Source : Météo Sahel Décembre 2024
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Au Togo, le gouvernement a annoncé la date des élections sénatoriales avant de les repousser à nouveau de quelques jours. Ces élections marquent la dernière étape pour la mise en place de la nouvelle Constitution promulguée au courant de l’année écoulée, mettant ainsi fin au régime présidentiel pour un régime parlementaire. Désormais les sénateurs examineront d’abord les projets de lois avant que les députés ne les adoptent. Ces deux chambres réunies en Congrès, vont élire le président de la République. Cette nouvelle Constitution contestée par l’opposition et les organisations de la société civile a mis fin à l’élection du chef de l’État au suffrage universel direct, plaçant ainsi le pays dans un contexte politique tendu. Certains partis politiques comme l’Alliance nationale pour le changement (ANC) mais aussi la Dynamique pour la majorité du peuple (DMP), qui regroupe en son sein des partis d’opposition et d’organisations de la société civile, ont annoncé le boycott de ces scrutins. Ainsi, cette opposition continue de s’insurger contre cette révision constitutionnelle qu’elle qualifie de « coup d'État constitutionnel ».
Sur le plan sécuritaire, une accalmie est notée après le double attentat terroriste dans le nord du pays au courant du mois de novembre. Toutefois, les efforts déployés dans la lutte contre l’extrémisme violent au Nord du pays frontalier avec le Burkina Faso doivent être poursuivis et la résilience des communautés renforcée. Le pays s’est positionné comme unmédiateur dans la crise qui secoue les pays du Sahel central, devenu Alliance des États du Sahel (AES), avec la CEDEAO. Au sortir de la dernière rencontre des chefs d’États de la Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest, lePrésident togolais avec son homologue sénégalais, sont désignés médiateurs pour faire revenir les pays de l’AES au sein de l’organisation sous-régionale. La récente annonce du Ministre togolais des affaires étrangères sur une potentielle adhésion à l’AES ne cesse d’interroger à travers la région.
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Prime Minister Ousmane Sonko's long-awaited general policy statement finally took place. For around three hours on Friday December 27, the President of Pastef outlined the foundations of a vast program of economic reforms to turn around the country's socio-economic situation. “ It is imperative to make a break of a depth and scope never seen before in our country, never seen since our accession to independence ”, he declared. Denouncing Senegal's entrenchment “ in the colonial economic model ‘, Ousmane Sonko announced a major tax reform, by ’ broadening the tax base, while gradually lowering average tax rates ”. The aim is to “ make all Senegalese pay less, but make all Senegalese pay more ‘, in order to ’ achieve an efficient and equitable tax system ”. The Prime Minister promised that Senegal would “ withdraw from all bilateral agreements involving a tax haven, and renegotiate unfavorable clauses in agreements concluded with normal-tax states, where these agreements are unfavorable to us.” In addition, he announced the application of “the principle of reciprocity for the issuance of visas to nationals of certain countries who require them for our nationals ”. Finally, he mentions a project to repeal the amnesty law - brought in by ex-president Macky Sall - which covers the violent events that left dozens dead between 2021 and 2024.
Sovereignty from theory to practice?
" I have instructed the Minister of the Armed Forces to propose a new doctrine for defense and security cooperation, implying, among other consequences, the end of all foreign military presences in Senegal, as of 2025 ”. With these words, President Diomaye Faye set December 31, in his New Year's address, as the date for the withdrawal of foreign military bases from the country. Although France was not mentioned by name, this statement is in line with the Senegalese president's comments on the incompatibility of France's military presence with Senegalese sovereignty. In keeping with his declared desire to redefine the terms of his partnerships rather than to make a complete break with them, Diomaye Faye nevertheless made it clear that “ all Senegal's friends will be treated as strategic partners; within the framework of an open, diversified and uncomplicated cooperation. ”
The political front still open?
Earlier this month, in the space of a few days, the now ex-mayor of Dakar, Barthélémy Dias, suffered two major setbacks. First, notwithstanding his election, he lost his seat in Parliament. This follows the removal of his mandate as a member of parliament for the opposition coalition Samm Sa Kaddu, due to a two-year prison sentence - including six months' imprisonment - in December 2023, in the Ndiaga Diouf case dating back to 2011. In accordance with article 61 of the Senegalese Constitution, the Minister of Justice, Ousmane Diagne, referred the matter to the office of the National Assembly, which thus proceeded to strike him off the list. Not to return to the National Assembly, but so that the Senegalese can see for themselves whether those currently in power believe in the rule of law “, he reacted on December 9. A few days later - on December 13 - Barthélémy Dias was also stripped of his seat as mayor of Dakar. According to a document signed by Dias himself, the prefect was asked to pronounce his resignation on grounds of ineligibility in connection with the above-mentioned affair. The complaint was instigated by a Pastef party activist.
Internally , comments made by Minister-Counsellor Cheikh Oumar Diagne on the subject of Senegalese infantrymen have caused a major controversy. In a television broadcast on December 21, he called them “ traitors who fought for their brothers ”. This statement, which came just three weeks after the Senegalese government's solemn commemoration of the skirmishers, was clearly ill-timed. Finally, in a presidential decree issued on December 30, President Diomaye Faye appointed Papa Thione Dieng as the new Director of General Resources at the Presidency, replacing Cheikh Oumar Diagne.
Economic interests as a link with Mauritania?
Senegal and Mauritania continue to move ever closer to exploiting their joint gas field. Indeed, the two countries have announced the opening of the first well” of their marine deposit, an important step that should lead to the ‘commercialization’ of the product, according to a joint press release issued on January 1. “ The achievement of this milestone marks a major step towards the completion of the GTA project, and consolidates the exemplary partnership between Mauritania and Senegal, which is now destined to play a key role in the regional energy industry ”, says the note. The project, known as Grand Tortue Ahmeyim (GTA), is being developed by the UK's BP together with the US's Kosmos Energy, Mauritania's Société Mauritanienne des Hydrocarbures (SMH) and Senegal's Petrosen. Launched in 2020, it aims to produce 100,000 barrels per day.
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La Déclaration de politique générale tant attendue du Premier Ministre, Ousmane Sonko a finalement eu lieu. Vendredi 27 décembre, le président du Pastef, a pendant environ trois heures d’horloge, esquissé les bases d’un vaste programme de réformes économiques pour redresser la situation socio-économique du pays. « Il est impératif d’opérer une rupture d’une profondeur et d'une portée jamais vue dans notre pays, jamais vu depuis notre accession à l’indépendance », a-t-il déclaré. Dénonçant l’enfermement du Sénégal « dans le modèle économique colonial », Ousmane Sonko a annoncé une importante réforme fiscale, en « élargissant l'assiette fiscale, tout en abaissant graduellement les taux d'imposition moyen». Ceci pour « faire payer moins à tous les Sénégalais mais faire payer à tous les Sénégalais » dans le but de « parvenir à une fiscalité efficace et équitable ». Le Premier Ministre a promis que le Sénégal allait « se retirer de toutes les conventions bilatérales impliquant un paradis fiscal et renégocier les clauses défavorables des conventions conclues avec des États à fiscalité normale, lorsque ces conventions nous sont défavorables. » De plus, il a annoncé l'application du «principe de réciprocité pour la délivrance de visas aux ressortissants de certains pays qui l'exigent à nos ressortissants ». Enfin, il évoque un projet d’abrogation de la loi d'amnistie – porté par l'ex-président Macky Sall – qui couvre les violents événements qui avaient fait des dizaines de morts entre 2021 et 2024.
Souverainisme de la théorie à la pratique ?
« J'ai instruit le ministre des Forces armées de proposer une nouvelle doctrine de coopération en matière de défense et de sécurité, impliquant, entre autres conséquences, la fin de toutes les présences militaires de pays étrangers au Sénégal, dès 2025 ». Par ces mots, le président Diomaye Faye a fixé le 31 décembre, dans son discours du Nouvel An, une date pour le retrait des bases militaires étrangères présentes dans le pays. Même si la France n’est pas citée nommément, cette déclaration s’inscrit dans la droite ligne des propos du président sénégalais au sujet de l’incompatibilité de la présence militaire de la France avec la souveraineté sénégalaise. Fidèle à sa volonté affichée d’être moins dans une démarche de rupture totale que de redéfinition des termes des partenariats, Diomaye Faye a toutefois précisé que « tous les amis du Sénégal seront traités comme des partenaires stratégiques ; dans le cadre d’une coopération ouverte, diversifiée et décomplexée. »
Le front politique toujours ouvert ?
Plus tôt dans le mois, en l’espace de quelques jours, le désormais ex-maire de Dakar, Barthélémy Dias aura subi deux revers de taille. D’abord, nonobstant son élection, il a, dans la foulée, perdu son siège au Parlement. Ceci suite à une radiation de son mandat de député de la coalition d’opposition Samm Sa Kaddu, du fait d’une condamnation à deux ans de prison – dont six mois fermes – en décembre 2023, dans l’affaire Ndiaga Diouf datant de 2011. En effet, conformément à l’article 61 de la Constitution sénégalaise, le ministre de la Justice, Ousmane Diagne a saisi le bureau de l’Assemblée nationale, qui a ainsi procédé à cette radiation. Comme certains pouvaient s’y attendre, l’intéressé s’est tout de suite saisi de son droit de recours, « Non pas pour retourner à l'Assemblée nationale mais pour que les Sénégalais puissent voir eux-mêmes si les tenants actuels du pouvoir croient en l’État de droit », a-t-il réagi le 9 décembre. Quelques jours plus tard – le 13 décembre -, Barthélémy Dias a également été déchu de son fauteuil de maire de Dakar. Selon un document signé par lui-même, le préfet a été saisi pour prononcer sa démission pour cause d’inéligibilité au sujet de l’affaire susmentionnée. Derrière cette plainte, un militant du parti Pastef serait l’instigateur.
À l’interne, des propos du ministre-conseiller Cheikh Oumar Diagne au sujet des tirailleurs sénégalais, ont suscité une grosse polémique. En effet, dans une émission télévisée parue le 21 décembre, il les avait traités « de traîtres qui s’étaient battus pour leurs frères ». Il faut dire que cette déclaration qui survient seulement trois semaines après les solennelles commémorations de l’Etat sénégalais de la mémoire des tirailleurs, est clairement inopportune. Finalement, dans un décret présidentiel publié le 30 décembre, le président Diomaye Faye a nommé Papa Thione Dieng, nouveau directeur des moyens généraux à la Présidence, en remplacement de Cheikh Oumar Diagne.
Les intérêts économiques en trait d’union avec la Mauritanie ?
Par ailleurs, le Sénégal et la Mauritanie continuent de s’acheminer de plus belle vers l’exploitation de leur gisement de gaz commun. En effet, les deux pays ont annoncé l’ouverture du premier puits » de leur gisement marin, une étape importante devant conduire à « la commercialisation » du produit, selon un communiqué conjoint publié le 1er janvier. « Le franchissement de cette étape importante marque un grand pas dans l’aboutissement du projet GTA et consolide le partenariat exemplaire existant entre la Mauritanie et le Sénégal désormais destinés à jouer un rôle-clé dans l’industrie énergétique régionale », précise la note. Le projet, dénommé Grand Tortue Ahmeyim (GTA) est développé par le britannique BP avec l’américain Kosmos Energy, la Société mauritanienne des hydrocarbures (SMH) et la sénégalaise Petrosen. Lancé en 2020, il vise une production de 100 000 barils par jour.
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Following the meeting of the leaders of the Permanent Strategic Framework for the Defense of the People of Azawad (Cadre stratégique permanent pour la défense du peuple de l'Azawad - CSP-DPA) held between November 26 and 30, a coalition of armed groups separatists with a predominantly Tuareg base, the Azawad Liberation Front (FLA) created on November 30, 2024, was created at Tinzaouaten on the border with Algeria, which is the target of strikes by the Malian army. The announcement was made from Tinzaouaten, their stronghold. The new coalition calls on “ all the sons of Azawad with other ideologies to open up to union ‘, and on the countries of the sub-region and the international community to ’ recognize the FLA as the sole representative of the people of Azawad ”. The FLA, which brings together several separatist groups in northern Mali, aims for independence from the central government in Bamako. The latter is accused of making no distinction between independence fighters and jihadist groups, especially with the death of Fahad Ag Almahmoud and seven other FLA leaders on December 1, 2024, just a few days after its creation. This situation calls into question the durability of the Algiers Agreement signed in 2015 between the Malian government and the separatist groups of northern Mali. "The creation of the Azawad Liberation Front must be placed in the context of the breakdown of the agreement for peace and reconciliation in Mali, which came out of the Algiers process. The Malian government denounced the Algiers agreement in January 2024, and proposed replacing it with an intermalian dialogue. This dialogue did take place, but did not bring together all the components. For some of the former signatories of the Algiers agreements, armed struggle is the only option left,” points out journalist Seidik Abba, a Sahel specialist and author of Mali-Sahel, notre Afghanistan à nous(Impacts Editions, 2022).
Under unclear conditions, the Khalif of the Omar family of Nioro du Sahel, Thierno Amadou Hady Tall, was kidnapped on December 26, 2023, following accusations of collaboration with the military authorities and Russian mercenaries from the Wagner group. The announcement of his death was made by the leader of the Macina Katiba, Amadou Koufa, according to a recording attributed to him. Without any confirmation of this recording, it nevertheless sows doubt in the minds of Malians in a context where the Nioro du Sahel region, the stronghold of the Omar brotherhood, is going through an unprecedented crisis with the rise of armed jihadist groups, with consequences for social cohesion, living together and the security of local populations.
In Mali, after four years of legal proceedings of various kinds, the transitional government and the political class are in a state of calm. This is evidenced by the release of the former Malian Minister of Energy and Mines, Lamine Seydou Traoré, who returned to his home in Bamako on December 03 after more than 10 months under arrest. He had been implicated in the purchase of 27 generators and 2 transformers, a major contract worth 6.2 billion CFA francs awarded to Case Construction. Officials of the electricity company EDM, as well as economic operators, were also charged in this case. They were all charged with “forgery, use of forgeries and damage to public property”, even though Lamine Seydou Traoré has always maintained his innocence.
Still in the spirit of appeasement between the authorities and the political class, on December 05, several opponents of the authorities were granted provisional release after several months in prison. They had been accused of pursuing their political activities at a time when these had been banned throughout Mali, and therefore prosecuted for “ plotting against the legal authorities and illegal assembly ”. Among those released were former ministers and leaders of political parties and movements who had signed a declaration urging the authorities to return power to civilians. Speaking on condition of anonymity, one of the released opponents said:"We've all gone home. The prosecutor told us that it's a provisional release, but without judicial control or travel restrictions”.
After years of work, Mali has just taken an important step towards strengthening its security with the finalization by Malian experts of the new national security policy. This new strategic organization tool, under the leadership of General Yamoussa Camara, aims to strengthen security and prevent conflict by involving all stakeholders in a more inclusive way. In the face of the security threat, the success of the national security policy depends on the involvement of all players, and on the State making the necessary resources available for more effective implementation.
Après la rencontre des responsables du Cadre stratégique permanent pour la défense du peuple de l’Azawad (CSP-DPA) qui s’est tenue entre le 26 et le 30 novembre, une coalition de groupes armés séparatistes à dominante touareg, le Front de libération de l’Azawad (FLA) créé le 30 novembre 2024 a été créée à Tinzaouaten au niveau de la frontière avec l’Algérie qui fait l’objet de frappes de l'armée malienne. L’annonce a été faite depuis Tinzaouaten, leur fief. La nouvelle coalition appelle « tous les fils de l’Azawad ayant d’autres idéologies à s’ouvrir à l’union » et les pays de la sous-région ainsi que la communauté internationale à « reconnaître le FLA comme le seul représentant du peuple de l’Azawad ». Le FLA qui réunit plusieurs groupes séparatistes du Nord Mali, a pour objectif l’indépendance contre le pouvoir central à Bamako. Ce dernier serait accusé de ne faire aucune différence entre les indépendantistes et les groupes djihadistes surtout avec la mort de Fahad Ag Almahmoud et de sept autres cadres du FLA le 1er décembre 2024, quelques jours seulement après sa création. Cette situation remet en cause la durabilité de l’accord d’Alger signé en 2015 entre le gouvernement malien et les groupes séparatistes du nord Mali. “Il faut placer la création du Front de Libération de l'Azawad dans le contexte de la rupture de l'accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d'Alger. Le gouvernement malien a dénoncé l'accord d'Alger en janvier 2024 et a proposé de le remplacer par un dialogue intermalien. Ce dialogue a eu lieu, mais il n'a pas réuni l'ensemble des composantes. Pour une partie des anciens signataires des accords d'Alger, il n'y a plus aucune autre option que la lutte armée”, souligne le journaliste Seidik Abba, spécialiste du Sahel, auteur de Mali-Sahel, notre Afghanistan à nous, (Impacts Editions, 2022).
Dans des conditions floues, le Khalif de la famille omarienne de Nioro du Sahel, Thierno Amadou Hady Tall avait été enlevé le 26 décembre 2023 après des accusations de collaboration avec les autorités militaires et les mercenaires russes du groupe Wagner. L’annonce de son décès aurait été faite par le chef de la Katiba Macina Amadou Koufa selon un enregistrement qui lui serait attribué. Sans aucune confirmation de cet enregistrement, il sème néanmoins le doute dans l’esprit des maliens dans un contexte où la région de Nioro du Sahel qui est le fief de la confrérie omarienne traverse une crise sans précédent avec la montée des groupes armés djihadistes avec des conséquences sur la cohésion sociale, le vivre - ensemble et la sécurité des populations locales.
Au Mali, l’heure est à l'apaisement entre le gouvernement de transition et la classe politique après quatre années de poursuites judiciaires de diverses natures. En témoigne la libération de l’ancien Ministre malien de l’Énergie et des Mines Lamine Seydou Traoré qui a rejoint son domicile à Bamako le 03 décembre après plus de 10 mois sous mandat de dépôt. Pour rappel, il avait été impliqué dans une affaire d’achat de 27 groupes électrogènes et de 2 transformateurs, un important marché de 6,2 milliards de francs CFA attribué à Case Construction. Des responsables de la société d’électricité, EDM, ainsi que des opérateurs économiques étaient également inculpés dans cette affaire. Ils étaient tous poursuivis pour ”faux, usage de faux, et atteinte aux biens publics”, même si Lamine Seydou Traoré a toujours clamé son innocence.
Toujours dans une dynamique d'apaisement entre les autorités et la classe politique, le 05 décembre, plusieurs opposants aux autorités ont obtenu une liberté provisoire après plusieurs mois d’emprisonnement. Ils avaient été accusés de poursuivre leurs activités politiques à un moment où celles-ci avaient été interdites sur l’étendue du territoire malien et donc poursuivis pour « complot contre les autorités légales et réunion illégale ». Parmi les personnes libérées, figurent d’anciens ministres, des chefs de partis et de mouvements politiques qui, ensemble, avaient signé une déclaration qui exhortait les autorités à rendre le pouvoir aux civils. Dans l’anonymat, un des opposants libérés déclare :"Nous sommes tous rentrés à la maison. Le procureur nous a dit que c'est une liberté provisoire mais sans contrôle judiciaire et sans restriction de voyage".
Après des années de travail, le Mali vient de franchir une étape importante dans le cadre du renforcement de sa sécurité par la finalisation par des experts maliens de la nouvelle politique de sécurité nationale. Un nouvel outil d’organisation stratégique sous la direction du Général Yamoussa Camara visant à renforcer la sécurité et à prévenir les conflits par l’implication de tous les acteurs concernés pour plus d’inclusivité. Face à la menace sécuritaire, il y va de la réussite de la politique nationale de sécurité que tous les acteurs s’impliquent et que l’État mette à disposition les ressources nécessaires pour plus d’efficacité dans la mise en œuvre.
Timbuktu Institute – Janvier 2025
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Ce rapport a été élaboré à partir de données quantitatives et qualitatives collectées entre le 23 mai et le 24 juin 2023. Après l’épisode de Barkhane au Mali, l’exigence du départ précipité des forces françaises, puis américaines du Niger suite au coup d’État du 26 juillet 2023, a remis à l’ordre du jour le débat sur les coopérations sécuritaires. Mais, au-delà des aléas de la géopolitique et des accords entre États, les perceptions de ces coopérations par les populations locales ont pesé sur leur évolution dans un contexte sahélien où les sociétés civiles se sont approprié le débat sécuritaire qui n’est plus l’apanage des élites politiques, encore moins des gouvernants. Pour dire que la question posée aujourd’hui du démantèlement des bases militaires françaises de pays comme le Tchad, la Côte d’Ivoire et le Sénégal n’est que l’aboutissement d’un long processus enclenché depuis quelques décennies, bien qu’il faille lier une telle situation à un contexte de montée globale et inédite des souverainismes qui n’a pas épargné l’Afrique.
Considérée, dans les perceptions entretenues par un discours politique et militant comme une relique de la colonisation, la présence militaire française, par exemple, a, depuis plus de trente ans, fait l’objet de débats et de controverses nourris, sous bien des aspects, par les « inconséquences » de la politique africaine de la France, finalement schématisée par l’expression « Françafrique ».
Mais, ce processus a connu différents tournants pendant la dernière décennie particulièrement marquée par la lutte contre le terrorisme au Sahel. La recrudescence du phénomène terroriste au Sahel a poussé les États de la région à développer la coopération militaire avec la France et d’autres puissances, en tant que trouvaille pour une réponse immédiate face au péril sécuritaire. Après l’opération Serval qui avait symbolisé, en son temps, un certain succès assez temporaire de ce type de coopération et d’intervention d’une force étrangère sur la demande d’un pays sahélien, la mise en place de l’opération Barkhane allait inaugurer une nouvelle ère de pérennisation d’une présence contenant en elle-même les germes de sa propre contestation.
Très vite, les « héros » libérateurs vont être perçus comme des « occupants » dans un contexte marqué par des échecs successifs, des bavures réelles ou présumées mais aussi une montée en puissance de sentiments souverainistes. En fait, le contexte de la guerre informationnelle au Sahel auquel on impute la montée d’un certain « sentiment anti-français », ne fut qu’un facteur aggravant d’une situation qui était déjà rendue complexe par un « conflit de perception du conflit » entre les conceptions internationales et les perceptions locales.
Il est vrai que le contexte délétère créé par la guerre informationnelle durablement installée au Sahel et accentuée par le conflit en Ukraine, de même que le repositionnement de la Russie dans la région, a dû peser sur de telles perceptions. Elles trouvaient déjà leurs racines profondes dans la contestation des politiques sécuritaires défaillantes des États sahéliens eux-mêmes face au terrorisme gagnant du terrain. Il s’y ajoute que des théories « complotistes » pour certains, nourries par la « désinformation », entretenaient l’idée d’une connivence entre terroristes et certaines puissances étrangères. Ainsi, les coups d’État successifs au Mali, au Burkina Faso et au Niger, ne semblent avoir été que des accélérateurs d’un processus de « désamour » qui a ensuite surfé sur des facteurs, des imaginaires et des perceptions qu’il était nécessaire de sonder.
La coopération militaire a été l’une des premières solutions conçues et développées pour repousser l’assaut des groupes terroristes que ce soit en Afghanistan ou encore au Sahel. Dans cette dernière région, l’opération Serval, au début de la crise malienne, s’inscrivit, alors, dans le contexte d’une coopération militaire en situation d’urgence qui a finalement été inscrite dans la durée. Mais, très vite, au rythme des attaques et de la propagation des zones de conflit, ce qui semblait être une solution temporaire s’inscrivit dans la durée sans qu’une communication adéquate accompagnât les actions et les initiatives. Il s’est, depuis, installé un sentiment d’incompréhension pouvant aller jusqu’au rejet par les populations locales tout en posant d’importants problèmes politiques internes aux États qu’elle était censée soutenir et renforcer. Ainsi, la lutte contre le terrorisme qui avait créé, pour un temps, une convergence de vues entre États sahéliens et partenaires internationaux, a finalement contribué à diviser et faire ressurgir de vieux démons, tels que la suspicion d’un « impérialisme » occidental et une vision encore plus négative des interventions militaires extérieures.
Ce phénomène d’une appréciation négative des coopérations sécuritaires s’est amplifié avec l’effet des réseaux sociaux et, pour certains, des campagnes de désinformation, alimentant l’incompréhension et parfois le rejet de l’action des puissances occidentales, notamment de la France dans la région sahélienne. A partir de 2015, commence à se poser un véritable débat au sein de la classe politique, de l’intelligentsia et des sociétés civiles africaines qui se nourrit des contradictions et incohérences de tous bords. D’un côté, jusqu’aux derniers ajustements paradigmatiques vers un nexus sécurité-développement avec la mise en place d’initiatives comme l’Alliance Sahel, les puissances occidentales étaient perçues comme principalement focalisées sur l’option du tout-militaire. De l’autre, cette stratégie du « nexus » peine, encore aujourd’hui, à arriver à bout du terrorisme alors que la menace sécuritaire persiste.
Cependant, dans le cadre de la mitigation des stratégies à dominante sécuritaire, il a été de plus en plus défendu l’idée d’agir aussi sur le développement et d’accentuer la coopération pour une approche dite holistique de l’insécurité qui était aussi due à des problèmes dits de développement.
Pendant ce temps, les États africains se trouvent devant la difficulté de devoir communiquer sur la question sécuritaire qui relevait, jadis, de « domaines réservés » face à des sociétés civiles qui se sont progressivement appropriées les questions sécuritaires. Dans les opinions africaines, il s’est imposé une perception selon laquelle, la coopération internationale semble instaurer une primauté de la sécurité sur le développement. Cette perception avait conduit à une autre : l’impression d’une inversion de l’agenda africain de développement qui semblerait favoriser l’approche sécuritaire. Bien que découlant d’une initiative d’États de la région, même l’action du G5 Sahel fut assimilée, au sein des opinions publiques y compris des élites, à un suivisme stratégique voire un programme préconçu de l’extérieur..
Il y avait, aussi, la perception dominante selon laquelle, la promotion appuyée du G5 Sahel par l’Europe et surtout la France, était une manière de déposséder la CEDEAO de la question sécuritaire au profit de pays dans le « giron français » évitant ainsi une hostilité ou une éventuelle méfiance du Nigeria et du Ghana anglophones.
Tous ces paramètres et facteurs combinés, font qu’il était nécessaire de sonder les perceptions et d’interroger les acteurs sahéliens et ouest-africains sur la pertinence, la portée et leur propre appréciation des coopérations sécuritaires et de développement.
L’idée d’éviction des dépenses dites de « développement » par celles de « sécurité » continue aussi d’animer les débats entre experts et décideurs de la région. En effet, selon une étude de Chaire Sahel – non publiée - qui propose une analyse comparée de l’évolution des dépenses publiques, des dépenses militaires et des dépenses de santé et d’éducation - dans les pays du G5 Sahel, il existerait un lien établi entre les évolutions des dépenses militaires d’un côté, de santé et d’éducation de l’autre[1]. Il en ressort qu’au Burkina Faso, par exemple, « la hausse des dépenses publiques observées tendanciellement jusqu’en 2009 puis qui s’est accélérée ensuite a bénéficié aux trois types de dépenses étudiées. La part relative de chacune s’est à peu près maintenue jusqu’en 2016, année après laquelle on observe une hausse de la part des dépenses militaires sans qu’il soit possible de comparer avec la part des dépenses d’éducation et de santé, faute de données disponibles.[2] ». Ce constat qui semble durablement marquer une opinion publique ouest-africaine dubitative sur l’efficience des coopérations sécuritaires, a tout son poids sur les perceptions que ce rapport a tenté d’étudier, bien avant le débat et l’actualité sur les présences militaires et la fermeture des bases étrangères.
Il est à noter que la présente étude est une initiative-pilote qui n’a pu couvrir ni tous les pays, encore moins toutes les catégories d’acteurs pertinents. Cette limite s’explique par la difficulté de mobiliser toutes les capacités et ressources nécessaires, en plus du contexte politico-sécuritaire qui a fait que, par exemple, les chercheurs au Burkina Faso n’ont pas pu dérouler le questionnaire et effectuer les entretiens qualitatifs. Pour l’analyse des perceptions sur les coopérations au développement, il subsiste aussi la difficulté matérielle de cibler des personnes disposant des capacités suffisantes pour s’exprimer sur leur pertinence.