidency and German Chancellor Angela Merkel, for the international community to take concerted action to stabilize Libya. Making a connection between the security crisis in Libya, instability in the Sahel and that prevailing in the world in general, he called on the G7 to "show a clear position to bring peace and stability to Libya".
A satisfied request since the paragraph on Libya in the final declaration was described by Emmanuel Macron in an interview on August 27 on a large French television channel, as "one of the main advances of this summit with Iraq." After reaffirming their support for the work of the United Nations to set up an inter-Libyan conference, the G7 leaders have agreed to organize two new international conferences to discuss a way out of the crisis in this country oil-laden, but who knows the chaos since the fall of Moamer Khadafi in 2001 and his subsequent assassination:
"We support a truce in Libya that can lead to a lasting ceasefire. We believe that only a political solution will ensure the stability of Libya. We look forward to a well-prepared international conference involving all stakeholders and regional actors involved in this conflict. In this regard, we support the work of the United Nations and the African Union to set up an inter-Libyan conference, "said the communiqué adopted by the seven richest countries on the planet, on August 26, summit of Biarritz.
Neither the date nor the venue of this conference have yet been disclosed. But, according to French diplomatic sources, this is a "revised and corrected" version of that initially planned by Ghassan Salamé, UN special envoy, before the April 4 offensive on Tripoli by the National Army. Libyan Arabian Army (ANL), which is led by Marshal Khalifa Haftar, strongman of Cyrenaica in the East. The difference with the organization of this new inter-Libyan conference is that it will be "more inclusive" with, in particular, "the presence of the military leaders of Misrata and Zintan", at the head of Western militias supporting the Prime Minister. Libyan minister Fayez el-Sarraj who heads the Government of National Unity (GNA), the only one to be recognized by the international community.
Another international conference on Libya is also scheduled to take place in New York at the end of September in the margins of the UN General Assembly and Security Council. Long divided, G7 leaders now seem to want to be pragmatic to leave the country, now deeply divided, the political impasse in which it is located. "In this perspective, France is conducting consultations with London and Rome and seeks to install a lasting truce in Tripoli nearly five months after the start of the conflict," said sources.
The intense lobbying of Roch-Marc Christian Kaboré in Biarritz did not however fully bear fruit concerning the reinforcement of the financial means of the G5 Sahel. One of the ambitions displayed by the French presidency at the summit was to unlock the funding promised for the security forces of the five Sahelian states concerned. Opposed to the transformation of this force into a UN mission, which would have solved the question of its financing, the United States has always shown its preference for bilateral aid as they currently do with Niger or Burkina Faso.
Faced with a resurgence of jihadist attacks in this region for several months, the security forces of the G5 Sahel states found themselves in the front line, despite the presence of the Barkhane force in Mali. However, of the 420 million euros originally pledged to them, "a large part of this money has still not been received by G5 Sahel. The disbursement did not follow, "confirmed . Bakary Sambe.
"This situation gives the impression of a great competition between the military powers that are France, Germany – which asserts itself more and more – China and Russia, among others. And sends a very negative image to the local populations who are subjected to the draconian measures imposed by the authorities, while feeling less and less secure. The Sahel is a patient around whom there are many doctors. But nobody agrees on the diagnosis, "he added.
Speaking at a press conference attended by Burkinabe President Emmanuel Macron and Angela Merkel spoke of the importance of "better arming" and "better training" the region's military and police. However, there is no question for the German Chancellor to go beyond the 200 German soldiers deployed in Mali to support MINUSMA, the UN mission in Mali. For now, France and Germany are seeking to convince other donors, not just the G7, to commit to a "new partnership" for the Sahel.
This hand extended to other countries in the region is aimed essentially at "expanding" the G5 Sahel and "strengthening" financially the international coalition fighting against jihadist groups in Mali, Niger, Mauritania, Chad and Burkina Faso. The first step is to involve the Gulf of Guinea countries, particularly Senegal, Côte d'Ivoire and Ghana, in the efforts of the G5 Sahel. A Franco-German meeting scheduled "before the end of the year" must set the terms. While an ECOWAS summit, set in mid-September in Ouagadougou, will examine the feasibility of creating a broad military coalition encompassing the G5 Sahel states and some of their neighbors.
Criticized by NGOs who find this partnership too vague and too much access to strategic considerations, "while Paris and Berlin should have, in their eyes, announced an initiative to fight against inequalities," they argue, the possibility of an extension of the G5 Sahel to other ECOWAS countries is rather well received in West Africa. At the last summit of this regional organization, in July in Abuja, this prospect had already been announced. Ivorian President Alassane Ouattara has never concealed his support for a rapprochement between the G5 Sahel and the rapid intervention forces of ECOWAS, and even an extension to Central African countries such as Cameroon and Chad. who are also victims of Boko Haram attacks.