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Source : Météo Sahel Juillet & Août 2024
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À l’occasion du premier anniversaire de la gestion du Gouvernement de transition par le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP), le premier ministre a tenu un point de presse le 10 août à son cabinet pour faire le bilan. Pour lui, l’union du peuple autour du CNSP est la plus grande satisfaction à noter au sortir de cette année spéciale, car toutes les composantes de la société se sont constituées en bouclier autour de la nation. Pour lui, gérer les affaires courantes et s’assurer du bon fonctionnement du pays dans tous les secteurs, en ne comptant que sur ses propres forces, serait la preuve que le Niger n’aurait besoin d’aucune aide extérieure. D’ailleurs, le premier ministre s’est également félicité du départ des forces armées étrangères du sol nigérien et la reprise de la coopération entre le Niger et les institutions financières. La solidarité des pays africains et ceux étrangers comme la Chine a été aussi d’un grand soutien lors de l’imposition de l’embargo, soutient-il.
Cependant, le 25 juillet, à la veille de l’anniversaire du putsch, la gestion du Gouvernement de transition est critiquée par les défenseurs des droits de humains. En effet, Human Rights Watch, Amnesty internationale et la Fédération internationale pour les droits humains, constatent « les droits humains en chute libre » au Niger et demandent la libération de tous les détenus politiques et le respect des libertés fondamentales, celles des médias surtout.
Une semaine après cet anniversaire, c’est le premier remaniement technique de l'équipe gouvernementale qui fait actualitéle 17 août. En effet, le limogeage du ministre du pétrole, Barké Bako Mahaman Moustapha, sans raisons connues, a donné lieu à diverses spéculations. Son remplacement par le Dr. Sahabi Oumarou, s’inscrirait dans une volonté de réformes et d’initiatives pour une gestion optimale des ressources pétrolières et une meilleure politique énergétique.
En début juillet, au nord-ouest du Niger, l’attaque d’une base des forces de défense et de sécurité (FDS) nigériennes positionnée dans le cadre de l’opération SHARA, à Tahoua, a causé la mort d’au moins six militaires. Le bulletin d’information diffusé par les FAN (forces armées nigériennes) précise que la riposte a poussé l’ennemi à se replier. Un précédent communiqué à la date du 3 juillet, informait de l’arrestation d’une centaine de terroristes en réaction à l’attaque meurtrière orchestrée dix jours avant par la Coalition des groupes armées.
Dans la région de Méhana, de graves exactions ont couté la vie à 14 civils (le 13 août), particulièrement à Gangania, Amara, Mamassey, Tchibi Bero, Tchibi Kaina, et Bandabarey, des localités proches de la zone dite des trois frontières. L’opération « lakal-Kaney » a permis d’arrêter deux terroristes et de récupérer du bétail volé. À Torodi également, dans la région de Tillabéri, un criminel notoire fut arrêté par les FDS à la suite d’affrontements contre des terroristes. À Dosso Kourégou, un village de cette région, sept civils ont trouvé la mort dans l’attaque de terroristes à moto.
À la prison de Koutoukalé, des détenus dont des terroristes se sont échappés de la prison de haute sécurité avec des armes suite à une mutinerie le 11 juillet. Cet événement peut témoigner de la fragilité de la sécurité dans ce pays, à l’intérieur comme dans les zones frontalières.
Causée par divers facteurs tels que les conflits, les changements climatiques, l’instabilité économique et les maladies, l’insécurité alimentaire qui touche 3,4 millions de personnes est l’autre menace qui pèse sur le Niger.
Sur le plan international, la guerre entre l’Ukraine et la Russie semble s’être invitée au Sahel. Au Mali, le soutien de l’Ukraine à des groupes armés pour affronter Wagner, est à l’origine de crises diplomatiques sans précédent. En réaction, le Niger, membre de l’Alliance des États du Sahel, a annoncé la rupture, avec effet immédiat, de ses relations diplomatiques avec l’Ukraine.
D’une manière générale, la situation sécuritaire s’est considérablement détériorée avec le Gouvernement de transition qui fête son anniversaire à la tête du Niger dans un contexte où « le nombre d'attaques djihadistes a augmenté », démontrant que le problème d’insécurité est loin de connaître son épilogue. Le retrait des troupes américaines, un pilier de la lutte contre les insurgés dans la région du Sahel, a probablement eu des effets sur le contrôle de cet espace.
Timbuktu Institute - September 2024
(Download the full Report at the bottom of the article)
Studies on youth radicalization and violent extremism have multiplied in recent years, particularly in the Sahelian region with the resurgence of the terrorist phenomenon as a threat to peace and stability. Originally perceived as the antechamber to a shift towards terrorist violence, successive approaches have been enriched by the diversity of experiences in different countries, leading experts to analyze radicalization as the result of a process, factors or consequences that are political, economic, social, ideological, etc.,
This radicalization is thus described as manifesting itself in the use of violence as a means of affirmation, expression or vindication of the most diverse kinds. But the study of radicalization soon fell victim, on the one hand, to the popularity of a “perfect subject” for media sensationalism, surfing on the spectacular character of terrorist attacks that tended to spill over from the Sahelian epicenter into previously unsuspected zones such as the Gulf of Guinea. On the other hand, the diversity of experiences and the speed of change have led to a multiplication of approaches, often reflecting the preoccupations that experts project onto the phenomenon, which in most cases ends up no longer being studied in its own right. Finally, the specializations of analysts who used to focus on subjects such as governance, crime or urban violence have rubbed off on many studies, deliberately denying the phenomenon its ideological or intercommunity dimensions, etc., for example.
Thus, the predominance of criminological approaches to the point of inducing states in the region to adopt strictly security-oriented approaches has increased, with analyses focusing more often than not on actors in the “second circle”, such as traffickers, logistical assistance couriers and so on. Meanwhile, these studies neglect the actors of the first and third circles. The first circle is made up of ideological/community entrepreneurs whose role is fundamental in recruiting, inciting and instrumentalizing grievances. The third circle, often inaccessible to criminological studies, is that of actors predisposed to extremist violence, or who may ideologically prepare for it. Most often, they interview them in prison or in situations of “remorse”, where numerous biases distort the analysis of real or initial motivations.
What's more, the tools of the criminological approach are often ill-suited to the subtleties of extremist discourse, with its ideological charge and references requiring deciphering, even exegesis, often beyond the reach of experts lacking the key concepts needed to understand symbols, allusions and language codes.
It is often after the act has been committed that many analysts who deny the ideological dimension gain access to the subjects in question, either in prison or in a situation where the security environment, prison pressure or even criminal actors weigh heavily, thus accentuating the criminological bias despite documentation efforts.
This criminological bias, which has had its full effect on the approach to the phenomenon of radicalization in the Sahel, has not spared certain studies following the spillover of the epicenter of extremist violence to the countries of the Gulf of Guinea. Many of them suffer from the lack of renewal of conceptual tools, as well as the rush to “document” a multidimensional and often diffuse phenomenon in contexts where the gaze is oriented by realities elsewhere.
Moreover, in the face of security and political pressure to develop responses, many analysts must have overlooked the paradigmatic turning point of the accentuation of the communalization of extremist violence, concomitant with the first visible phases of the spillover of the epicenter of terrorism from the central Sahel to the coastal countries of West Africa.
Thus, in the case of certain coastal countries, political responses strongly inspired by conclusions drawn from the criminological approach seem not to have learned from the mistakes of the Sahel, naturally turning towards security-dominated solutions, sometimes even reducing the extremist phenomenon to a “simple” criminal problem. Whereas criminality is not in itself the root of evil, but rather one of its symptoms.
In Benin's case, several studies point to its geographical proximity to Sahelian countries, which are victims of insurgency by armed terrorist groups, porous borders, the weak presence of the State in certain regions, community conflicts, youth unemployment, corruption, injustice, social inequalities and many other factors. Despite the measures, efforts and mechanisms implemented by the State to counter this advance, the security situation is gradually deteriorating in the Alibori and Atacora departments. Since the first terrorist incident in 2019, the number of terrorist attacks on Beninese soil, particularly in the septentrion, has been on the rise, with a growing number of deaths, injuries and displaced persons.
Using a comprehensive approach based on the perceptions of local populations, Timbuktu Institute - African Center for Peace Studies took advantage of several field missions in the departments of Donga, Alibori and Atacora to conduct qualitative interviews with 270 young people living in the various localities and communes. In addition to these individual interviews, a dozen focus groups were organized on site.
In order to avoid “one shot” interviews, we adopted an approach based on continuous observation over a long period of time. In order to mitigate against approaches based on a chronology of security incidents, or which confine such a complex issue to a criminological “straitjacket”, this study aims to probe factors and question local perceptions in a comprehensive approach. The testimonies and responses gathered throughout the survey, and on which the analyses in this report are based, are the result of extensive fieldwork over the period from March - May 2023 to June 2024, directed on site by Dr. Bakary Sambe.
This study, the first in a series on Benin, is intended to contribute to a better understanding of the phenomenon, leading to conclusions and recommendations that can support the initiatives and solutions put in place by the State, its partners and above all local communities, who are at the heart of this reflection.
Timbuktu Institute – Septembre 2024
(Télécharger l’intégralité du Rapport en bas de l’article)
Les études sur la radicalisation des jeunes et l’extrémisme violent se sont multipliées ces dernières années, notamment, dans la région sahélienne avec la recrudescence du phénomène terroriste en tant que menace à la paix et la stabilité des États de la région. De phénomène perçu, à l’origine, comme l’antichambre du basculement vers la violence terroriste, les approches successives se sont enrichies de la diversité des expériences, selon les pays, qui a poussé les experts à analyser la radialisation comme la résultante d’un processus, de facteurs ou de conséquences politiques, économiques, sociales, idéologiques etc.
Cette radicalisation est, ainsi, décrite, comme se manifestant par l’usage de la violence comme moyens d’affirmation, d’expression ou de revendication les plus diverses. Mais, très vite, l’étude du phénomène de radicalisation va être victime, d’une part, de la popularité d’un « sujet parfait » pour le sensationnel médiatique, surfant sur le caractère spectaculaire des attaques terroristes qui tendent à déborder de l’épicentre sahélien vers des zones jadis insoupçonnés comme le golfe de Guinée. De l’autre, la diversité des expériences et la rapidité des mutations ont eu comme corollaire, la multiplication des angles d’approches souvent empreintes des préoccupations que des experts projettent sur le phénomène qui finit, dans la plupart des cas, par ne plus être étudié en soi. Enfin, les spécialisations d’analystes qui naguère étaient focalisés sur des sujets comme la gouvernance, la criminalité ou encore les violences urbaines ont déteint sur de nombreuses études allant, par exemple, jusqu’à dénier, délibérément, au phénomène ses dimensions idéologique ou encore intercommunautaire etc.
Ainsi, la prédominance des approches criminologiques au point d’induire des États de la région vers des approches strictement sécuritaires s’est accentuée avec des analyses s’intéressant le plus souvent aux acteurs du « second cercle » tels que les trafiquants, les convoyeurs d’assistance logistique etc. Pendant ce temps, ces études négligent les acteurs du premier et du troisième cercle. Le premier cercle est constitué des entrepreneurs idéologiques/communautaires dont le rôle est fondamental dans le recrutement, l’incitation et l’instrumentalisation des griefs. Le troisième cercle auquel les études à dominante criminologique n’ont souvent pas accès est celui des acteurs prédisposés au basculement dans la violence extrémiste ou pouvant y préparer idéologiquement. Le plus souvent, c’est dans l’univers carcéral qu’ils les interrogent ou dans des situations de « remords » où de nombreux biais viennent fausser l’analyse sur les motivations réelles ou celles de départ.
Il s’y ajoute que les outils de l’approche criminologique ne sont souvent pas adaptés pour rendre compte des subtilités du discours extrémiste avec sa charge idéologique et ses références qui nécessitent un décryptage voire une exégèse souvent hors de portée d’experts démunis des concepts-clés permettant une intelligence des symboles, des allusions et des codes langagiers.
C’est, souvent, après le passage à l’acte que beaucoup d’analystes niant la dimension idéologique accèdent aux sujets en question soit en prison ou dans une situation sur laquelle pèse lourdement l’environnement sécuritaire, la pression carcérale ou même des acteurs de la criminalité accentuant ainsi le biais criminologique malgré les efforts de documentation.
Ce biais criminologique ayant eu tout son effet sur l’approche du phénomène de la radicalisation au Sahel n’a pas épargné certaines études suite au débordement de l’épicentre de la violence extrémiste vers les pays du Golfe de Guinée. Beaucoup d’entre-elles souffrent du non renouvellement des outils conceptuels de même que l’empressement à « documenter » un phénomène multidimensionnel et souvent diffus dans des contextes où on projette un regard orienté par les réalités d’ailleurs.
De plus, face à la pression sécuritaire et politique pour l’élaboration de réponses, il a dû échapper à nombre d’analystes, le tournant paradigmatique de l’accentuation de la communautarisation de la violence extrémiste concomitante aux premières phases visibles du débordement de l’épicentre du terrorisme du Sahel central vers les pays côtiers d’Afrique de l’Ouest.
C’est ainsi que, dans le cas de certains pays côtiers, les réponses politiques fortement inspirées par des conclusions issues de de l’approche criminologique semblent ne pas apprendre des erreurs du Sahel, en s’orientant naturellement vers des solutions à dominante sécuritaire, réduisant, même parfois le phénomène extrémiste à un « simple » problème criminel. Alors que la criminalité n’est pas en soit la racine du mal mais un des symptômes entre autres.
Pour le cas du Bénin, plusieurs études font état de sa proximité géographique avec les pays sahéliens victimes de l’insurrection des groupes armés terroriste, la porosité des frontières, la faible présence de l’État dans certaines régions, les conflits communautaires, le chômage des jeunes, la corruption, l’injustice, les inégalités sociales et bien d’autres facteurs. Malgré les dispositions, les efforts et les mécanismes mis en œuvre par l’État pour contrer cette avancée, la situation sécuritaire se dégrade progressivement dans les départements de l’Alibori et de l’Atacora. Ainsi, depuis la première attaque terroriste enregistré en 2019, le nombre d’incidents terroristes sur le sol béninois notamment dans le septentrion est en hausse avec un nombre de morts croissant, de blessés et de déplacés.
S’inscrivant dans une démarche compréhensive et à partir de la perception des populations locales, Timbuktu Institute a mis à profit plusieurs missions de terrains dans les départements de la Donga, de l’Alibori et de l’Atacora afin de conduire des entretiens qualitatifs auprès de 270 jeunes habitant les différentes localités et communes. En plus de ces entretiens individuels, une dizaine de focus groups ont été organisés sur site. Afin d’éviter des interviews « one shot » nous avons adopté la démarche consistant à faire de l’observation continue sur le temps long. Ainsi, pour mitiger les approches basées sur une chronologie des incidents sécuritaires ou encore enfermant une problématique aussi complexe dans le carcan criminologique, cette étude vise à sonder les facteurs et à interroger les perceptions locales dans une démarche compréhensive. Les témoignages et réponses recueillis tout au long de l’enquête et sur lesquelles se fondent les analyses de ce rapport sont issus d’un travail de terrain étendu sur la période de Mars – Mai 2023 à juin 2024[1] dirigé, sur place, par Dr. Bakary Sambe.
Cette étude, première d’une série sur le Bénin, se veut une contribution à une meilleure compréhension du phénomène à même d’aboutir à des conclusions et recommandations pouvant accompagner les initiatives et solutions mises en place aussi bien par l’État, ses partenaires mais surtout les communautés locales qui sont au cœur de cette réflexion.
Télécharger l’intégralité du Rapport
[1] - Le rapport étant construit essentiellement sur des entretiens qualitatifs individuels et divers témoignages lors des focus group avec les jeunes des trois départements, nous signalerons à chaque fois, dans le corps du texte, l’identité minimale et la zone exacte (commune, arrondissement, village) où à défaut, selon la sensibilité du témoignage, le département où habite l’interlocuteurs. Les dates se situent dans la période allant de Mars- Mai 2023 à Juin 2024.
Timbuktu Institute - September 2024
Undertaking a refoundation of democracy, to defend its gains where it is established and promote it where it is still an aspiration, a dream or, at best, in its early stages of realization, requires taking into account the main causes of its retreat and the difficulties standing in the way of its realization in Africa and elsewhere.
As Mohamed-Chérif Ferjani puts it, the first challenge of such a refoundation would perhaps be to collaborate “in the construction of a truly universal democracy, which excludes no one and needs no one's exploitation, neither in the North nor in the South, neither in the East nor in the West”. To achieve this, he reminds us, “ we must all assume our responsibilities, and stop stigmatizing others, with arrogance and bad faith, in order to absolve ourselves of our responsibility; we must all start by putting our own house in order, and stop seeing each other as a threat to our security and comfort ”.
Moreover, rebuilding democracy requires us to take into account the reasons for “democratic disenchantment” in Africa , as elsewhere in the world, both in relation to representative democracy and to its populist critics calling for forms of direct democracy that are often reduced to forms of “plebiscitary democracy”, not to mention the non-democratic alternatives that criticize democracy, whether direct or indirect, for the political instability inherent in changing majorities, the difficulty of envisioning long-term projects, the populist temptation to win elections at all costs, the dictatorship of the majority to the detriment of the rights of the minority(ies), etc.
Representative democracy, direct democracy
As far as representative democracy is concerned, it is indisputable that the elites exercising power in the name of the people tend to distance themselves from them, or to cut themselves off from them, to the point of driving the people to various forms of rejection of politics: abstention, individualistic withdrawal that is incompatible with the requirements of solidarity necessary to life in society and the will to live together, as predicted by A. de Tocqueville (De la démocratie). de Tocqueville (On Democracy in America), withdrawal into “mechanical solidarities” and “murderous identities” based on ties of “blood” and tribal, ethnic or religious allegiances, opening the way to various forms of questioning “democratic living together”. Criticisms such as those developed by intellectuals (like A. Negri and C. Mouffe) and by populist movements pointing to the betrayal of governing elites closer to financial circles and multinationals than to the concerns of their electorate, are not entirely erroneous, even if the remedies advocated and the theoretical references (notably to C. Schmitt) are highly suspicious.
As for direct democracy, apart from the difficulty of implementing it outside small-scale societies living on small territories, it has the disadvantage of diluting power and, consequently, responsibility: if the people who directly exercise power make a mistake, who is going to hold them to account, and how can they be sanctioned? You can dissolve a government, an assembly or an institution for reasons of incompetence or corruption, or for decisions deemed erroneous or dangerous, but you can't dissolve the people, except by subjecting them to dictatorship, tyranny (as Plato predicted), or to a despotic or dictatorial power that denies them their sovereignty and reduces them to the status of “subjects” forcibly subjected to those who know their interests and the means to guarantee them better than they do (as Hobbes conceived in Leviathan, or as all dictators, whatever their ideology, have thought and dreamt).
Taking into account Prof. Mohamed-Ferjani's remarks, a number of ideas have been put forward with a view to remedying the shortcomings of representative democracy - the only system that can be envisaged for states with large populations and extensive territories - without resorting to various forms of anti-democratic regimes. He stresses that the imperative mandate (as advocated by Rousseau and others who follow in his footsteps), participatory or deliberative democracy using popular-initiative referendums (as in Switzerland and in local democracy), and respect for the foundations of the rule of law are all possible:
(1) the real separation of powers, so that they limit each other,
(2) respect for the law by those who govern and those who are governed,
(3) pluralism and collective freedoms (political, trade union, associative, etc.), on which the strength of civil society and the intermediary bodies essential to democratic coexistence depends,
(4) respect for the inalienable personal, political, cultural, social and economic rights of peoples, individuals and minority groups, irrespective of differences of sex or gender, opinion, origin, affiliation, spirituality or religion, sexual orientation, etc.
Insisting on the universal scope of democracy, he warns of “ the dangers of seeking to dissociate or oppose democracy, human rights and the rule of law, as advocated by the ‘conceptions of Carl Schmitt and its populist uses’. In his view, such attempts at dissociation are “dangerous for democracy ”.
Is the universality of the democratic principle a way out of the pitfalls of culturalism?
The diversity of democratic forms (direct and representative democracy, parliamentary, presidential or mixed regimes, republics, constitutional monarchies, etc.) shows that the construction of democracy has never been and cannot be envisaged on the basis of a supposedly universal model. However, we cannot accept projects that tend to dilute the intangible foundations of democracy in the search for specific conceptions that distance themselves from it, in the name of a certain culturalism that opposes particularisms to the universality of the human being, his aspirations and his rights.
This simply means that the construction of democracy cannot proceed from vertical injunctions; it must be based on the participation of socially, geographically and culturally situated populations, taking into account their needs and specificities, and giving them the means to appropriate its principles and build it themselves. This requires information and training, based on the search for ways of living it other than as an imported model, or as a foreign concept designed to “Westernize” or “McDonalize” the world, as Benjamin Barber[1] puts it, in local cultures and in the traditions of solidarity specific to each society.
Only by embracing the forms given to it by those who aspire to it, can it become a perennial universal reality. It needs, in every situation, in every country and in every region, a democratic culture rooted in the reality of the society that claims it.
It needs forces and institutions that embrace its values, work to promote it and defend it tooth and nail against its adversaries and gravediggers: political parties, associations, intermediary bodies, public services that guarantee the solidarity necessary for democratic coexistence, laws and rights that give it concrete content and make it desirable. It also needs the economic, social and cultural conditions to elevate it to the level of a vital need, not just for a privileged minority, as has been the case until now, but for the entire population of every country.
*This article was written under the coordination of Prof. Mohamed-Chérif Ferjani, Chairman of the High Council of the Timbuktu Institute.
[1] Benjamin Barber, Jihad vs McWorld, 1995
Timbuktu Institute - Septembre 2024
Entreprendre une refondation de la démocratie, pour en défendre les acquis là où elle est établie et la promouvoir là où elle encore une aspiration, un rêve ou, au mieux, à ses débuts de réalisation, exige la prise en compte les principales causes de son recul et des difficultés se dressant sur la voie de sa réalisation en Afrique et ailleurs.
Le premier enjeu d’une telle refondation serait, peut-être, de collaborer, comme le dit Mohamed-Chérif Ferjani, « à l’édification d’une démocratie réellement universelle, qui n’exclut personne et n’a besoin de l’exploitation de personne, ni au Nord, ni au Sud, ni à l’Est, ni à l’Ouest ». Pour cela, rappelle-t-il, « chacun doit assumer ses responsabilités, cesser de stigmatiser les autres, avec arrogance et mauvaise foi, pour se dédouaner à bon compte ; nous devons tous commencer par balayer devant nos portes, arrêter de voir, les uns dans les autres, une menace pour notre sécurité et pour notre confort ».
Par ailleurs, la refondation de la démocratie exige une prise en compte des motifs du « désenchantement démocratique » en Afrique comme partout dans le monde, aussi bien par rapport à la démocratie représentative que par rapport à ses critiques populistes appelant à des formes de démocratie directe qui se réduisent souvent à des formes de « démocratie plébiscitaire », sans parler des alternatives non démocratiques reprochant à la démocratie, directe ou indirecte, l’instabilité politique inhérente aux changements de majorités, la difficulté d’envisager des projets à long terme, la tentation populiste pour remporter à tout prix les élections, la dictature de la majorité au détriment des droits de la, ou des, minorité(s), etc.
Démocratie représentative, démocratie directe
Pour ce qui est de la démocratie représentative, il est incontestable que les élites exerçant le pouvoir au nom du peuple, ont tendance à s’en éloigner ou à s’en couper au point de le pousser à différentes formes de rejet du politique : abstention, repli individualiste antinomique avec les exigences de la solidarité nécessaire à la vie en société et à la volonté de vivre ensemble, comme le pronostiquait A. de Tocqueville (De la démocratie en Amérique), repli sur des « solidarités mécaniques » et sur des « identités meurtrières » faisant appel aux liens de « sang », aux appartenances tribales, ethniques, confessionnelles ouvrant la voie à différentes formes de remise en cause du « vivre ensemble démocratique ». Des critiques comme celles développées par des intellectuel(le)s (comme A. Negri et C. Mouffe) et par des mouvements populistes pointant la trahison des élites gouvernantes plus proches des milieux financiers et des multinationales que des préoccupations de leurs électeurs, ne sont pas totalement erronées, même si les remèdes préconisés et les références théoriques (notamment à C. Schmitt) incitent à beaucoup de méfiance.
Quant à la démocratie directe, outre la difficulté de sa mise en œuvre en dehors de sociétés de petites tailles et vivant sur des territoires peu étendus, elle présente l’inconvénient de la dilution du pouvoir et, partant, de la responsabilité : si le peuple qui exerce directement le pouvoir se trompe, qui va lui demander des comptes et comment le sanctionner ? On peut dissoudre un gouvernement, une assemblée ou une institution pour des motifs d’incompétence, de corruption ou pour des décisions jugées erronées ou dangereuses, mais on ne peut pas dissoudre le peuple sinon en le soumettant à la dictature, à la tyrannie (comme le pronostiquait Platon) ou à un pouvoir despotique ou dictatorial lui déniant sa souveraineté et le ramenant au statut de « sujets » soumis par la force à celui ou ceux qui connaissent mieux que lui ses intérêts et les moyens de les garantir (comme le concevait Hobbes dans Le Léviathan, ou comme le pensaient et en rêvent tous les dictateurs quelle qu’en soit l’idéologie).
Prenant en compte les remarques du Pr. Mohamed-Ferjani, certaines idées ont été émises dans le but de remédier aux carences de la démocratie représentative, la seule envisageable dans le cadre d’Etats dont la population est nombreuse et le territoire étendu, sans recourir aux différentes formes de régimes antidémocratiques, des solutions démocratiques sont envisageables. Il souligne que le mandat impératif (tel que l’avait préconisé Rousseau et ceux qui s’en réclament), la démocratie participative ou délibérative faisant appel aux référendums d’initiative populaire (comme en Suisse et dans la démocratie locale), le respect des fondements de l’Etat de droit dont principalement :
(1) la séparation réelle des pouvoirs de façon à ce qu’ils se limitent les uns les autres,
(2) le respect des lois par les gouvernants comme par les gouvernés,
(3) le pluralisme et les libertés collectives (politiques, syndicales, associatives, etc.) dont dépend la force de la société civile et des corps intermédiaires indispensables pour un vivre ensemble démocratique,
(4) le respect des droits inaliénables – personnels, politiques, culturels, sociaux, économiques, - des peuples, des individus et des groupes minoritaires, par-delà les différences de sexe ou de genre, d’opinion, d’origine, d’appartenance, de spiritualité ou de confession, d’orientation sexuelle, etc.
Insistant sur la portée universelle de la démocratie, il avertit sur « les dangers de vouloir dissocier ou opposer la démocratie, les droits humains et l’Etat de droit, à l’instar de ce que préconisent les « conceptions de Carl Schmitt et ses usages populistes ». Pour lui, ces tentatives de dissociation sont « dangereuses pour la démocratie ».
L’universalité du principe démocratique pour sortir des pièges du culturalisme ?
La diversité des formes démocratiques (démocratie directe et démocratie représentative, régimes parlementaires, régimes présidentiels ou régimes mixtes, Républiques, Monarchies Constitutionnelles, etc.), montre que la construction de la démocratie n’a jamais été et ne peut pas être envisagée sur la base d’un modèle prétendument universel. Cependant, on ne peut pas s’accommoder des projets qui tendent à en diluer les fondements intangibles dans la recherche de conceptions spécifiques qui s’en éloignent, au nom d’un certain culturalisme opposant les particularismes à l’universalité de l’humain, de ses aspirations et de ses droits.
Cela veut simplement dire que la construction de la démocratie ne peut pas procéder d’injonctions verticales ; elle doit s’appuyer sur la participation des populations situées socialement, géographiquement et culturellement en prenant en compte leurs besoins et leurs spécificités, et en leur donnant les moyens de s’en approprier les principes et de la bâtir eux-mêmes. Cela passe par un travail d’information et de formation basé sur la recherche, dans les cultures locales et dans les traditions de solidarité propres à chaque société, les moyens de la vivre autrement que comme un modèle importé, ou comme une conception étrangère destinée à « occidentaliser » ou à « McDonaliser » le monde, selon l’expression de Benjamin Barber[1].
Ce n’est qu’en épousant les formes que lui donnent celles et ceux qui y aspirent, qu’elle peut devenir une réalité universelle pérenne. Elle a besoin, dans chaque situation, dans chaque pays et dans chaque région, d’une culture démocratique enracinée dans la réalité propre à la société qui la revendique.
Elle a besoin de forces et d’institutions qui adhèrent à ses valeurs, œuvrent pour sa promotion et la défendent bec et ongle contre ses adversaires et ses fossoyeurs : des partis politiques, des associations, des corps intermédiaires, des services publics qui garantissent les solidarités nécessaires à un vivre ensemble démocratique, des lois et des droits qui lui donnent un contenu concret et la rendent désirable. Elle a également besoin de conditions économiques, sociales et culturelles à même de l’élever au rang d’un besoin vital non seulement pour une minorité de privilégiés comme c’était le cas jusqu’ici, mais pour l’ensemble des populations de tous les pays.
*Cet article a été rédigé sous la coordination du Pr. Mohamed-Chérif Ferjani, Président du Haut-Conseil du Timbuktu Institute
[1] Benjamin Barber, Djihad vs McWorld, 1995
Timbuktu Institute – September 2024
Contrary to some analyses, the young Africans who cheered military juntas after the announcement of coups d'état were not rejecting democracy per se. They were expressing disillusionment, disappointment and frustration accumulated after years of struggle, sometimes at the cost of many lives, for precisely the rights granted by the democratic regime. In fact, there is no problem with democracy as a system of governance, but there is a misunderstanding of the sometimes Eurocentric democratic narrative, as well as, over the decades, a real problem of credibility of Western discourse on democracy in view of the inconsistencies, often due to repeated sacrifices of the democratic principle on the altar of so-called strategic, economic and other interests.
What's more, long before the wave of “democratization” in the 90s, a thousand and one promises of peace and development had been made to our countries through the application of structural adjustment policies. More than thirty years on, neither peace nor development have materialized. This disillusionment in a fast-changing geopolitical context, combined with poor governance and the wear and tear of a political elite out of touch with the aspirations of a “hyper-connected” youth facing the harsh realities of neoliberal globalization, has fuelled scepticism about the efficiency of the democratic model.
However, the latter has never been rejected per se, but there is an ardent desire to reinvent and, above all, endogenize a principle, a spirit that is certainly universal, but to which the various intelligible declensions could give substance and, above all, substance.
The democratic principle suffers from European-centric idealism, from the shortcomings of modern democracies and from the continuing deterioration in the state of democracy, which has not spared the African continent, with its attendant violations of human rights, restrictions on freedoms and so on. It is against this backdrop that military coups and autocratic regimes are emerging, fueled by populist rhetoric that goes so far as to extol anti-democratic models in an international environment where even so-called “modern” democracies are not spared the various shortcomings of neoliberalism, among other evils.
The beginnings of an awareness of the obstacles to democracy, and recognition of the shortcomings of the principle itself, have become essential elements in the reflection on the need to promote this mode of governance, despite the “unfavorable winds”, the culturalist approaches carried by a wind of populism sweeping across all continents and its globalized effects.
Breaking out of the European-centric idealism of “Western » representative democracy
It's true that in order to give democracy a “Western essence”, contrary to its universal scope, we often wrongly establish a filiation, a continuity between Athenian democracy and modern democracy, failing to recall that the founding fathers of modern democracy were opposed to democracy, like Plato, seeing it as a kind of ochlocracy, “government of the crowd, the multitude, the rabble”, a kind of “tyranny” or “dictatorship” of the majority: John Adams (vice-president of G. Washington's vice-president before becoming president of the United States, said that democracy “is an arbitrary, tyrannical, bloody, cruel and intolerable government”. Similarly, in France, eminent figures in the 1789 Revolution spoke of the “vices” and “follies” of democracy, which they associated with anarchy and despotism, rejecting it with horror as “the greatest of plagues”. The same rejection can be found among liberal thinkers of the early 19th century. B. Constant, A. de Tocqueville, and many others. It was only with the invention, in the mid-19th century, of “representative democracy”, as opposed to Athenian democracy (government of the people, by the people themselves), that the founders of “liberal democracy” came to embrace the democratic idea.
Admittedly, it's rather idealistic to talk of continuity between Athenian “direct democracy” and “Western representative democracy”, as we like to say. However, if there is continuity, it is at another level that is often overlooked: that of the beneficiaries and the excluded of democracy. Whether in ancient experiments with direct democracy, or in modern and contemporary forms, democracy is founded on the recognition of the equality and freedom of the members of political society, which Aristotle distinguished from “domestic society”, the latter being governed by inequality and the submission of inferiors to superiors: slaves to their masters, women to men, the small to the large, the “barbarians” to the “civilized”, and so on. From this point of view, democratic society can be defined as a society whose members are free and equal. Consequently, to take away one or both of these pillars is to doom it to extinction as such.
The big problem is that, in both its ancient and modern forms, it has been the privilege of a minority - the free men of Athens, the peoples of the colonial metropolises to the exclusion of “natives” and “slaves” before the formal recognition of civil rights and the right of peoples to self-determination. It's important to recognize that democracy was born and flourished, until now, in contexts where the aspiration to freedom, equality and self-determination was a necessity for the population of a country, or part of it, because its vital needs were satisfied, if not by its own activity, then at least by the exploitation of other populations who were often, if not always, excluded from the benefits of democratic coexistence. This was the case in ancient Athens, where free men (around 15% of the population) were freed from the activities necessary to satisfy their basic needs, through the exploitation of slaves, women and metagods, or foreigners, working in crafts and trade.
Admitting the shortcomings of modern democracies
It's also a fact that some modern democracies only came into being thanks to the wealth accumulated through maritime discoveries, the large-scale practice of slavery, and the extermination or subjugation of Indo-Americans, the plundering of the wealth of colonized countries and continents, and the unequal exchange with countries escaping colonization or gaining independence after decades and centuries of colonial domination by countries enjoying democracy and financing it through the exploitation of the majority. The figures speak for themselves: 85% of the population of ancient Athens, almost 90% of the planet's population excluded from democracy and exploited by a minority of wealthy people in dominant countries for centuries. Today, according to reports published every two years by the International Institute for Democracy and Electoral Assistance (IDEA International), the proportion of the population actually enjoying democracy is lower than it was in ancient Athens. In 2014, 12.5% of the countries assessed were full democracies, 35.5% imperfect democracies, 14.4% hybrid regimes and 37.6% authoritarian regimes (See map below).
A steady deterioration in the state of democracy that has not spared Africa
The IDEA International report for 2015, published on March 5, 2016, highlights a sharp deterioration in the state of democracy worldwide. Most African countries are among the authoritarian or, at best, hybrid regimes. The situation is not improving. In 2020, for the fifth year running, the number of countries moving in the direction of authoritarianism exceeded the number of democratizing countries. Countries considered to be among the world's greatest democracies, such as Brazil and India, are experiencing a worrying backward slide in democracy. Countries such as the USA, Hungary, Poland and Slovenia are also experiencing democratic regression. Even in established democracies, genuinely elected governments are increasingly resorting to authoritarian methods. Often, these steps backwards for democracy meet with a degree of popular support. Reports on the state of democracy worldwide draw attention to the alarming trend in 2020, which saw the number of countries becoming increasingly autocratic reach an all-time high.
As part of this general trend, Africa is one of the continents where these setbacks are most worrying, with the progress made over the last three decades either stalling or falling back sharply. Election results are often contested, sometimes with violence. Circumvention of the rule limiting the number of presidential terms (13 African countries amended or abolished constitutional provisions on presidential term limits between 2015 and 2020), resurgence of unconstitutional changes, repression of opposition parties and the populations that support them, and other distortions are all grounds for democratic disenchantment, particularly among young people, who make up 75% of the population of countries subject to the whims of gerontocracies worn down by decades of autocratic, authoritarian and corrupt power, deaf to the demands of society. These developments are at the root of the growing number of military interventions, or interventions supported by the army, such as in Algeria, Egypt, Sudan and Zimbabwe, or more recently in Mali, Chad and Burkina Faso.
Sometimes, these interventions are supported by the population, whose living conditions are worsening by the day: in 2020, 34 African countries (68%) were in the bottom quartile in terms of basic well-being. The army's intervention is seen as a means of breaking deadlocks, and is welcomed by a desperate population who no longer know which way to turn. Many young people, for whom all horizons are blocked, cheer military coups d'état and welcome interventions by the Wagner group, Russia, China, Turkey and other international or regional powers for whom democracy is the least of their worries. This is also the case for young people who, with no hope of finding a way out at home, do everything to leave, including risking their lives crossing the Sahara and then, when they do, attempting to cross to the other side of the Mediterranean, which has become Africa's largest cemetery, to the indifference of the barricaded European democracies; or by joining armed jihadist groups, for whom democracy and human rights are nothing more than the “modern-day heresies” they set out to eradicate.
Restriction of freedoms and persistent violation of human rights
In the shadow of these developments, freedoms in general, and freedom of expression in particular, are being curtailed in at least 29 countries. Human rights violations are multiplying. Violence against women is on the rise. Constitutional reforms have partly compromised the fight against gender inequality. Responsibility for this situation certainly lies with the authorities in the countries concerned ; but the major powers also bear a large share of the responsibility, whether because of a colonial past that has yet to be overcome, or because of neo-colonial policies based on authoritarian regimes and even corrupt dictatorships, and on financial institutions and the WTO to impose neo-liberal policies of structural readjustment, free movement of capital and goods, and social disengagement of the State, resulting in the rollback of public services in the fields of health, education, housing, transport, support for the most disadvantaged, and so on.
Awareness of the obstacles to democracy: grievances and criticisms of neoliberalism
It's difficult to have a credible discourse on democracy promotion without considering the effects of neoliberal globalization and its collusion with the various expressions of the conservative revolution that are developing, in different forms, all over the world: neoconservatives, the Tea Party and other supremacist movements in North America, far-right identity movements in Europe, Eurasists and National Orthodox in Russia and the countries of the former Soviet empire, ultra-nationalist and xenophobic Hinduism in India, Catholic fundamentalism and evangelical fundamentalism in cahoots with far-right parties in South America, Jewish extremism in Israel and Jewish diasporas, political Islam and Islamo-nationalist movements in Muslim countries and Africa, etc. Everywhere, it's “the double impasse of commercial and religious fundamentalisms attacking the universal”, as Sophie Bessis puts it.
One might think that, instead of promoting the generalization of economic and social progress and democracy, as promised and announced by its “prophets” and promoters, neoliberalism has contributed, everywhere, to the worsening of inequalities and the concentration of wealth in the hands of a tiny minority (the richest 1% saw their share of income growth rise from 16% in 1980 to 27% in 2016, while the incomes of the poorest 50% stagnated at around 9%. According to the Observatoire des inégalités report published in September 2020, the richest 1% will hold almost half the world's wealth in 2020.) Politically, these developments have led to the weakening, even collapse, of the most fragile nation-states. Where we had expected democracy and the rule of law to triumph, we have witnessed ethnic cleansing, new genocides, the development of populism against a backdrop of religious and cultural wars, and a retreat into “murderous identities”, to use Amine Maalouf's expression, fostered by the questioning of the solidarity needed to reduce inequalities and the “misery of the world” incompatible with democratic coexistence.
Some, like Mohamed-Chérif Ferjani, even believe that in order to conceal the responsibility of neoliberal globalization for the decline of democracy, the search for scapegoats has been preferred, with talk of a “clash of civilizations” inherent in the hostility of certain cultures, or certain “rogue states”, towards democracy and the West. In an interview during the preparation of this report, he made some worrying observations. According to him, “in order to reduce these threats, and in the name of the war on terrorism, the powers presenting themselves as champions of the defense of civilization against barbarism, of democracy against dictatorship and totalitarianism, have given themselves the right to carry out interventions to supposedly establish democratic regimes and states governed by the rule of law, and to eliminate dictatorships that oppress their peoples and threaten the peace of neighboring countries and the world”. Everywhere, these interventions have led to the weakening, if not the collapse, of the targeted states, leaving the way clear for chaos and “war of all against all”, with its attendant human rights violations, misery and the displacement of millions of people fleeing the atrocities of terrorist groups vying for power, as in Iraq, Syria, Libya, Afghanistan, Somalia and vast areas of several African countries, to name but a few. These interventions and their consequences are not unrelated to the decline of democracy in the regions and countries concerned.
Timbuktu Institute – Septembre 2024
Contrairement à certaines analyses, les jeunes africains qui ont pu acclamer des juntes militaires après les annonces de coups d’État ne rejetaient pas la démocratie en soi. Ils exprimaient une désillusion, des déceptions et frustrations accumulées après des années de lutte, parfois au prix de nombreuses vies, pour justement les droits qu’octroient le régime démocratique. En fait, il ne se pose pas un problème avec la démocratie comme système de gouvernance mais il y a un malentendu sur le narratif démocratique parfois européocentré mais aussi, au fil des décennies, un véritable problème de crédibilité du discours occidental sur la démocratie aux regard des inconséquences, dû, souvent, aux sacrifices répétés du principe démocratique sur l’autel des intérêts dits stratégiques, économiques etc.
De plus, bien avant la vague de « démocratisation » des années 90, mille et une promesses de paix et de développement avaient été faites à nos pays par l’application de la recette des politiques d’ajustement structurel. Plus de trente ans après, ni la paix encore moins le développement ne sont au rendez-vous. Cette désillusion dans un contexte géopolitique en pleine mutation combinée à la mal gouvernance et à l’usure d’une élite politique déconnectée des aspirations d’une jeunesse « hyper-connectée » faisant face aux dures réalités d’une mondialisation néolibérale a alimentée tous les scepticismes sur l’efficience du modèle démocratique.
Pourtant ce dernier n’a jamais été rejeté en soi mais il se trouve qu’il s’exprime un ardent désir de réinvention et surtout d’endogénéisation d’un principe, d’un esprit, certes universel, mais auquel les différentes déclinaisons intelligibles pourraient donner corps et surtout substance.
Le principe démocratique souffrira aussi bien de l’idéalisme européocentré, des travers des démocraties modernes et de la dégradation continue de l’état de la démocratie qui n’a pas épargné le continent africain avec son lot de violation des droits humains, de restriction des libertés etc. C’est dans ce contexte que surgissent des coups d’État militaires et des régimes autocratiques se nourrissant de discours populistes allant jusqu’à vanter des modèles anti-démocratiques dans un environnement international où même les démocraties dites « modernes » ne sont pas épargné par les différents travers du néolibéralisme entre autres maux.
Un début de prise de conscience des obstacles à la démocratie et la reconnaissance des travers de la déclinaison du principe lui-même sont devenus des éléments essentiels dans la réflexion sur la nécessité de promouvoir ce mode de gouvernance malgré les « vents défavorables », les approches culturalistes portées par un vent de populisme balayant tous les continents et ses effets mondialisés.
Sortir de l’idéalisme européo-centré d’une « démocratie représentative occidentale »
Il est vrai que pour donner à la démocratie une « essence occidentale », contraire à sa portée universelle, on établit souvent, à tort, une filiation, une continuité entre la démocratie athénienne et la démocratie moderne en omettant de rappeler que les pères fondateurs de la démocratie moderne étaient opposés à la démocratie, comme Platon, en y voyant une sorte d’ochlocratie, « gouvernement de la foule, de la multitude, de la populace », une sorte de « tyrannie » ou de « dictature » de la majorité : John Adams (vice-président de G. Washington avant de devenir président des Etats-Unis, disait que la démocratie « est un gouvernement arbitraire, tyrannique, sanglant, cruel et intolérable »[1]. De même en France, d’éminents acteurs de la Révolution de 1789 parlaient des « vices », des « folies » de la démocratie associée tantôt à l’anarchie, tantôt au despotisme, en la rejetant avec horreur comme « le plus grand des fléaux »[2]. On retrouve le même rejet chez les penseurs libéraux du début du XIXe s. B. Constant, A. de Tocqueville, et bien d’autres. Ce n’est qu’en inventant, au milieu du XIXe s., la « démocratie représentative », opposée à la démocratie athénienne (gouvernement du peuple, par le peuple lui-même), que les fondateurs de la « démocratie libérale » ont fini par adhérer à l’idée démocratique[3].
Il faut admettre que cela relève d’un certain idéalisme que de parler de continuité entre la « démocratie directe » athénienne et la « démocratie représentative occidentale », comme on se plait à le dire. Cependant, s’il y a continuité, c’est à un autre niveau qui est souvent occulté : celui qui concerne les bénéficiaires et les exclus de la démocratie. Que ce soit dans les antiques expériences de démocratie directe, ou dans les formes modernes et contemporaines, la démocratie est fondée sur la reconnaissance de l’égalité et de la liberté des membres de la société politique qu’Aristote distinguait de la « société domestique » ; celle-ci étant régie par l’inégalité et la soumission des inférieurs aux supérieurs : les esclaves à leurs maîtres, les femmes aux hommes, les petits aux grands, les « barbares » aux « civilisés », etc. De ce point de vue, la société démocratique peut être définie comme une société dont les membres sont libres et égaux. Par conséquent, lui ôter un de ces piliers, ou les deux, c’est la vouer à disparaître en tant que telle.
Le grand problème, c’est qu’elle a été, dans ses formes antiques comme modernes, le privilège d’une minorité – les hommes libres à Athènes, les peuples des métropoles coloniales à l’exclusion des « indigènes » et des « esclaves » avant la reconnaissance formelle des droits civiques et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Il est important d’admettre que la démocratie a vu le jour et s’est épanouie, jusqu’ici, dans le cadre de contextes rendant l’aspiration à la liberté, à l’égalité et à l’autodétermination un besoin pour la population d’un pays, ou d’une partie d’entre elle, du fait que ses besoins vitaux étaient satisfaits, sinon par sa propre activité, du moins par l’exploitation d’autres populations qui sont souvent, pour ne pas dire toujours, exclues des bienfaits du vivre ensemble démocratique. C’était le cas à Athènes, dans l’antiquité, où les hommes libres (environ 15% de la population) étaient dégagés des activités nécessaires à satisfaire leurs besoins fondamentaux, par l’exploitation des esclaves, des femmes et des métèques, ou étrangers, travaillant dans l’artisanat et le commerce.
Admettre les travers des démocraties modernes
Il est, aussi, une réalité que certaines démocraties modernes n’ont vu le jour qu’à la faveur des richesses accumulées grâce aux découvertes maritimes, à la pratique à une grande échelle de l’esclavage, à l’extermination ou à la soumission des indo-américains, au pillage des richesses des pays et des continents colonisés et à l’échange inégal avec les pays échappant à la colonisation ou accédant à l’indépendance après des décades et des siècles de domination coloniale par les pays jouissant de la démocratie et la finançant grâce à l’exploitation du plus grand nombre. Les chiffres sont éloquents à ce titre : 85% de la population de l’antique Athènes, près de 90% de la population de la planète exclus de la démocratie et exploités par une minorité de nantis des pays dominants depuis des siècles. Ainsi, de nos jours, selon les rapports publiés tous les deux ans par l’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale (IDEA International), le taux de la population jouissant réellement de la démocratie est inférieur à ce qu’il était à Athènes dans l’antiquité. En 2014, 12,5 % des pays évalués sont des démocraties à part entière, 35,5 % sont des démocraties imparfaites, 14,4 % des régimes hybrides et 37,6 % des régimes autoritaires (Voir la carte ci-dessous).
Une dégradation continue de l’état de la démocratie qui n’a pas épargné l’Afrique
Le rapport IDEA International de l'année 2015, publié le 5 mars 2016, souligne une forte dégradation de l’état de la démocratie dans le monde. La plupart des pays africains font partie des régimes autoritaires ou, au mieux, hybrides. La situation ne va pas en s’améliorant. En 2020, pour la cinquième année consécutive, le nombre de pays évoluant dans le sens de l’autoritarisme a dépassé le nombre de pays en voie de démocratisation. Des pays considérés comme faisant partie des plus grandes démocraties du monde, comme le Brésil et l’Inde, connaissent un recul démocratique inquiétant. Ces régressions de la démocratie affectent des pays comme les États-Unis, la Hongrie, la Pologne et la Slovénie. Même dans les démocraties établies, les pouvoirs issus de véritables élections ont de plus en plus tendance à recourir à des méthodes autoritaires. Souvent, ces reculs de la démocratie rencontrent un certain soutien populaire. Les rapports concernant l’état de la démocratie dans le monde attirent l’attention sur l’évolution alarmante enregistrée en 2020 qui a vu le nombre de pays devenant de plus en plus autocratiques atteindre un niveau jamais connu auparavant.
Dans le cadre de cette évolution générale, l’Afrique compte parmi les continents où ces reculs sont des plus inquiétants ; les progrès enregistrés au cours des trois dernières décennies marquent le pas ou connaissent un net recul. Souvent, les résultats des élections sont contestés, parfois avec violence. Contournement de la règle de limitation du nombre de mandats présidentiels (13 pays africains ont modifié ou supprimé les dispositions constitutionnelles relatives à la limitation du nombre de mandats présidentiels entre 2015 et 2020), résurgence de changements anticonstitutionnels, répression des partis d’opposition et des populations qui les soutiennent, et autres entorses sont des motifs de désenchantement démocratique, notamment parmi les jeunes qui représentent 75% de la population de pays soumis aux caprices de gérontocraties usées par des décennies de pouvoir autocratique, autoritaire, corrompu et sourd aux demandes de la société. Ces évolutions sont à l’origine de la multiplication des interventions militaires, ou s’appuyant sur l’armée, comme en Algérie, en Égypte, au Soudan au Zimbabwe, ou plus récemment au Mali, au Tchad et au Burkina.
Parfois, ces interventions sont soutenues par la population dont les conditions de vie se dégradent de jour en jour : en 2020, 34 pays africains (68 %) font partie du dernier quartile mondial en matière de bien-être élémentaire. L’intervention de l’armée apparait comme un moyen de débloquer des situations d’impasse et sont saluées par une population désespérée et qui ne sait plus à quel saint se vouer. Beaucoup de jeunes pour qui tous les horizons sont bouchés acclament les coups d’Etat militaires et saluent les interventions du groupe Wagner, de la Russie, de la Chine, de la Turquie et d’autres puissances internationales ou régionales pour qui la démocratie est le dernier de leurs soucis. C’est aussi le cas des jeunes qui, n’ayant plus aucun espoir de s’en sortir dans le pays, font tout pour partir y compris en risquant leur vie dans la traversée du Grand Sahara puis, quand ils y arrivent, en tentant de passer vers l’autre rive de la Méditerranée devenue le plus grand cimetière africain, dans l’indifférence des démocraties européennes qui se barricadent ; ou en rejoignant les groupes armés jihadistes pour qui la démocratie et les droits humains ne sont que les « hérésies des temps modernes » qu’ils se proposent d’éradiquer.
Restriction des libertés et violation persistante des droits humains
A l’ombre de ces évolutions, on assiste à la restriction des libertés en général, et de la liberté d’expression en particulier, dans au moins 29 pays. Les violations des droits humains se multiplient. La violence à l’égard des femmes augmente. Les réformes constitutionnelles ont en partie compromis la lutte contre les inégalités entre les genres. La responsabilité de cette situation incombe aux autorités des pays concernés, certes ; mais les grandes puissances ont aussi une grande part de responsabilité que ce soit en raison du passé colonial non encore dépassé, ou du point de vue des politiques néocoloniales s’appuyant sur des régimes autoritaires, voire des dictatures corrompues, et sur les institutions financières et l’OMC pour imposer des politiques néolibérales de réajustement structurel, de libre circulation des capitaux et des marchandises, de désengagement social de l’Etat se traduisant par le recul des services publics dans les domaines de la santé, de l’enseignement, de l’habitat, des transports, de soutien aux plus démunis, etc.
Conscience des obstacles à la démocratie : griefs et reproches au néolibéralisme
Il est difficile de tenir un discours crédible sur la promotion de la démocratie sans s’arrêter sur les effets de la mondialisation néolibérale et ses connivences avec les différentes expressions de la révolution conservatrice qui se développent, sous différentes formes, partout dans le monde : néoconservateurs, Tea Party et autres mouvances suprématistes en Amérique du Nord, mouvements identitaires d’extrême droite en Europe, eurasistes et national-orthodoxes en Russie et dans les pays de l’ex-empire soviétique, hindouisme politique ultra nationaliste et xénophobe en Inde, intégrisme catholique et fondamentalisme évangélique de mèche avec des partis d’extrême droite en Amérique du Sud, extrémisme juif en Israël et dans les diasporas juives, islam politique et mouvements islamo-nationalistes dans les pays musulmans et en Afrique, etc. Partout, c’est « la double impasse des fondamentalismes marchands et religieux à l’assaut de l’universel », selon l’expression de Sophie Bessis[4].
On pourrait penser qu’au lieu de favoriser la généralisation du progrès économique et social et de la démocratie, comme promis et annoncé par ses « prophètes » et ses promoteurs, le néolibéralisme a contribué, partout, à l’aggravation des inégalités et à la concentration des richesses entre les mains d’un infime minorité (les 1% les plus riches ont vu leur part de la croissance des revenus passer de 16% en 1980 à 27% en 2016, pendant que les revenus des 50% des plus pauvres ont stagné autour de 9%. ; selon le rapport de l’Observatoire des inégalités publié en septembre 2020, les 1% les plus riches détiennent, en 2020, près de la moitié de la richesse mondiale). Sur le plan politique, ces évolutions ont conduit à l’affaiblissement, voire à l’effondrement des Etats-nations les plus fragiles. Là où on attendait le triomphe de la démocratie et de l’Etat de droit, on a assisté aux purifications ethniques, à de nouveaux génocides, au développement des populismes sur fond de guerres des religions ou des cultures, aux replis sur des « identités meurtrières », selon l’expression d’Amine Maalouf, favorisés par la remise en cause des solidarités nécessaires pour faire reculer les inégalités et la « misère du monde » incompatibles avec le vivre ensemble démocratique.
Certains, comme Mohamed-Chérif Ferjani, pensent même que pour occulter la responsabilité de la mondialisation du néolibéralisme dans le recul de la démocratie, on a préféré la recherche de boucs émissaires en parlant de « clash des civilisations » inhérent à l’hostilité de certaines cultures, ou de certains « Etats voyous », à l’égard de la démocratie et de l’Occident. Lors d’un entretien dans le cadre de la préparation de ce rapport il dresse des constats inquiétants. Selon lui, « pour réduire ces menaces, et au nom de la guerre contre le terrorisme, les puissances se présentant comme les champions de la défense de la civilisation contre la barbarie, de la démocratie contre la dictature et le totalitarisme, se sont donné le droit de mener des interventions pour soi-disant instaurer des régimes démocratiques et des Etats de droit et éliminer des dictatures opprimant leurs peuples et menaçant la paix de pays voisins et dans le monde ». Partout, ces interventions ont conduit à l’affaiblissement, voire à l’effondrement, des Etats visés, laissant le terrain libre au chaos et à « la guerre de tous contre tous » avec son lot de violations des droits humains, de misère, de déplacement de millions de personnes fuyant les exactions de groupes terroristes se disputant le pouvoir comme en Irak, en Syrie, en Libye, en Afghanistan, en Somalie, dans de vastes territoires de plusieurs pays africains, etc. Ces interventions et leurs conséquences ne sont pas sans rapports avec le recul de la démocratie dans les régions et les pays concernés.
[1] Lettre datée du 18 août 1807 dans Charles F. Adams (dir.) Correspondances Between John Adams and Mercy Warren, New-York, Arno Press, 1972, p.394.
[2] Voir François Furet et Ran Halévi (dir.), Orateurs de la révolution française, Paris, Gallimard, 1984
[3] Voir Francis Dupuis-Déri, Démocratie, histoire d’un mot aux Etats-Unis et en France, Lux Editeur, Paris 2019.
[4] voir son livre La double impasse, l’universel à l’épreuve des fondamentalismes religieux et marchand, Paris, La Découverte, 2014.
On the occasion of the visit of the German Federal Minister of Foreign Affairs to Senegal, Ms. Annalena Baerbock, on July 15 and 16, 2024, a panel discussion was organized in her honor at the Goethe Institut Dakar. The Timbuktu Institute, as a leading regional think tank on peace and security issues, was invited to share its experience on regional stability issues, focusing on the contribution of women and youth in conflict resolution and the preservation of democracy. Yague Samb, Country Director of the Timbuktu Institute Senegal, represented the institute at the event in her capacity as a researcher who has criss-crossed a number of countries in the sub-region, interacting with various women and youth actors in crisis zones. The Country Director focused her presentation first on youth issues, then on women's issues, in relation to the question of regional stability.
First and foremost, she started from the premise that African youth, contrary to theses that confine them to the straitjacket of “burden” or “demographic bomb”, can represent an opportunity if they are well educated and empowered. But, for the researcher, it cannot be denied that these same young people see themselves as vulnerable to radicalization and violent extremism (VE). Indeed, according to many Sahelian populations, such as those in the Zinder region of Niger, where the institute conducted one of the first perception studies on the issue, young people are tempted by violent extremism because of unemployment (according to 43.5%), social insecurity (42.5%) and dropping out of school (13%). In an effort to map vulnerability factors to these phenomena, the trends observed in Niger were confirmed in the greater Dakar suburbs of Senegal (2016), on the border between Senegal and Mauritania, more specifically in the two Rosso areas bordering the two countries (2018), on the Senegalese-Guinean border, in Vélingara and Labé (2021), and in southeastern Senegal, in the Kédougou and Tambacounda regions (2024).
Studies have shown that radicalization is a multi-factorial phenomenon, and that beyond the ideological dimension, socio-economic frustrations are important factors in the radicalization of young people. In other words, the niches of violent radicalization lie in the intersection of factors of fragility that are incentive factors or structural causes (unemployment, inequality, corruption, etc.), attractive factors or motivations of the individual (desire for adventure, the search for an identity, material motivations, fear of repercussions by EV groups, etc.) and what we call process factors or protectors present in a community. In a forward-looking and preventive approach, the Timbutku Institute has gathered from young people, at least in Senegal, as part of the study on radicalization factors and the perception of terrorism among young people in the greater Dakar suburbs, that the main antidote to radicalism leading to EV is to ensure employment. According to the Timbuktu Institute expert, solutions to the vulnerabilities faced by young people include strengthening socio-economic inclusion policies, correcting the social injustices of which they claim to be victims, and focusing on education, while strengthening this human capital.
His speech went on to emphasize women's involvement in conflict resolution. Indeed, the question of women is closely linked to that of children, in the sense that these two groups are naturally considered to be among the most vulnerable. The example of the internally displaced women of Sénou (Bamako), approached by the Timbuktu Institute researchers in 2017 through the study “Femmes, prévention et lutte contre l'EV au Mali” (Women, prevention and the fight against EV in Mali), is clear enough to justify the complexity of the female situation in this crisis context. Indeed, these women who have experienced the conflict in Northern Mali first-hand, regret their lack of involvement in conflict prevention and resolution initiatives. But, above all, women were at the forefront of the fight against extremism, notably in Afghanistan and Algeria in the 90s, but also in Timbuktu. They are predisposed to detecting the signs of radicalism in young people, as in the case of the displaced women of Sénou, 55.6% of whom said they had already seen cases of radicalized young people in their neighborhood or immediate surroundings.
However, despite this potential, women continue to face numerous challenges that hinder their socio-economic development. With this in mind, the Timbuktu Institute recently conducted a preliminary study on the obstacles and solutions to the socio-economic inclusion of women in the former G5-Sahel countries. The study is the result of meetings with women entrepreneurs from the region, who reflected on the issue of female entrepreneurship and listed a number of obstacles that stand in their way.
The most recent meeting was held in Dakar at the end of June 2024, where it emerged that, over and above their resilience, women face countless socio-cultural barriers that limit their access to land, difficulties in accessing financing, challenges in accessing education and training, etc. This raises the question of whether the battle against extremism in all its forms has been won, given the persistence of obstacles to women's socio-economic inclusion. In any case, insists the expert from the Timbuktu Institute, vigilance must be the order of the day, while capitalizing on women's potential, by putting women at the forefront of initiatives to raise awareness of extremism.